Renoncement à la planche à billets : Quelle alternative pour le gouvernement Bedoui ?

Renoncement à la planche à billets : Quelle alternative pour le gouvernement Bedoui ?

Le Premier ministre Noureddine Bedoui a annoncé, samedi à Alger, la décision «de renoncer définitivement au financement non conventionnel».

Il ne fait, en fait, que confirmer ce qu’a été prévu dans l’avant-projet de loi de finances 2020 qui, dans ses calculs budgétaires du prochain exercice, ne fait aucunement recours à des financements non conventionnels. A moins qu’il s’agisse d’arrêter la production monétaire le temps d’utiliser le surplus produit cette année et qui n’a pas été injecté dans les circuits, faute de demande. En tout cas, faute de détails, l’avant-projet de loi de finances 2020 reste bien silencieux sur les financements que le gouvernement doit mobiliser en 2020 pour la couverture des dépenses courantes.

Le Premier ministre a relancé le débat de plus belle, samedi, sur l’alternative possible à la planche à billets et l’apport des financements extérieurs prévus par la loi budgétaire du prochain exercice. Dans une allocution, lue en son nom par le ministre de l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’Aménagement du territoire, Salah Eddine Dahmoune, à l’ouverture de la Conférence nationale sur le renforcement de la prise en charge sanitaire dans les wilayas du Sud et des Hauts-Plateaux, Noureddine Bedoui a fait état de «l’abandon définitif du financement non conventionnel».

«Ce sont là les lourdes responsabilités que chacun de nous doit assumer pour la préservation des chances et droits des futures générations, qui ne doivent aucunement être hypothéquées», a-t-il soutenu. Le Premier ministre a ajouté que le gouvernement «œuvre, dans ce cadre, à la préservation de la situation financière de l’Etat et de ses institutions, notamment en cette période décisive et cruciale qui implique pour nous tous, responsables et citoyens, d’être à la hauteur des défis et enjeux posés». «Notre Etat-continent est à la croisée des chemins pour un décollage vers un lendemain meilleur dans tous les domaines vitaux, en concrétisation d’un développement équilibré et de l’équité dans la prestation de services au profit de tous les citoyens», a-t-il ajouté. En tout cas, cette décision de renoncer brutalement à la planche à billets a été largement critiquée par les économistes, étant donné que dans la situation actuelle des finances publiques, l’Etat ne dispose plus d’aucun pare-choc financier en mesure de substituer au financement dit non conventionnel. A fin février dernier, la Banque d’Algérie a imprimé plus de 6 500 milliards de dinars ; un cash-flow mis à la disposition du Trésor public sous forme d’emprunts à long terme.

Une partie de cet argent n’a pas été mobilisée, ce qui suggère que la partie non mobilisée des 6 500 milliards de dinars imprimée sera injectée dans le budget de 2020. C’est pourquoi le recours à la planche à billets a été écarté pour le court terme, même si, à moyen terme, le problème de financement va encore se poser inévitablement compte tenu de l’absence de substitutifs à la planche à billets. Théoriquement, le financement non conventionnel court jusqu’à 2021, échéance durant laquelle les finances publiques devraient retrouver l’équilibre, à la condition que les réformes devant accompagner la planche à billets soient strictement respectées et appliquées.

On n’en est pas encore là, puisque les réformes budgétaires et économiques qui devaient accompagner la planche à billets ont été mises au placard pour des raisons inexpliquées. La planche à billets, faut-il le rappeler, a été mise en marche à un moment où les caisses de l’Etat étaient quasi-vides. Les opérations d’Open Market et de réescompte, décidées par la Banque d’Algérie afin de relever un tant soit peu le niveau de la liquidité bancaire, n’ont pas donné les résultats escomptés, alors que bien d’institutions financières et non financières étaient également en sous-liquidités, dont le FNI, la CNR et des banques à l’instar de la BNA.

En revanche, dans l’avant-projet de loi budgétaire pour 2020, le gouvernement a annoncé le retour aux emprunts extérieurs, mais ceux-ci sont loin de constituer une alternative à la planche à billets, car ils seront, d’abord, sollicités pour des projets économiques et, ensuite, si ces emprunts extérieurs s’avéreraient inévitables, ils seront conditionnés, alors que les démarches promettent d’être longues.

Hakim Ould Mohamed.