Rachida Chetti, secrétaire générale du Syndicat des sages-femmes algériennes : « Les défaillances du système de santé sont anciennes et il n’est pas intelligent de les occulter »

Rachida Chetti, secrétaire générale du Syndicat des sages-femmes algériennes : « Les défaillances du système de santé sont anciennes et il n’est pas intelligent de les occulter »

Reporters : Vous observez dans la matinée d’aujourd’hui un rassemblement de protestation devant le siège de l’UGTA. Pourquoi ?

Rachida Chetti : Le Syndicat des sages-femmes algériennes a décidé d’organiser cette rencontre pour protester contre la détention préventive de nos camarades de l’hôpital d’Aïn Oussera et pour indiquer que nous suivons de très près cette affaire que nous dénonçons.

Le rassemblement auquel nous avons appelé sera l’occasion de relancer le débat au sein de notre corporation sur les défaillances dont souffre notre système de santé et tenter de trouver ensemble, avec d’autres professions du secteur, les moyens d’y remédier.

Il y aura également des recommandations sur la manière dont nous concevons le métier de sage-femme dans notre pays.

Vous dites que vous suivez de très près l’affaire des sages-femmes en détention préventive.

Y a-t-il de nouveaux éléments ?

Une enquête est en cours. Nous disposons de nouvelles données importantes mais l’affaire est entre les mains de la justice. Il est de ce fait plus raisonnable et plus juste de laisser la justice faire son travail et de ne pas le commenter avant la fin de l’enquête.

La recommandation générale au sein du syndicat est de rester discret et d’attendre les conclusions de l’enquête. Ce que je peux vous dire, en revanche, est qu’en dépit de la faiblesse des ressources dont nous disposons, nous travaillons ardemment à sa collecte pour engager un éminent avocat afin de représenter nos consœurs incriminées et défendre leurs intérêts. Cet avocat prêtera main forte à ceux que les prévenues ont déjà engagés. Tout le monde est d’accord au syndicat pour faire contribuer tous ses membres à payer les frais d’un avocat de renommée.

Le ministère de la Santé publique, vous le savez, s’est constitué partie civile. Qu’en pensez-vous ?

J’appelle cela une fuite en avant et ça ne réglera rien les problèmes profonds et structurels. Les défaillances du système de santé datent de plusieurs années et il n’est pas intelligent de les occulter, d’autant plus que la responsabilité n’incombe pas à l’équipe dirigeante actuellement. Le problème de la santé publique dans notre pays est ancien et il ne sera pas réglé d’un coup de baguette magique.

Il faut, cependant, avoir le courage de l’admettre et d’affronter les difficultés pour les régler tous ensemble. Notre syndicat considère que c’est grave que le ministère laisse tomber ses employés dans une affaire où il fallait d’abord identifier les responsabilités, toutes les responsabilités. Le ministère doit faire son travail non pas dans la précipitation mais en rassurant d’abord son personnel sans complaisance ni laxisme.

Cette affaire intervient au mauvais moment, car c’est la période des recrutements dans les instituts supérieurs de sages-femmes. Les candidates comme leurs parents ont peur de se lancer dans des professions menacées. Ce ne sont pas des paroles en l’air, certaines sont mêmes dissuadées de rejoindre ces instituts. Ce qui est préjudiciable pour l’avenir de la profession et pour la santé dans notre pays en général.