Élections locales : magouilles, corruptions et malversation Les “péchés” lucratifs de l’urne

Élections locales : magouilles, corruptions et malversation Les “péchés” lucratifs de l’urne

Des candidats-figurants, des «étiquettes» politiques et une collecte de parrainages «au pas de charge»… Voici les coulisses de la confection de listes électorales pas comme les autres…

Etre candidat aux prochaines élections locales est à la «mode»! En effet, les listes concoctées par certains partis sont le moins que l’on puisse dire «populaires». Beaucoup de candidats, particulièrement les jeunes et les femmes, se sont retrouvés embarqués dans cette bataille électorale alors qu’ils n’ont jamais fait de politique de leur vie, il y en a même qui n’étaient même pas inscrits sur les listes électorales…Un engouement sans précédent qui témoigne du début d’une nouvelle histoire d’amour entre les Algériens et la politique, alors que le divorce a été consommé il y a bien longtemps.

Cependant, lorsqu’on entre dans les coulisses de l’élaboration des listes, particulièrement celles des partis dits «petits», on se rend vite compte que la réalité est loin d’être aussi rose. En fait, c’est simple: ces candidats sont là pour le décor, ou plus précisément pour remplir ces listes qui doivent contenir un certain nombre de noms, selon la taille de la circonscription.

Pour ces partis dont toute la base militante n’est pas aussi nombreuse, cela est quasi mission impossible. Alors on opte pour le plan B: trouver des jeunes qui n’ont aucune ambition politique. On leur promet monts et merveilles si jamais les têtes de listes arrivaient à décrocher une place au…soleil. C’est d’ailleurs, ce que nous avoue Lamia qui est classée à la 8e place d’une liste qui brigue un mandat dans une commune de l’est de la capitale. «La tête de liste est un ami. Je sais bien que je suis là pour faire de la figuration, mais je lui rends service», rapporte-t-elle avant d’avouer que son ami lui a promis un logement social s’il devenait maire. «Wache khsare li aamrou marbahe» (je n’ai rien à perdre dans l’histoire), souligne-t-elle avec un large sourire. Amar qui est à la 13e place sur une liste dans un autre parti d’une autre commune de l’Algérois assure de son côté que voir son visage accroché sur les murs de sa commune l’amuse. «C’est un sentiment de fierté, qui plus est pourrait me servir à draguer des filles…», plaisante-t-il pour expliquer cette «aventure» politique.

Néanmoins, après quelques minutes de fou-rire il admet que c’est plus pour faire des affaires qu’il a accepté de jouer le jeu. «Je sais que je ne ferai pas partie de cette assemblée. Mais j’ai une quincaillerie et la tête de liste m’a promis que s’il passait j’aurais de beaux contrats», fait-il savoir avec un clin d’oeil qui en dit long sur ces ambitions qui sont tout sauf politiciennes.

Hamza, lui, est fonctionnaire, comme Lamia et Amar, c’est un jeune candidat pour les élections du 23 novembre prochain, mais, lui, a comme seule ambition d’avoir un mois de congé payé aux frais de la princesse. «Je suis à la 10e place, je sais que c’est pour remplir les listes. Je me suis entendu avec eux afin de figurer seulement sur la liste sans participer à la campagne. Le 20 octobre prochain, je suis donc en congé…», avoue ce trentenaire qui est censé être détaché pour défendre ses «couleurs».

Les confidences faites par ces candidats ne sont que la suite logique d’une confection de liste électorale qui ne répond à aucune logique…Il va sans dire que les petites formations politiques «offrent» leurs parrainages à tout-va, ou plutôt au plus offrant pour certaines! Elles monnayent cette «étiquette» politique et voient leur représentativité augmenter à travers le territoire national.

Des bureaux locaux de partis inconnus sont apparus dans les quatre coins du pays. Ce sont deux ou trois personnes aux portefeuilles bien remplis qui ont «monté» comme une pièce de théâtre ces bureaux qui leur permettront d’accéder à leur rêve politique. Ils se «payent» des militants et s’offrent une crédibilité en invitant les chefs de ces formations microscopiques, qui viennent à l’inauguration de ces bureaux et accessoirement encaisser leurs chèques, qui peuvent doubler si leurs «poulains» sont élus avec le remboursement des frais de campagne qui vont directement dans leurs poches. Tout le monde y trouve son compte. Car, même si la fonction de maire n’a que peu de prérogatives, elle est de plus en plus convoitée, que ce soit par les élites, les analphabètes, les pauvres et surtout les riches…Ce n’est donc pas le pouvoir ou l’ambition de changer les choses qui fait courir ces candidats. Encore moins, le salaire qui ne dépasse pas les 160.000 dinars pour les maires, les 100.000 dinars pour les adjoints et les 10.000 dinars pour les élus non permanents. Certains sont prêts à tout pour accéder à cette fonction. Ils n’hésitent pas à dépenser des millions de centimes dans le «ramassage» des signatures et d’autres millions dans l’achat des voix! Ils distribuent de l’argent à profusion, organisent des festins accompagnés de cadeaux… Paradoxal? non, pas autant que ça. C’est quoi quelques millions de centimes pour ceux qu’on appelle les gens de la «chkara»? deux, trois jours de travail…Ils voient cela comme un investissement à long terme qui va leur permettre de faire des «affaires» qui vont leur rapporter gros…