Entre patriotisme économiques et campagne de boycott du made in bladi : Le choix difficile du consommateur

Entre patriotisme économiques et campagne de boycott du made in bladi : Le choix difficile du consommateur

Les prix du véhicule assemblé en Algérie ne connaîtront pas de baisse qu’en cas d’une décision commune des producteurs, d’une baisse conséquente de la demande ou encore lors de l’augmentation de l’offre qui, elle, ne devrait intervenir que progressivement.

Faut-il bouder le produit «made in bladi» et s’inscrire dans la campagne de boycott des voitures assemblées en Algérie, lancée sur les réseaux sociaux et baptisée «Khaliha Ttssadad» (laissez la rouille la grignoter)? Ou faut-il verser dans le patriotisme économique et soutenir le produit national même si le prix de ce dernier est exorbitant? C’est un choix difficile que le consommateur algérien doit faire et il est le seul à le faire. Car, l’Etat ne peut pas intervenir directement sur les prix de vente exercés par les assembleurs de véhicules. Les prix de vente sont libres en Algérie. Il s’agit là d’une disposition réglementaire qu’il ne faut jamais oublier. Dernièrement, le ministre du Commerce, Mohamed Benmeradi, a évoqué, un durcissement du contrôle en matière de commercialisation ou de vente de véhicules, dans le but de lutter contre toute forme de spéculation qui porterait atteinte, aussi bien à l’économie du pays qu’aux portefeuilles des citoyens. Mais que pourra faire réellement le ministère du Commerce? En fait, la situation est autant simple que compliquée. L’Algérie a décidé d’interdire l’importation de véhicules en raison de la crise économique et afin de préserver ses réserves de changes. Mais pas seulement, le gouvernement a décidé d’édifier une industrie automobile et tient donc à faire du protectionnisme pour le produit local qui fait ses premiers pas. Avec cette interdiction d’importation et en raison de la faible production nationale actuellement, la demande est beaucoup plus supérieure que l’offre. L’Algérie qui importait jusqu’à 600 000 véhicules par an, prévoit le montage de 260 000 véhicules pour 2018. Ce qui confirme donc que la demande reste beaucoup plus importante que l’offre et comme tout le monde sait, «lorsque les bananes sont rares, leur prix est élevé», c’est le cas aussi pour les voitures! L’augmentation permet d’éliminer les acheteurs en surnombre. Ce n’est pas exactement ce que prévoit la loi de l’offre et de la demande qui elle, fait état d’une baisse des prix lorsque la demande est importante. Cependant, la loi en question prend en considération la variation simultanée des prix et des quantités. Selon cette loi donc et théoriquement, quand le prix d’un bien augmente, la quantité demandée du bien diminue et quand le prix diminue, la quantité demandée augmente. Or en ce qui concerne les véhicules montés en Algérie, la demande est importante, mais les prix ne baissent pas pour la simple raison que la production ne suit pas une courbe ascendante permettant la baisse des prix. Normalement, lorsque les prix augmentent, ils suscitent une hausse de la production. La variation simultanée des prix et des quantités permet d’arriver à une situation où, pour un prix donné, toute l’offre est écoulée et toute la demande est satisfaite. Et c’est là l’équilibre du marché, or nous sommes loin de ce point d’équilibre pour la simple raison que l’industrie automobile en Algérie est trop jeune. En fait, le marché automobile algérien est sous le coup de la spéculation où la rareté du véhicule a conduit à la hausse des prix ainsi qu’à l’arrivée d’une «bande» d’intermédiaires qui, profitant de la conjoncture, raflent la mise de la production pour revendre plus cher. Mais la question qui s’impose est celle de savoir si les investisseurs dans l’industrie automobile font aussi dans la spéculation? La question mérite d’être posée surtout que ces derniers ont bénéficié d’énormes avantages fiscaux pour l’installation de leurs usines d’assemblage. En effet, après la publication des prix des véhicules assemblés en Algérie à la sortie d’usine, le citoyen lambda a été interpellé par l’écart qui existe entre le prix de revient et le prix de vente. Des écarts qu’il a estimés trop importants, ce qui l’a d’ailleurs amené à appeler à une campagne de boycott. Un simple calcul situe la différence entre les prix de revient et de vente, entre 300.000 DA et 600.000 DA! L’écart atteint quelquefois même le million de dinars. Il y a lieu de préciser que cette différence ne constitue pas la marge bénéficiaire nette puisque les prix publiés par le ministère ne prennent pas en considération la taxe sur le véhicule neuf (TVN), son transport vers les showrooms et les dépôts, sa préparation, sa commercialisation, les charges liées aux salaires et à la logistique et, enfin, la marge bénéficiaire du constructeur. Mais même en comptant ces charges, la marge reste importante. Reste alors une seule explication: les assembleurs de véhicules en Algérie tiennent à faire assez de gain pour poursuivre leur investissement dans la filière automobile et répondre favorablement aux exigences de l’Etat d’atteindre un taux d’intégration de 40% après cinq ans d’activité. Mais est-ce au citoyen de payer le prix de ces investissements? Et quel prix? Parce qu’en réalité ce dernier est obligé de payer en plus une marge aux intermédiaires qui ont la mainmise sur la production locale. Les prix du véhicule assemblé en Algérie ne connaîtront pas de baisse qu’en cas d’une décision commune des producteurs, d’une baisse conséquente de la demande ou encore lors de l’augmentation de l’offre qui, elle, ne devrait intervenir que progressivement. Pour le moment donc, le consommateur algérien doit faire un choix: accepter le prix fort ou s’abstenir d’acheter.

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