Les notables Touareg reviennent à la charge : Ecoutez-nous !

Les notables Touareg reviennent à la charge : Ecoutez-nous !

C’est un cri de détresse qui a été lancé la semaine dernière par des notables Touaregs, avant de passer à l’acte, à travers une marche grandiose dans les rues de Tamanrasset.

Prévue pour hier, cette marche n’aura finalement pas eu lieu. L’Amenokal de l’Ahaggar, Ahmed Adabir, initiateur de l’appel, s’est finalement fait entendre, puisqu’hier une réunion d’urgence s’est tenue en présence des représentants du ministère de l’Intérieur, des responsables sécuritaires de la région et des notables de Tamanrasset, pour écouter les doléances de ces derniers.

Les notables devaient décider, à l’issue de cette rencontre, de la suite à donner à leur mouvement.

Pour rappel, Ahmed Adabir avait lancé un ultimatum, la semaine dernière, « si aucune suite n’était donnée à nos doléances, d’ici dimanche prochain (hier NDLR), Tamanrasset sera le théâtre d’une manifestation grandiose. Toutes les tribus targuies, jusque-là retenues d’investir la rue pour éviter d’en rajouter une couche aux soubresauts et spasmes de protestation qui secouent le pays, seront invitées à un grand rassemblement au chef-lieu de wilaya pour exprimer leur ras-le-bol et crier à tue-tête contre la hogra », avait-il averti.

Il y a lieu de rappeler que le malaise des Touaregs ne date pas d’aujourd’hui, et leurs notables ont déjà eu à s’exprimer sur le sujet, réclamant plus d’égard de la part du gouvernement, et rappelant le rôle de stabilisateur qu’ils jouent dans cette vaste région qui connaît, ces derniers temps, une instabilité chronique aux frontières.

Ahmed Adabir brandit la menace de démissionner de son poste de guide spirituel des Touaregs. La semaine dernière, dans une démonstration de force, il a réuni des chefs de tribus, dans l’oued traversant la ville de Tamanrasset. En battant le rappel de ses troupes, Ahmed Adabir entendait démontrer sa légitimité et celle de l’action qu’il entame, puisque les présents ont exprimé, durant ce rassemblement, leur ras-le-bol de l’exclusion dont ils se sentent victimes.

Mais ce n’est pas l’avis d’autres notables de la région, à leur tête le fils de l’emblématique Amenokal de l’Ahaggar, El Hadj Moussa Akhamoukh. Pour lui, il n’y a pas de malaise chez les Touaregs de l’Ahaggar. Mohamed Akhamoukh estime que l’actuel Amenokal pose un problème personnel et l’accuse de vouloir instrumentaliser la région à des fins électoralistes, notamment à l’approche des sénatoriales.

Il est vrai que depuis la mort d’El Hadj Moussa Akhamoukh, la légitimité de l’Amenokal a toujours été mise en cause. Les deux cousins, Mohamed et Adabir se disputent la représentation des tribus targuies, sur fond de divergences partisanes. Le FLN et le RND se disputent âprement la représentation de la région.

Or, au-delà des divergences familiales et des visées personnelles, force est de reconnaître que la wilaya de Tamanrasset n’est pas une wilaya comme toutes les autres. Avec ses spécificités humaines et naturelles, mais surtout dans un contexte régional assez tendu, elle requiert une plus grande attention et surtout une vision réactualisée, en phase avec les bouleversements qui s’y déroulent.

Il est loin le temps où les Touareg, en particulier, et les habitants du Grand Sud en général, se contentent du silence et du calme légendaires, comme il est loin aussi, et il faut l’admettre, le temps où l’Amenokal constitue l’autorité morale et effective qui agit et s’exprime au nom de toute la population du Sud.

Depuis l’apparition du fameux mouvement pour enfants du Sud, et par la suite le comité des chômeurs du Sud, un nouvel état d’esprit s’est installé dans ces vastes contrées, remettant en cause y compris les notabilités locales.

Le pouvoir central est, donc, appelé à revoir sa copie et à tenir compte de ces changements notables, au risque de se retrouver dépassé par les événements.