Bordj Bou Arréridj, Ce chômage qui tue

Bordj Bou Arréridj, Ce chômage qui tue

bor.jpgEst-ce un hasard si les contestataires qui sont sortis dans la rue au début du mois de janvier se sont attaqués aux sièges de la direction de l’emploi, à l’Anem et à l’Ansej ? Le chômage qui a poussé ces jeunes à ce genre de manifestation a amené d’autres à recourir au suicide.

La wilaya de Bordj Bou Arréridj a enregistré plusieurs cas de jeunes qui ont voulu attenter à leur vie pour exprimer leur ras-le-bol de la situation sociale qu’ils vivent. Une des tentatives de suicide a même réussi. A Medjana, trois habitants se sont lacérés le corps à cause de cette situation.

Ils ont tenu à exprimer leur découragement alors qu’ils ne demandent qu’une source de revenu pour une vie digne. Cette détresse ne cadre pas avec les assurances officielles qui évoquent une évolution de l’emploi dans la wilaya. Le directeur concerné qui a annoncé la création de plus de 45 000 emplois l’année passée a précisé que le chômage est descendu sous la barre de 10%.

Il était de l’ordre de 32% en 1999.

Pourtant, la population a augmenté. En 2004 où le nombre des résidents était de 599 000, les actifs ont été estimés à 266 000. Ce qui donne un taux de chômage de 23%. En 2009, le nombre d’habitants était de 640 000. Le nombre de chômeurs a été réduit de 62 197 en 2004, actuellement ils sont 37 881 chômeurs (10,85%).

En termes de création d’emplois, le taux est significatif. 408,8 en 10 ans, soit de 7485 emplois en 1999 à 41 795 en 2009.

Le responsable qui a expliqué que plus de 23% de ces postes sont permanents a noté que le nombre était en 2009 de 34 900.

45 000 postes créés en 2010

Bien sûr, la wilaya qui a connu une dynamique certaine en matière d’investissement qui s’est traduite par la création d’un nombre important de postes d’emploi, a bénéficié de plusieurs projets dont celui de l’autoroute qui traverse la wilaya de bout en bout. Des villages entiers ont vu leurs habitants pris dans les chantiers. Les programmes continus de logements, de chemins de wilaya et de gaz naturel ont également utilisé une main-d’œuvre gigantesque.

Ceci explique pourquoi le secteur du bâtiment, des travaux publics et de l’hydraulique est le premier à pourvoir ces postes avec plus de 37% de participation. Mais le même responsable n’a pas manqué de préciser que 35% de ces postes proviennent du dispositif d’aide à l’emploi. Cela donne une idée sur la précarité des postes comme le prouve également l’importance des emplois à durée déterminée. Beaucoup de jeunes se retrouvent dans la même situation sitôt le projet terminé.

D’autres ne sont employés que 2 ou 3 mois, comme c’est le cas dans l’agriculture. Le dispositif d’insertion n’est guère meilleur puisque les contrats ne durent qu’une année. Rares sont ceux qui arrivent à décrocher un renouvellement. Beaucoup de chômeurs préfèrent les postes chez le public même s’ils sont moins bien rémunérés à cause de ce problème.

Quand les passe-droits détournent les postes

Ce qui rappelle la nécessité d’augmenter les emplois permanents par rapport aux saisonniers. Seule une croissance réelle basée sur un investissement durable permet d’améliorer le sort des milliers de travailleurs qui sont à la recherche de revenus stables.

Les experts parlent de l’utilité de la promotion de la culture d’entreprise pour inverser la tendance actuelle. Encore faut-il que les moyens, notamment le foncier industriel et les crédits bancaires, suivent. Ce qui n’est pas toujours le cas, comme le montre le nombre de projets à l’arrêt malgré l’accord de l’Ansej.

L’autre problème qui guette la question de l’emploi réside dans la justice ou plutôt l’égalité des chances entre les demandeurs dans la distribution. Si beaucoup de jeunes se sont révoltés, c’est pour mettre fin aux passe-droits dans l’octroi des postes. Ces jeunes ne comprennent pas comment des emplois de chauffeur, agent de bureau voire de gardien vont à des demandeurs établis en dehors de leurs localités de résidence.

Qu’est-ce qu’ils ont de mieux que nous ?, demandent-ils. Pire, ils se trouvent mieux placés puisqu’ils sont installés à côté des structures où les postes sont créés. Ils ont l’avantage de la disponibilité. Ce qui n’est pas moindre. Chose qui a poussé un responsable local à réclamer la révision de la réglementation qui oblige ces structures à organiser des concours régionaux ou même nationaux.

Des raisons d’espérer

La lutte contre la corruption et le régionalisme occupe une place certaine dans ce plan qui vise à assainir le secteur. Des dizaines de milliers de postes sont créés. Autant qu’ils soient orientés vers ceux qui en ont besoin. En plus de cette politique, il est nécessaire de doper la création d’emplois. Les autorités locales avancent un objectif de 30 000 postes par an dans le cadre du plan quinquennal 2010-2014. Elles précisent même que le chiffre de 45 000 emplois réalisé en 2010 est appelé à augmenter cette année.

Le wali qui a donné une conférence de presse récemment évoque trois projets capables de prendre le maximum de jeunes. Le plus proche est celui de la construction de la voie ferrée électrifiée Bordj Bou Arréridj-Thénia. Les travaux de cette voie doivent démarrer au mois d’avril. 4000 postes sont attendus. Le second est la nouvelle zone industrielle de Mechta Fatima où 12 000 emplois sont prévus.

Le troisième est le port sec implanté à Tixter. Des milliers de postes sont également attendus dans ce port qui devra appuyer l’industrie locale. Pour le premier responsable de la wilaya, les raisons d’espérer existent. Pourvu qu’elles ne soient pas détournées. Les jeunes de la wilaya méritent un autre sort.

Par Hocine Naïli

Selon les chiffres officiels, le chômage est descendu en 2010 sous la barre des 10%. En 2009, il était de 10,85%, alors qu’il était de 32% en 1999. En 10 ans, le nombre de postes d’emploi est passé de 7485, en 1999, à 41 795, en 2009.