Industrie agroalimentaire : Subvention des intrants destinés aux produits à l’export, un faux problème selon l’Anexal

Industrie agroalimentaire : Subvention des intrants destinés aux produits à l’export, un faux problème selon l’Anexal

A la suite du Conseil interministériel, un haut responsable des Douanes avait expliqué, quelques semaines plus tard, au début du mois d’août, à l’APS, que les exportations des produits alimentaires utilisant des intrants bénéficiant des subventions de l’Etat connaissaient «certains dysfonctionnements».

«J’estime que son intention était bonne et l’objectif noble. Abdelmadjid Tebboune a voulu réduire les importations et créer davantage d’intégration industrielle. Il a provoqué un électrochoc en bousculant le tout-import. Il a dérangé des intérêts, c’est certain. Mais la méthode qu’il a utilisée était contestable et lui a fait perdre son crédit politique de dirigeant de gouvernement. Il est certain, maintenant, qu’il n’avait pas la connaissance réelle de la complexité du système économique algérien, tel qu’il fonctionne actuellement. Il n’avait pas non plus les hommes pour conduire la politique qu’il voulait. Il a confondu vitesse et précipitation et a fini par gripper toute la machine pendant plus de deux mois.»

Voilà comment le président de l’Association nationale des exportateurs algériens (Anexal) résume le mandat de l’ancien Premier ministre, Abdelmadjid Tebboune, limogé avant-hier par le président de la République, après des semaines de crispation avec les milieux d’affaires et le patronat et la décision d’El Mouradia par un recadrage en règle, le 8 août dernier. Pour Ali Bey Nasri, M. Tebboune a fait beaucoup d’erreurs. Celle qu’il cite «en connaissance de cause » était sa décision de considérer, en Conseil interministériel du 24 juillet dernier, les exportateurs des produits agro-alimentaires comme des «bidouilleurs » des subventions consacrées par l’Etat aux «intrants », utilisés par l’industrie du secteur pour permettre aux Algériens de consommer à bas prix des produits fluctuants et vendus très souvent chers sur les marchés internationaux. Flashback.

A la suite du Conseil interministériel, un haut responsable des Douanes avait expliqué, quelques semaines plus tard, au début du mois d’août, à l’APS, que les exportations des produits alimentaires utilisant des intrants bénéficiant des subventions de l’Etat connaissaient «certains dysfonctionnements ». En décrypté, les opérateurs du secteur font coup double : acheter des produits subventionnés comme n’importe quel consommateur algérien et les revendre ensuite en devises à l’export. Ces «dysfonctionnements » devraient être examinés par une «commission intersectorielle » composée de cadres des finances, du commerce et de l’industrie.

Avec le départ de M. Tebboune, il n’est pas sûr que cette commission continue de travailler pour publier un rapport attendu à la fin de ce mois d’août. C’est totalement inutile si elle devait travailler selon les axes annoncés par l’ancien Premier ministre, estime le président de l’Anexal. «Il s’agit-là d’une problématique réglée depuis 2011 grâce au régime de traçabilité des intrants», a-t-il précisé avant-hier à Reporters. Et d’expliquer que «l’opérateur qui veut exporter fait appel au régime de douanes» dit de «perfectionnement actif», mis en place par «l’Organisation mondiale des douanes, en conformité avec la Convention d’Istanbul que l’Algérie a ratifiée».

Des avantages pour faire tourner l’entreprise agro-alimentaire

Le régime de «perfectionnement actif » est destiné, en effet, à favoriser l’activité économique des entreprises algériennes qui transforment des marchandises, en Algérie, avant de les réexporter ou de les mettre à la consommation. Il s’agit donc d’un régime destiné à favoriser la production et l’exportation par des entreprises nationales avec un avantage fiscal et de trésorerie en «suspension de droits et taxes », indique Ali-Bey Nasri. Les produits achetés à l’étranger sous ce régime sont soumis à la traçabilité «de façon que les produits exportés soient en rapport avec les quantités importées, dans une proportion arrêtée par le ministère du Commerce», détaille-t-il.

Lorsque l’opérateur économique importe une tonne de blé, celui-ci doit exporter 70% du volume en pâtes, le reste est transformé en son. «Sur cette partie, les producteurs s’acquittent de droits de douane», poursuit-il sur ce point. Dans ce domaine, la «seule piste ouverte», se rappelle-t-il, «l’a été avec Bakhti Belaïb, quand il a créé au ministère du Commerce une cellule d’écoute». Elle consistait, se souvient Ali-Bey Nasri, à «permettre à ceux qui vendent des produits du terroir avec une forte valeur ajoutée, du couscous artisanal par exemple, de pouvoir exporter avec un engagement auprès des douanes». L’engagement consistait pour les opérateurs concernés de «s’acquitter du différentiel». Malheureusement, «il n’a pas été respecté, l’administration en charge n’a pas pris le dossier en main», a-t-il regretté.

«Avec la dégradation de la situation économique, le recours à ce régime a été laissé de côté, obligeant les exportateurs à acheter eux-mêmes de l’étranger leurs matières premières et non pas en Algérie auprès de l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC), ajoute le président de l’Anexal. Il affirme que l’achat du blé au prix coûtant était une proposition de son association pour éviter toute confusion. Et de trancher : «Nous ne sommes qu’au début de l’exportation et la question de la subvention des intrants ne représente pas grand-chose pour le Trésor public, face au grand gaspillage du pain, par exemple. Une énormité à laquelle il faut s’attaquer. » «Même si le blé est subventionné, l’Etat reste bénéficiaire. La tonne de blé tendre coûte environ 200 dollars, si l’on exporte le produit fini, les pâtes en l’occurrence à 600 dollars, il y a un gain pour l’Algérie. Ceci sans compter les emplois créés », a-t-il conclu.