L’Arabie saoudite refuse d’entrer au Conseil de sécurité de l’ONU

L’Arabie saoudite refuse d’entrer au Conseil de sécurité de l’ONU

arabi onu.jpgL’Arabie saoudite a refusé, vendredi 18 octobre, d’intégrer le Conseil de sécurité de l’ONU, une décision sans précédent visant à protester contre « l’impuissance »de cette instance, en particulier face au drame syrien, et qui a surpris de nombreux diplomates du Conseil.

Le Conseil, qui compte 15 membres, renouvelle chaque année cinq de ses dix sièges de membres non permanents, sur une base régionale. Jeudi, l’Arabie saoudite, le Tchad, le Chili, le Nigeria et la Lituanie avaient été élus pour un mandat de deux ans qui commencera le 1er janvier prochain.

Dans un communiqué publié quelques heures après son élection, le ministère saoudien des affaires étrangères a fustigé la politique de « deux poids, deux mesures » de l’institution au Proche-Orient :

« L’Arabie saoudite n’a pas d’autre option que de refuser dedevenir membre du Conseil de sécurité jusqu’à ce que ce dernier soit réformé et qu’on lui donne les moyens d’accomplir sondevoir et d’assumer ses responsabilités pour préserver la paix et la sécurité dans le monde. »

Le mandat de deux ans de l’Arabie saoudite devait débuter le 1er janvier.

« EXPRIMER SON INDIGNATION »

Le ministère saoudien estime que le fait « de permettre au régime en place enSyrie de tuer son peuple et de le brûler à l’arme chimique au vu et au su du monde entier sans sanction dissuasive est une preuve claire de l’impuissance du Conseil de sécurité à accomplir son devoir et à assumer ses responsabilités ». Le communiqué souligne également que « la question palestinienne demeure depuis soixante-cinq ans sans règlement » et que le Conseil a échoué à débarrasser le Proche-Orient des armes de destruction massive.

Par ce geste, l’Arabie saoudite « veut exprimer son indignation face aux pays membres permanents du Conseil de sécurité », a déclaré l’expert saoudien Abdel Aziz Al-Sager, directeur du Gulf Research Center. « Elle veut également exprimerson malaise face à la nouvelle politique de Washington et en particulier aux positions du président Barack Obama sur l’Iran, la Syrie et le Yémen. »

L’ONU A EXPRIMÉ SA SURPRISE

Ce refus, qui est une première, a pris par surprise de nombreux diplomates du Conseil de sécurité, certains d’entre eux émettant le souhait que le royaume saoudien revienne sur sa décision, qui n’a pas été officiellement notifiée, signale le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon vendredi.

« C’est tout à fait inattendu, nous avons tous dû vérifier dans l’historique du Conseil pour trouver un précédent et il n’y en a pas », a déclaré un diplomate, rappelant qu’une candidature au Conseil prend « des années de préparation », ce qui rend le geste de Riyad d’autant plus surprenant.

L’élection des dix membres non permanents du Conseil se faisant sur une base régionale, si l’Arabie saoudite maintient sa décision, il reviendrait au groupe arabe au sein de l’Assemblée générale de trouver un nouveau candidat, qui serait ensuite entériné par l’ensemble de l’Assemblée lors d’un vote, comme cela avait été le cas pour Riyad jeudi. « Il pourrait y avoir une nouvelle élection, mais il est aussi possible de persuader Riyad de changer de position », espère un autre diplomate.

LA FRANCE ET LA TURQUIE COMPRENNENT CETTE DÉCISION

Partageant la « frustration » de Riyad à l’égard de la paralysie du Conseil de sécurité de l’ONU, le Quai d’Orsay a rappelé sa « proposition de réforme du droit de veto » – rendue publique en septembre – pour y répondre : lorsque le Conseil de sécurité aurait à se prononcer sur une situation de « crime de masse », les membres permanents s’engageraient à renoncer à leur droit de veto. C’est le secrétaire général de l’ONU, saisi par au moins cinquante Etats membres, qui aurait alors à se prononcer sur la nature du crime.

Istanbul a incité à « respecter » la décision de l’Arabie saoudite, l’ONU « échouant àrépondre activement aux situations de crise à travers la planète », a estimé le président turc, Abdullah Gül. Sans surprise, la Russie, soutien de Damas, a quant à elle fustigé le choix de Riyad, jugeant « particulièrement étranges » les critiques émises en pleine crise syrienne.