Interpol a diffusé la liste de 173 jihadistes du groupe État islamique (EI) dont l’organisation internationale pense qu’ils pourraient chercher à rejoindre l’Europe pour y commettre des attentats, a révélé le Guardian le 21 juillet. Cette liste a été envoyée le 27 mai aux polices européennes.
Avec la défaite de l’EI à Mossoul, le siège de Raqa et les rumeurs sur la mort du chef autoproclamé du groupe, Abou Bakr al-Baghdadi, les services antiterroristes européens craignent que la déroute de Daech ne crée un mouvement vers l’Europe, où des jihadistes pourraient tenter de commettre des attentats-suicides, même de manière isolée.
Rien n’indique qu’un ou plusieurs jihadistes nommés sur la liste, dont le Guardian a obtenu une copie, ne soit déjà entré en Europe. Mais les terroristes « ont pu être entraînés pour réaliser et placer des engins explosifs pour faire des morts et des blessés, explique Interpol. Nous pensons qu’ils peuvent voyager à l’international, pour participer à des actions terroristes. »
Nom, photo, mosquée fréquentée
La liste a été établie par les services de renseignement américains sur la base des informations recueillies « via des sources sûres » lors de leurs interventions en zone irako-syrienne. « Les gens ont été identifiés à partir d’informations retrouvées dans les caches de l’EI », décrit une note envoyée aux services de renseignement italiens avec la liste.
Le document d’Interpol donne le nom de chaque jihadiste suspecté, la date de leur recrutement par l’EI, leur dernière adresse probable, la mosquée qu’ils fréquentaient sur leur zone de combat, le nom de leur mère et des photos.
L’organisation internationale, dont le siège se situe à Lyon, a par ailleurs demandé aux pays de son réseau de lui fournir toutes les informations (données personnelles, passages de frontières, casier judiciaire, données biométriques, numéro de passeport, activité sur les réseaux sociaux) dont ils disposeraient sur ces personnes.
Recouper les informations
Si les États-Unis semblent certains de leurs informations, les services de renseignement européens ont fait savoir qu’il leur était de plus en plus compliqué de vérifier l’identité des suspects, qui ont accès à beaucoup de faux documents et utilisent plusieurs identités.
L’intérêt de ce document, indique Interpol, est de pouvoir recouper les informations de chaque pays sur ses propres ressortissants avec celles retrouvées en zone irako-syrienne par les services américains.
D’après une étude de l’Université George Washington, de l’Ispi de Milan et de l’ICCT de La Haye, 73% des auteurs d’attentats en Europe et aux États-Unis étaient citoyens du pays où ils ont mené l’attaque. 14% résidaient légalement dans le pays ou étaient en visite légalement depuis des pays proches, 5% étaient des réfugiés ou des demandeurs d’asile, tandis que 6% étaient présents illégalement sur le territoire ou attendaient d’être expulsés.
En 2015, les Nations unies estimaient à 20.000 le nombre de jihadistes étrangers en Irak et en Syrie, indique le Guardian, dont 4000 venaient d’Europe.