Première semaine du ramadhan: La morosité s’empare des lieux

Première semaine du ramadhan:  La morosité s’empare des lieux

Dans la capitale, il n’y a que les gens qui vont à la mosquée qui sortent après El iftar pour aller à la prière des tarawih.

C’est désormais une règle générale. La première semaine du mois sacré débute toujours de façon morose en Algérie. Six jours après, les soirées ramahanesques peinent à décoller. La nuit fait toujours peur! Point de magasins ouverts, point de cafés, point de transport en commun. Dans la capitale, il n’y a que les gens qui vont à la mosquée qui sortent après El iftar pour aller à la prière des tarawih.

Cet état de fait, est-il une fatalité pour qu’il se répète chaque année ou une conséquence à une causalité. C’est la question que nous avons posée durant la soirée de mardi dernier à quelques citoyens que nous avons rencontrés dans différents endroits à Alger. Etant la mieux indiquée pour effectuer notre petite enquête, nous nous sommes déplacés en premier lieu à la place Audin en plein centre d’Alger. Cette emblématique place, réputée pour la dense circulation routière qui marque ses alentours, durant la journée et le flux humain qui la traverse est devenue à notre grande surprise méconnaissable, en ce mardi à 21 h.

Il n’y a aucune trace de cette circulation journalière ni du public qui se plaît à s’y asseoir. L’endroit est mort! Agacé un moment et pris par l’idée de changer hâtivement la destination, nous remarquerons soudain un groupe de jeunes dont l’âge varie entre 25 et 30 ans arriver et prendre place sur les bancs. Des cigarettes au bec, les jeunes ne semblaient pas contents de leur ville devenue fantôme où il n’y a rien à voir. A notre approche, les jeunes ont vite changé de tempérament et apprécié la conversation. «Vous tombez à point nommé ‘notre ami ». Nous avons des choses sur le coeur à dire à ce sujet», nous ont-ils déclaré non sans une pointe d’amertume. «Qui ne veut pas d’une vie nocturne et de surcroît pendant le mois de jeûne.

Notre envie de vivre est la même. Il te mentira celui qui te dira que les gens ne sortiront pas dans la première semaine de Ramadhan s’il y avait des magasins, restaurants ouverts et galas en plein air. Les gens ne vont pas sortir pour marcher dans le noir ‘kho », (mon frère ndlr)», ont-ils ajouté. «Nous ne disons pas que les lieux ne sont pas sécurisés, mais les familles ont besoin d’endroits où elles vont s’attabler, discuter, se sentir à l’aise», a ajouté l’un d’eux en montrant du doigt tous les magasins qui ouvrent la journée mais qui baissent rideau à partir de 18h. Pour ce groupe, les magasins ne restent pas fermés uniquement durant la première semaine à Alger-Centre, mais c’est le cas jusqu’à la dernière semaine de ce mois. «Ce n’est que vers la semaine de ce mois que les commerçants ouvrent et que les familles sortent», affirment-ils.

En l’absence d’une loi qui oblige les commerçants à ouvrir le soir, ces derniers n’ouvrent pas durant les deux premières semaines à bon escient. «Ils préfèrent attendre jusqu’à la dernière semaine pour bien augmenter les prix et taxer doublement les ménages», témoigne-t-on. Les autorités ne sont pas sans responsabilité dans cette situation. Ces dernières devaient donner l’exemple et faire preuve d’imagination. «Organiser des spectacles pour enfants et des foires au niveau des places publiques qui ne pourraient qu’intéresser les citoyens et les inciter à sortir», ont-ils préconisé. Dans ce sillage, il est utile de rappeler que le ministère de la Culture a innové cette année dans la médiocrité.

«Au lieu de donner des instructions pour lancer les fameuses soirées artistiques dès le premier jour de Ramadhan, elle a instruit les directions de la culture pour ne les programmer qu’à partir de la deuxième semaine, et ce, même au niveau de la capitale. Nos interlocuteurs qui voulaient terminer la conversation sur une bonne note, nous ont conseillé d’aller voir du côté de Bab Ezzouar pour faire notre enquête. Bab Ezzouar est une localité très connue pour les centres géants commerciaux implantés en son territoire. Prenant au sérieux leur conseil; nous avons décidé de nous y rendre. En route vers Bab Ezzouar, nous avons été surpris par les lieux déserts de la baie d’Alger appelée communément les Sablettes. L’endroit qui regorge de vie et de monde pendant l’année est totalement vide en cette soirée de mardi à 22h. La fermeture des espaces pour familles et le froid qui sévit n’incitent personne à y aller. Après une dizaine de minutes de route, nous arrivons à Bab Ezzouar. La ville qui donnait l’impression d’être bien éclairée de loin, n’est finalement qu’un leurre. Elle est impénétrable par endroits. Nous avançons à la recherche de commerces ouverts, notre déception fut aussi grande qu’à à Alger-Centre.

Les rideaux des commerces sont tous baissés. La circulation est au point mort. Les rares citoyens que nous avons vus étaient tous en bas de leurs immeubles. Parce que nous étions partis pour voir de près si les centres commerciaux ouvrent la nuit et est-ce que les familles y vont, nous nous sommes dirigés vers le centre commercial Ardis, le plus grand centre commercial à Alger. La bâtisse géante qui l’abrite est superbe. L’endroit est joliment éclairé.

En nous en approchant davantage, nous avons remarqué que le centre est visiblement ouvert et que les familles y affluent en grand nombre. Certaines étaient déjà de retour avec les mains des sachets pleins. «Ici c’est toujours comme ça durant le mois sacré et durant l’été. Les dirigeants du centre profitent de la mort de la capitale pour réaliser leurs affaires», nous a répondu un riverain sur notre question de savoir si ce centre ouvre depuis le premier jour du Ramadhan. Ainsi donc, ce n’est pas la pulsion de vie qui manquent aux Algériens durant le mois de Ramadhan et la nuit, mais finalement faute de mieux… A bon entendeur!