Les islamistes ont réussi à unir leurs rangs: Qu’en est-il des démocrates?

Les islamistes ont réussi à unir leurs  rangs: Qu’en est-il des démocrates?

Aussi homogène soit-elle en apparence, la mouvance démocratique n’est pas un bloc monolithique et est, au contraire, constituée d’une panoplie de courants qui sont très souvent inconciliables, aussi bien politiquement qu’idéologiquement.

Plusieurs fois, depuis l’avènement du multipartisme, des appels à une convergence démocratique ont été lancés dans le cadre de la lutte antiterroriste et anti-islamiste, mais aussi dans une perspective d’unification de la mouvance démocratique. Vainement. En 2007, à l’occasion des élections législatives auxquelles il a pris part, le RCD a annoncé en grande pompe son engagement en faveur d’une convergence démocratique et appelé à l’ouverture des listes du parti à tous les militants du courant démocratique et républicain. Mais encore une fois, le succès n’était pas au rendez-vous.

Aujourd’hui, au moment où les islamistes tentent de reconstituer leur matrice à travers des alliances et, parfois, des fusions, les partis démocratiques tirent encore chacun la couverture de leur coté et mettent, par conséquent, toujours à mal toute tentative de rapprochement. Pourquoi les partis démocratiques peinent à surmonter leurs divergences alors que les islamistes ont réussi à s’unir? Est-ce dû à des considération idéologiques, politiques ou simplement à des conflits de leadership? Pour Kader Zerou, ex-cadre du FFS-Immigration, ce ne sont pas les considérations idéologiques qui bloquent le rapprochement des démocrates, mais des calculs politiques et politiciens ainsi que des luttes de leadership.

«Je ne pense franchement pas que ce soit dû à des considérations idéologiques. Cela est dû à mon avis plus à des calculs politiciens quand ce n’est pas une question de leadership. La lecture que se font les uns et les autres de la crise multidimensionnelle que vit notre pays diffère tant les expériences des uns et des autres ne sont pas identiques. Si nous nous attardons par exemple sur le FFS et le RCD qui incarnent un peu cette mouvance démocratique, quand le premier suggérait le changement radical de régime et du tissu institutionnel issu du coup d’Etat de 1965 par le biais d’une Assemblée nationale constituante; le second avait cru, à sa création, que le régime pouvait se réformer de l’intérieur par une alliance avec l’aile moderniste de ce même régime. La situation actuelle semble s’inverser, ce qui crée une sorte d’aporie indépassable,» estime-t-il en soulignant que, à l’heure actuelle, «la mouvance démocratique est dans une impasse politique intégrale».

De son côté, Yacine Teguia, coordinateur national du MDS, pense que le leadership est certes pour quelque chose dans la fragmentation de la mouvance démocratique, mais il considère que le problèème est beaucoup plus profond. En effet, selon lui, «on ne peut pas réduire les difficultés d’alliance dans le camp démocratique à un problème de leadership», dit-il en précisant qu’aucun parti ne peut se prévaloir d’un quelconque leadership dans le camp des démocrates aujourd’hui». «Les prochaines échéances vont être un marqueur des évolutions du champ électoral et remettront en cause, très certainement, les prétentions à la représentativité de certaines forces. Quand on interrogeait le défunt Hachemi Chérif sur les difficultés d’alliance à cause de la stratégie radicale du MDS, il répondait que tous les autres partis n’avaient pas réussi à se rassembler en dehors de notre mouvement, par contre à chaque fois qu’il y a eu une alliance, elle incluait le MDS.

Donc le choix des formes de lutte, le boycott ou la participation électorale, n’est pas un obstacle. Par ailleurs, on a vu ces dernières années que des partis démocratiques ont finalement réussi à se retrouver avec les partis islamistes, y compris le parti des assassins et des forces qui avaient quitté le gouvernement. Ceci démontre d’une part, que ce qui réunit ces différentes organisations, c’est le compromis élaboré à l’arrivée de Bouteflika au pouvoir et, d’autre part, que les questions idéologiques ne sont pas un obstacle insurmontable pour certains rapprochements», explique-t-il. Par ailleurs, Yacine Teguia estime que la question de la convergence démocratique est avant tout «une question politique».

«Certains partis partagent le projet de pérenniser un système qui les a faits au détriment des intérêts de la société, le MDS quant à lui estime qu’il faut les défaire électoralement et sur tous les autres terrains pour pouvoir en finir avec le système et renouer avec le progrès et édifier une Algérie de justice et de liberté.

C’est pour cela que le MDS se tourne résolument vers la société et se détourne d’alliances avec ces partis», conclut-il en guise de justification du rejet par le MDS de toute alliance ou union avec les autres partis de la mouvance démocratique.

De fait, la convergence démocratique ou l’unification de la famille démocratique, bien qu’elle soit stratégiquement souhaitable, reste difficile à réaliser compte tenu de l’ampleur des divergences tactiques et des positions politiques ainsi que des écarts idéologiques entre les partis qui la composent. C’est dire que la mouvance démocratique, aussi homogène soit-elle en apparence, n’est pas un bloc monolithique et est, au contraire, constituée d’une panoplie de courants qui sont très souvent inconciliables, aussi bien politiquement qu’idéologiquement.