Oran: l’imbroglio

Oran: l’imbroglio

Plus d’un parti politique en lice a transformé la campagne électorale en festival de chants et danses populaires.

Terne et sans aucun goût perceptible se présente la campagne électorale pour le mandat législatif devant s’étaler durant les cinq prochaines années, c’est-à-dire 2017-2022. Celle-ci prend, certes, un tournant décisif à sa deuxième semaine, mais, elle est, jusque-là, marquée par l’incertitude totale, notamment chez les postulants.

Qui croit à qui? Qui convaincre? À quel électorat s’adresser? Quel est le discours à tenir pour séduire? Qui des 20 partis en lice pourra sortir vainqueur en ayant le dernier mot le 4 mai? De telles questions reviennent comme un leitmotiv sur les lèvres de la quasi-totalité des candidats et des partis ainsi que des militants et des cadres de ces formations en course effrénée pour les voix pouvant les mener vers l’hémicycle Zighout Youcef? A quelques jours du jour J, l’opacité et le hasard règnent en maîtres des lieux.

L’indifférence des populations locales est totale malgré le matraquage médiatique. Faute d’appareils de sondages permettant de jauger le niveau atteint par les postulants dans leurs sorties de persuasion, des candidats s’estiment opulents et heureux d’avoir réussi à remplir les salles tout en évaluant leurs capacités à travers les comptes rendus donnés le lendemain par la presse, nationale et locale. C’est en tout cas, l’imbroglio!

Sinon, pour plus d’un, la participation aux législatives est un coup du hasard, voire un plus: un jeu de poker aux résultats incertains. Pourquoi tout ce pessimisme et l’ambiguïté constatable de visu chez plusieurs candidats en course? Rien ne passe inaperçu devant une telle population, malgré son indifférence, qui explique et s’explique en avançant des arguments tenant toutefois la route. «Pourquoi des hommes d’affaires, des maires, des élus locaux dont le mandat n’a pas expiré et d’anciens députés reconduisent leurs candidatures? se demande plus d’un citoyen sondé. «Y a anguille sous roche», dira un autre.

L’échiquier politique est totalement bouleversé, voire chamboulé. Les candidats, eux, sont plus que convaincus que la campagne ne rapporte pas étant donné que le discours politique, ne tenant plus la route, a vite fait de céder la place au discours populiste reposant essentiellement sur des promesses irréalisables. Convaincre facilement un électeur-demandeur de logement relève d’une mission quasi impossible. L’élite ou encore l’intelligentsia au nombre limité que compte la ville d’Oran a démissionné laissant place aux tambours et «guellal» pour prendre le relais. D’ailleurs, ces deux instruments musicaux locaux constituent les deux outils permettant aux candidats de jauger leur capacité quant à remplir les salles abritant les meetings.

Ces deux joujoux sont très attirants vu les sonorités qu’ils dégagent en bourdonnant aux alentours immédiats des lieux devant abriter les sorties des partis en lice. A Oran tout comme dans plusieurs localités et wilayas de la partie ouest, une telle tradition est à ne pas mettre dans le placard tant qu’elle rapporte. «Un tel folklore est porteur de bonheur», dira un vieux. La campagne électorale fait le bonheur des mêmes troupes folkloriques proposant leurs services contre quelques billets.

Jusque-là, seuls le Parti des travailleurs, le Rassemblement national démocratique et le Front des forces socialistes ont, par le biais de leurs premiers responsables, tenu des discours hautement politiques, proposant ce qu’ils appellent «des alternatives à la crise». Plus d’un parti politique a transformé la campagne électorale en festival des chants et danses populaires en faisant appel à des troupes folkloriques et une assistance importée des villes limitrophes de la commune d’Oran.

S’entassant dans des minibus loués à coups de plusieurs milliers de dinars, cette assistance est, dès son arrivée sur les lieux des meetings, entassée dans des strapontins des salles de cinéma et salle des sports. Les hommes sont sommés d’applaudir pendant que les femmes lancent des youyous à gorge déployée dès que le discoureur hausse le ton dans son speech. Plus d’un de ces partis vend du vent en proposant des philtres utopiques, loin de pouvoir les concrétiser, à moins d’un miracle vu la crise actuelle. Pour mieux convaincre, plus d’un candidat ou encore chef de parti défilant sur le podium, fait mine d’avoir identifié la source du mal qui ronge la société.