Plan anticrise du gouvernement Sellal , Classe politique et experts sceptiques

Plan anticrise du gouvernement Sellal , Classe politique et experts sceptiques

Qui n’a pas su efficacement gouverner en temps d’opulence ne saura le faire quand le sou vient à manquer ! Voilà la sagesse que la classe politique — entendre les partis de l’opposition — oppose au Premier ministre, Abdelmalek Sellal, lequel, ayant réuni les walis, samedi, à Alger, a affiché un optimisme quant à pouvoir traverser la crise du pétrole sans grands dégâts pour le pays, sinon mieux, à réussir en temps de disette ce qui a été lamentablement manqué  quand les caisses débordaient. De l’intervention de Sellal devant les walis, les partis de l’opposition retiennent l’aveu d’échec auquel il ne pouvait que se rendre, mais lui reprochent surtout de ne pas avoir l’audace de démissionner après cela.

Atmane Mazouz (RCD)    : “Lorsqu’on échoue, on démissionne”

“La rencontre de Sellal avec les walis a permis, encore une fois, d’étaler la navigation à vue du gouvernement. Nous sommes plus que dans le parfait burlesque en écoutant le Premier ministre déclarer que ‘malgré le contexte économique défavorable, nous pouvons bâtir une économie émergente et diversifiée’. Les Algériens, qui attendaient un véritable sursaut et des décisions sérieuses pour endiguer la grave crise dont souffre le pays, ont eu droit à une rencontre spectacle qui n’aura aucune incidence positive sur leur quotidien. Par quel miracle Sellal va-t-il bâtir une économie émergente et diversifiée avec un baril de pétrole à moins de 50 dollars et des recettes qui s’amenuisent, alors qu’il n’a rien pu faire avec un baril à plus de 120 dollars durant des années de leur règne ? Lorsqu’on échoue, on démissionne. L’absence de vision et l’improvisation, dont souffre la gestion du pays, continueront à peser douloureusement avec un gouvernement dont la seule perspective est l’accaparement de la rente par différents prédateurs. Si des décisions sérieuses ne sont pas prises avec un recadrage effectif de toute la politique économique du pays, de grandes inquiétudes et incertitudes continueront à peser sur la stabilité du pays. Sellal nous apprend soudainement que la population algérienne existe aux yeux de la tribu qui a accaparé le pouvoir, alors qu’elle est livrée au désespoir et à elle-même depuis des années. Les Algériens ne doivent certainement pas être détournés du mal qui ronge la nation, un mal qui a une seule origine : l’illégitimité, source de tous les malheurs. Les Algériens auraient beaucoup apprécié si Sellal avait parlé de la récupération des milliards de dollars détournés, de la traduction des corrompus en justice, de la manière de s’attaquer aux intérêts financiers et matériels de la mafia qui a privatisé les institutions. Dans cette rencontre avec les walis, Sellal s’est complètement dérobé aux questions qui interpellent et a préféré plaisanter.”

Soufiane Djilali (Jil Jadid) : “Les Algériens se plaignent de la mauvaise gouvernance”

“Le gouvernement, en particulier le Premier ministre, semble se réveiller et prendre conscience que le pays est dans un mauvais état. Après l’avoir détruit depuis plusieurs années, M. Sellal et ses compagnons font mine d’appeler à la rescousse tout le monde, y compris l’opposition, pour les aider à reconstruire le pays. Je n’ai qu’une chose à demander au Premier ministre : faire ses valises, lui et la quincaillerie qui est avec lui, et d’emporter le 4e mandat le plus loin possible du pays. Tout comme les Libanais qui se plaignent des mauvaises odeurs des ordures, les Algériens se plaignent, quant à eux, de la mauvaise gouvernance et des clans prédateurs. Le mieux est qu’ils partent le plus rapidement possible. L’espoir pour le pays est d’oublier ces visages, du Président jusqu’au dernier qui a applaudi le 4e mandat.”

Ahmed Adhimi (Talaiou El-Houriat) : “L’échec de ce pouvoir est total”

“Le gouvernement a échoué. Il ne lui reste qu’une seule chose : accepter de reconnaître son échec et préparer un gouvernement de transition avec l’opposition. Son échec est total. De 2011 à août 2015, l’Algérie a importé pour presque 30 milliards de dollars de voitures, alors qu’une usine coûte quelque 700 millions de dollars. Ce pouvoir a gaspillé notre argent dans des festivités dont on a rien tiré. Au moment où le pétrole était à plus de 100 dollars, ils n’ont rien fait et rien réalisé. En 16 ans, ils n’ont fait que dépenser, et là, ils veulent tout faire. Ils doivent assumer leur échec et leur responsabilité, sauf qu’ils jouent à un jeu très malsain. Ils sont en train de faire peur au peuple. La sortie de Mezrag, qui tient son université d’été dans les maquis, au vu et au su de tout le monde, est la preuve qu’ils sont dans cette optique de faire peur aux Algériens. Des partis politiques agréés ont du mal à avoir les autorisations pour une rencontre de militants. L’échec est total. Il va du domaine sécuritaire à celui économique, en passant par ceux social et culturel.”

Saïd Bouhadja, responsable au FLN : “C’est une rencontre importante”

n “La rencontre entre le gouvernement et les walis a été franche. Elle a pour but de coordonner le travail pour appliquer les décisions et les orientations du gouvernement, et ce, dans tous les domaines. C’est une rencontre importante à travers laquelle M. Sellal a rassuré les Algériens, quant à leur avenir et les décisions prises pour faire face à la crise. M. Sellal a mis fin à toutes ces politiques qui visent à décourager les Algériens et à saper le moral du peuple. Le Premier ministre a été clair. Si les orientations et les décisions du gouvernement sont appliquées et respectées, le but sera atteint sans aucun problème, car elles sont étudiées et analysées. Dans le cadre de la politique d’austérité qu’applique le gouvernement concernant les importations et le fonctionnement des institutions, les décisions énumérées prises vont assurer un décollage économique loin de la rente et réduire de la dépendance aux hydrocarbures. L’austérité est imposée pour tous les pays du monde, c’est donc une politique nécessaire pour faire face à cette conjoncture de baisse des prix du pétrole et aussi mettre sur pied une économie productive. La rencontre est aussi importante parce qu’elle vise une gestion rationnelle des ressources pour assurer le développement.”

Mohamed Hadibi, chargé de communication d’Ennahda   : “Le pouvoir doit présenter ses excuses au peuple et démissionner”

“Il est regrettable de voir encore les représentants de l’État penser tout le contraire de ce que pensent les Algériens ; de mener des politiques qui ne répondent guère aux aspirations des citoyens. Aujourd’hui, tout le monde sait que la situation que traverse le pays est le résultat de la mauvaise gestion du pouvoir qui n’a fait jusque-là que gaspiller l’argent généré par la rente pétrolière. Au lieu de chercher des solutions dans ses propres échecs, le pouvoir devrait logiquement présenter ses excuses au peuple algérien et déposer sa démission. Il est inacceptable qu’il cherche aujourd’hui encore à hypothéquer l’intérêt du pays en prévoyant de recourir à l’endettement pour, en fait, récupérer le même argent du peuple qu’ils ont fait fuir à l’étranger auparavant. Devons-nous rappeler au pouvoir que l’Algérie ne lui appartient pas et qu’elle appartient au peuple ?”

Abderezzak Makri, président du MSP “Je suis abasourdi”

“Nous sommes étonnés de découvrir le nouveau langage du pouvoir qui, à travers la sortie de Sellal, nie ses propres échecs et fait désormais semblant de tendre la main aux autres pour redresser la situation désastreuse qu’il a lui-même provoquée. C’est étrange ! Je suis abasourdi d’entendre un tel discours des mêmes responsables de la crise. Comment se fait-il que les mêmes responsables, dont la gestion catastrophique des affaires a mené le pays à la dérive, veulent aujourd’hui se refaire une virginité et nous faire croire qu’ils sont encore capables de redresser la barre ? Au lieu de reconnaître leur échec et céder la place aux autres, ils feignent de tout ignorer et croient  qu’une sortie de crise est encore possible avec eux. La couleuvre qu’on veut faire avaler est trop grosse. Cela relève du mensonge, et c’est malheureux ! Pour analyser ce discours, les spécialistes des sciences politiques doivent déchirer leurs livres…”