Les délits de presse dépénalisés dans le projet de loi modifiant le code pénal

Les délits de presse dépénalisés dans le projet de loi modifiant le code pénal

Le projet de loi modifiant l’ordonnance 66-156 du 8 juin 1966, portant code pénal, a été enregistré lundi au bureau de l’Assemblée populaire nationale (APN), en vue de la dépénalisation des délits de presse à travers la modification des dispositions relatives aux outrages et violences à fonctionnaires et institutions de l’Etat.

Il s’agit en premier lieu, de l’abrogation de l’article 144 bis du code pénal qui punit les infractions d’outrage, injure ou diffamation commise par l’intermédiaire d’une publication quotidienne, hebdomadaire, mensuelle ou autre.

Cela concerne également la suppression des peines d’emprisonnement prévues par les articles 144 bis et 146 et le maintien de l’amende, en conformité avec la pratique en vigueur dans les pays démocratiques. Le maintien des peines d’amende vise à protéger les victimes des actes prévues aux dits articles, de tout abus de la part des médias et vise à garantir l’équilibre entre l’exercice de la liberté de presse et la protection des droits et libertés, énonce le projet

Les dispositions du projet ont aussi pour finalité de faciliter l’exercice par les médias de leur profession et méritent d’être renforcées par des codes de déontologie qui garantissent l’exercice objectif de cette noble profession. Le président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, avait annoncé, lors de son récent discours à la nation, que la nouvelle loi sur l’information complétera la législation actuelle, notamment à travers la dépénalisation du délit de presse.

La loi sur l’information « introduira les repères d’une charte déontologique et complètera la législation actuelle, notamment à travers la dépénalisation du délit de presse », avait-il déclaré.

Outre les nouvelles garanties juridiques sur la liberté de la presse que cette future loi consolidera, « nous travaillerons à une modernisation de l’espace médiatique national pour le porter au niveau de notre pluralisme démocratique et des ambitions de notre population, et pour conforter le professionnalisme et l’éthique », avait notamment souligné le chef de l’Etat lors du dernier Conseil des ministres début mai.

Il avait annoncé, dans ce cadre, qu’une commission indépendante d’experts nationaux dans le domaine des médias audiovisuels, de la communication et de l’information sera mise sur pied. Celle-ci aura pour mandat « de proposer les voies et les moyens d’améliorer le paysage audiovisuel, de promouvoir la communication par le biais des nouvelles technologies de l’information, et d’identifier les domaines à travers lesquels l’aide publique contribuera à l’épanouissement de la presse écrite », avait-il précisé.

De son côté, le ministre de la Communication, Nacer Mehal, a indiqué que la dépénalisation du délit de presse, constituait l’une des « aspirations » de la corporation auxquelles les pouvoirs publics vont s’employer à donner un contenu pratique.

Il avait insisté, à l’occasion, sur la nécessité d’accorder l’importance qu’il faut aux aspects relatifs à l’éthique et à la déontologie afin, avait-il souligné, de « préserver la profession et l’honneur des gens ». Même si elle est jugée « tardive », l’annonce d’une dépénalisation prochaine du délit de presse, avait été accueillie avec « optimisme » par des professionnels de la presse, des universitaires spécialisés dans les sciences de l’information et des spécialistes du droit.

L’abrogation éventuelle de l’article 144 bis du Code pénal « vient en réponse à une revendication de l’ensemble de la famille de la presse », a précisé le Pr Brahim Brahimi, directeur général de l’Ecole nationale supérieure du journalisme et des sciences de l’information (ENSJI). Pour le Pr Brahimi, la nouvelle « vient confirmer une réalité » que les hommes de la presse n’ont eu de cesse de dénoncer, à savoir la pénalisation du délit de presse qui constitue, estime-t-il, une restriction majeure à la liberté d’expression.

Les autorités du pays « ont mis du temps mais ont fini par répondre aux doléances des professionnels de la presse et celles des experts lesquels ont souvent attiré l’attention sur les dangers de l’article 144 bis », a-t-il dit. Pour sa part, l’universitaire Ahcène Djaballah, également enseignant à l’ENSJI, a souligné que même si l’intention du chef de l’Etat de dépénaliser le délit de presse « arrive avec du retard », il n’en demeure pas moins qu’elle sera « utile » pour l’avenir de cette profession en Algérie.

Pour le Pr Abdeslam Benzaoui, directeur adjoint à l’ENSJI, ces annonces « n’ont pas surpris ni déçu » les professionnels de la presse nationale, qui s’attendaient à ce genre d’ouverture. « La décision de dépénaliser le délit de presse est importante, dans la mesure où elle va remettre le train du pluralisme médiatique en marche », a-t-il expliqué.