Avant-première algérienne de «JUSQU’À LA FIN DES TEMPS» de Yasmine chouikh : Une vraie leçon de vie et de cinéma!

Avant-première algérienne de «JUSQU’À LA FIN DES TEMPS» de Yasmine chouikh : Une vraie leçon de vie et de cinéma!

Tout en invitant à la légèreté et au rêve, le film de Yasmine Chouikh est une ode à l’espoir et à l’amour…

Un film qui tue! Après ses deux courts métrages«El Bab» (2006) et «El Djinn» (2010) il a fallu attendre 2017 pour que Yasmine Chouikh vienne à bout de son premier long-métrage, intitulé «Jusqu’à la fin des temps». L’attente en valait la chandelle car après toutes les tracasseries qu’a connues sa fabrication, du reste comme la plupart des films algériens qui peinent à se faire, pour moult raisons, la réalisatrice qu’est Yasmine Chouikh laquelle atteint la maturité avec son nouveau-né, nous a donné une belle leçon de vie et de cinéma, et pour cause! Si l’histoire paraît simple, son intrigue philosophique en est bien profonde laissant parler tout le monde. En effet, cela faisait longtemps qu’on n’avait pas vu une salle de cinéma algérienne interagir autant avec un film algérien, et voir un public porté aux nues par tant d’émotion, de rêverie et d’esprit d’évasion malgré le sujet traité. Ce long-métrage raconte la rencontre de Ali (Boudejmaâ Djillali), fossoyeur au cimetière de Sidi Boulekbour et de Johar (Djamila Arrès), une femme d’une soixantaine d’années venue se recueillir sur la tombe de sa soeur aux côtés de laquelle elle voudrait être enterrée. Pour cela, elle demande à Ali de l’aider à organiser ses propres funérailles. Au fil des étapes de la préparation de cette cérémonie et de leurs conversations, les deux personnages se découvrent peu à peu des sentiments l’un pour l’autre. Aussi, elle découvrira la vérité sur sa soeur taxée, à tort, de prostituée, quand, arrivée dans ce village, en fuyant son mari qui la battait, elle ouvrait sa porte aux hommes pour leur donner à manger le jour de l’enterrement…«Je voulais parler d’un amour né dans un cimetière, une histoire d’amour entre deux septuagénaires n’attendant plus grand-chose de la vie et pensant qu’ils n’ont plus droit qu’à la mort, une métaphore de nos sociétés qui ont également tendance à être des lieux sinistres où la mort est reine et l’amour est tabou et si l’amour est toléré, il reste l’apanage de la jeunesse», soutient Yasmine Chouikh.

Si la réalisatrice explique bien son intention à travers le film, reste sa construction qui est savamment exécutée pour nous faire pénétrer l’âme des personnages dont les deux âgés crèvent littéralement l’écran. Le film dramatique par sa thématique car ayant pour cadre une vie oisive dans un cimetière, penche vers le grotesque tant l’humour absurde prédomine.

En effet, à la manière de «Mascarade» de Lyès Salem par endroits, le public ne peut que s’esclaffer de rire devant les traits grossiers et facéties de nos sociétés conservatrices qui font de l’amour un sujet à caution et de tabous à faire taire. Bouleversant, le film de Yasmine Chouikh nous démontre qu’il n’y a pas d’âge pour s’aimer et de célébrer la vie et ce, comme rarement le font les réalisateurs au cinéma. Avec finesse et intelligence, doublées de poésie et de justesse dans le cadre, Yasmine Chouikh maîtrise ses plans et ça se voit à l’image. La caméra caresse ses acteurs et les montre tels quels, désarmants de fragilité, mais beaux dans leur simple humanisme, naïf et tendre.

La tendresse est dans le regard de ses personnages. Leurs cris de joie et leurs gestes puérils…Yasmine Chouikh signe un film généreux à l’instar de sa réalisatrice et de ses acteurs. Il n’en aborde pas moins une thématique bien grave qui tient bien au coeur de la réalisatrice et qui traverse toute sa filmographie, à savoir la violence faite aux femmes dans nos sociétés arabo-musulmanes. Castratrices.

Violence muette ou exprimée, physique ou morale, dictée par les lois archaïques des clans et des esprits obtus et revêches, nés dans le cercle ignorant des hommes. «Jusqu’à la fin des temps» est un film puissamment beau, qui appelle à la raison et à la tolérance pour le bien-être de tous, au vivre ensemble des hommes avec des femmes. Car la vie est plus forte que tout et que l’amour est sa sève nourricière, qu’il ne peut exister de vie, de joie et de fête dans ce bas monde.

Alors, fêtons la vie avant qu’il ne soit trop tard! «Jusqu’à la fin des temps» parle de paix intérieure et d’amour quand la mort domine tout. Se dire qu’il n’est jamais trop tard pour aimer… Tout en invitant à la légèreté et au rêve, le film de Yasmine Chouikh est une ode à l’espoir et à l’amour. Il se veut un cri pour la vie! Le film sort en salle le 26 mars, alors ruez -vous en salle obscure pour le voir! Projeté devant une salle comble mercredi soir à la salle El Mouggar en présence de la réalisatrice et de l’équipe du film, le bonheur cinématographique était réellement au rendez-vous.

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