Poursuite de la mobilisation populaire : Le pouvoir choisit de faire la sourde oreille

Poursuite de la mobilisation populaire : Le pouvoir choisit de faire la sourde oreille

Par Ali Boukhlef

Le pouvoir semble s’accommoder des manifestations du vendredi. Alors que des millions d’Algériens sont, de nouveau, sortis, le 22 mars, pour encore réclamer le départ du système, Abdelaziz Bouteflika demeure absent. En sus de l’absence physique du chef de l’État à laquelle les Algériens se sont habitués, le pouvoir n’a plus ni tête ni porte-voix, ce qui devient plus que problématique. Cette attitude est, au mieux, l’expression d’un malaise qui s’empare des centres de décision et, au pire, une nouvelle manière d’ignorer les revendications des Algériens. C’est visiblement cette option qui caractérise la posture actuelle du pouvoir en place.

Depuis la lettre adressée aux Algériens à l’occasion de la célébration de la Journée de la Victoire, qui coïncidait avec le 19 mars, la voix du pouvoir s’est, de nouveau, éteinte. Ni la présidence de la République, qui n’a plus de visage, ni le Premier ministre, embourbé dans sa démarche infructueuse de former une nouvelle équipe gouvernementale, n’ont daigné répondre aux millions d’Algériens qui sont sortis, en masse, vendredi dernier, pour réclamer une nouvelle fois le départ d’Abdelaziz Bouteflika et de son système.

Quant aux partis du pouvoir, qui jouent souvent le rôle de porte-voix d’un pouvoir qui n’arrive plus à trouver de visages pour le défendre, ils sont englués dans des dissensions internes qui n’en finissent pas de surprendre. Dans sa courte missive envoyée le 18 mars, Abdelaziz Bouteflika avait rappelé qu’il ne quittera pas la présidence de la République avant l’élection d’un nouveau chef de l’État. Il a rappelé qu’il compte mener sa feuille de route qui consiste à organiser une conférence “nationale inclusive”, l’adoption, par référendum, d’une nouvelle Constitution. Le tout sera couronné par une élection présidentielle. Aucune limite temporelle n’a été rappelée.

Pire, cette lettre donne même l’impression que le chef de l’État veut demeurer à son poste pour une longue période. Pourtant, le chef de l’État — ou ceux qui ont rédigé le document — semble ignorer qu’après le 28 avril, il n’aura plus de légitimité pour présider aux destinées de l’État. Pis encore, son rôle comme possible guide de la crise est contesté jusque dans les rangs des partis du pouvoir.

L’attitude d’Abdelaziz Bouteflika et des autres figures du pouvoir est dangereuse. Elle fait perdre au pays une vraie opportunité pour la sortie de crise. Car, en face, la population ne semble pas vouloir baisser les bras. Les manifestations se poursuivront et des appels à des grèves générales, qui toucheront notamment des secteurs névralgiques, sont déjà lancés sur les réseaux sociaux. Un signe que la mobilisation ne faiblit pas. Bien au contraire. Au fur et à mesure que Bouteflika s’accroche au pouvoir, les Algériens maintiennent leur mobilisation. Le bras de fer se poursuit.

Ali Boukhlef