Le RAJ commémore le 5 octobre et improvise une marche

Le RAJ commémore le 5 octobre et improvise une marche

Clipboard15.jpgL’association nationale «Rassemblement, action, jeunesse », fidèle à ses habitudes, a, encore une fois, célébré à sa manière l’anniversaire des événements du 5 octobre 1988.

Depuis sa création en 1993, RAJ s’efforce de rappeler l’importance de cette date historique : lorsqu’un «peuple s’est soulevé contre la misère sociale» et pour la liberté.

Un idéal porté haut et fort par les participants à la manifestation qui s’est déroulée hier à la place des Martyrs.

«Libérons la liberté, la liberté fera le reste», conclut la déclaration de l’association lue par une jeune fille.

Après l’organisation d’un séminaire de deux jours, le mot d’ordre est donné par RAJ pour tenir un rassemblement sur le site «historique».

12h30, plusieurs dizaines de personnes se rassemblent au centre de la place.

Les services de sécurité tentent de se faire discrets. Vont-ils intervenir pour les disperser ? Le suspense se lit dans les regards.

Les jeunes font bloc sur la petite scène érigée à la mémoire des martyrs.

Dépôt d’une gerbe de fleurs… recueillement à la mémoire des martyrs de tous les combats pour l’Algérie… minute de silence. Tout se passe dans le calme.

Une jeune fille, membre de l’association, lit la déclaration de RAJ. «21 ans après le soulèvement populaire de 88, l’injustice et la misère sociale sont encore plus d’actualité ; les atteintes aux libertés individuelles et collectives ainsi que l’absence de respect des droits humains sont devenues quotidiennes ; la situation s’aggrave de plus en plus. Il y a danger en la demeure», crie-telle.

Les agents de police commencent à investir la scène. Les banderoles restent levées. «Le but [n’est] pas de pleurer sur son sort ni de prévoir le pire […] Nous devons faire de la réappropriation de nos libertés, de notre dignité le point essentiel de nos mobilisations car, sans liberté, il ne peut y avoir d’espoir de soigner le reste de nos douleurs et maux», poursuit-elle.

Mustapha Benfodil, journaliste et écrivain, tente de prendre le relais. Les forces de l’ordre interviennent pour disperser la foule. «C’est bon, vous avez eu ce que vous vouliez», lance un agent de police.

Les jeunes résistent, marchent en groupe et se rassemblent un peu plus loin. Les slogans qui rappellent les marches populaires «d’antan» fusent.

Sans violence, mais avec fermeté, les forces de l’ordre ordonnent aux manifestants de se disperser.

Le mouvement de foule s’engage dans la rue Bab Azzoun. «Algérie libre et démocratique», «vive la liberté» et d’autres slogans anti-pouvoir résonnent sous les arcades. Les klaxons accompagnent les cris. Commerçants et citoyens regardent avec curiosité le passage de cette foule d’«enragés», poursuivie par les policiers.

Place Abdelkader Alloula, devant le TNA, nouvelle tentative de rassemblement. Elle connaîtra le même sort que les précédentes. La foule avance. Vers la Grande Poste d’Alger.

Applaudissements rythmés, slogans et klaxons résonnent sur les murs de la rue Asselah Hocine. Les jeunes se sentent euphoriques.

Ils ont réussi leur «challenge» : marcher dans les rues algéroises malgré l’état d’urgence.

Pour la mémoire et la conscientisation d’un peuple. «Dispersez-vous. Ça y est. Vous avez marqué non pas un mais plusieurs points. C’est fini, maintenant», décrète un agent de l’ordre en civil.

Le pas franchi par RAJ est grand. La commémoration du même anniversaire l’année dernière était déjà un succès. En investissant la place des Martyrs, il avait déjà opéré un coup de force.

Cette fois, il a réussi à faire plus : marcher pour crier son malaise et rafraîchir la mémoire de ceux qui ont oublié.

Le chemin n’est pas couvert de roses ni tapissé de rouge, c’est pour cela qu’il faut marcher… pas après pas.

«RAJ continuera de faire ce qui lui est possible […] pour faire en sorte que les martyrs des enfants d’Octobre 88 et des autres mouvements sociaux ne soient pas vains et que demain peut-être, après demain sûrement, nous puissions occuper, librement, toutes les rues et toutes les places d’Algérie», promet dans s a déclaration l’association.

Samir Azzoug