Les ouvriers algériens de la société chinoise CRCC qui construit la première tranche de la pénétrante de l’autoroute Est-Ouest (13 kilomètres), travaillent dans des conditions dangereuses, sans aucun dispositif de protection contre les chutes de hauteur pouvant survenir au niveau des viaducs très hauts, ni accès à la médecine de travail ou autres visites médicales périodiques, ont déclaré dimanche dernier à notre journal des ouvriers spécialisés en ferraillage, coffrage et soudure du chantier PK 2 du long viaduc routier de Sidi Amar à l’entrée de la ville portuaire de Ghazaouet.
«Nous sommes vraiment en danger et exposés aux chutes de hauteur de plus de 40 mètres. Nous circulons sur de longues poutres espacées de 50 centimètres à près de 40 mètres du sol, et au moindre déséquilibre c’est la chute vertigineuse jusqu’au sol et bonjour la mort. Il n’y a ni protection collective telle que les échafaudages, plateformes de travail, sans garde-corps ni de protection individuelle telle que les harnais antichute, ni filet de protection contre les chutes, ni systèmes d’ancrage pour la protection contre les chutes. On travaille avec un dispositif défectueux et mal utilisé. Vous imaginez un peu le vertige que l’on peut avoir à 40 m de hauteur sans parler du soleil, la chaleur, le vent et la pluie. Nous ne sommes même pas dotés de chaussures de sécurité, de tenues de travail, de casques et de lunettes de protection. Même les outils mis à notre disposition sont précaires comme une griffe de pliage de ferraillage qui pèse plus de 30 kilogrammes. Les moyens et premiers secours sont également inexistants, il n’y a ni boite à pharmacie, ni infirmier, ni ambulance. Les responsables chinois refusent de nous écouter. Pour eux, ces questions de sécurité et santé au travail sont leur dernier souci».
Il est à rappeler dans ce cadre, que jeudi dernier, un ferrailleur de 34 ans (originaire de Hammam Boughrara) a trouvé la mort dans une chute de 32 mètres depuis un viaduc en construction, sur le chantier de la pénétrante de l’autoroute est-ouest, près du quartier de Sidi Amar de Ghazaouet. Il était environ 8h30 du matin lorsque cet homme qui s’attelait à couder des barres de fer à l’aide d’une lourde griffe est tombé de ce viaduc. A l’arrivée des secours, l’homme était déjà mort. Une enquête de gendarmerie a été ouverte pour tenter de comprendre ce qui s’est passé. Des inspecteurs du travail et des contrôleurs de la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles de la CNAS se sont également rendus sur place dimanche dernier pour déterminer les causes exactes de cet accident mortel et constater les conditions de travail, les défauts et les manquements pouvant être à l’origine du décès de l’ouvrier.
Il faut noter que suite à ce drame, près de 174 travailleurs algériens ont observé un sit-in devant le siège de la base de vie de la CRCC pour réclamer de meilleures conditions de travail par des mesures d’hygiène et de sécurité. Plongés dans une immense tristesse et dans le désarroi le plus profond, les ouvriers ne comptent pas reprendre leur travail avant la satisfaction de leurs revendications et exigent des enquêtes administratives et judiciaires pour faire toute la lumière sur ce qui s’est passé.
