Ghardaïa : l’heure des bilans

Ghardaïa : l’heure des bilans

4 ghardaia yahia_200_150.jpg Après l’arrivée des renforts pour sécuriser la ville et le calme relatif qui s’en est suivi, l’heure est, à présent, au bilan des pertes matérielles causées par les derniers affrontements intercommunautaires à Ghardaïa.

Alors que le gouvernement s’apprête à y dépêcher plusieurs ministres, le wali de Ghardaïa dresse le bilan des pertes matérielles. Selon l’APS, 706 locaux à caractère d’habitation et commercial ont été vandalisés, pillés avant d’être incendiés, lors des échauffourées récurrentes qu’a connues Ghardaïa depuis janvier dernier.

445 habitations et 261 locaux commerciaux, ainsi que 583 lots circonscris dans les communes de Daya-Ben-Dahoua, Ghardaïa et Bounoura ont subi un processus de dégradation avancé, à des degrés différents, lié aux évènements récurrents qu’a connus Ghardaïa depuis janvier dernier, a indiqué, à l’APS, Mahmoud Djemaâ.

Ces locaux affectés par les évènements ont été classés par une commission composée de spécialistes du contrôle technique de la construction (CTC), des agents des Directions de l’urbanisme et du logement, ainsi que ses élus et responsables de quartiers, pour déterminer leur degré de dégradation, avant d’entamer les opérations de restauration et de réhabilitation pour effacer les stigmates de ces sinistres événements, a-t-il expliqué.

Plus de 400 décisions de réhabilitation et de réfection de logements affectés par ces douloureux évènements ont été élaborées pour entamer l’opération de restauration et de réhabilitation, a-t-il fait savoir, précisant que les propriétaires des habitations partiellement dégradées et classées par les services du CTC recevront une aide financière pour la réhabilitation de leur logement.

Pour ce qui est des habitations les plus touchées, les pouvoirs publics, par le biais de la Direction du logement et des équipements publics (Dlep) et l’Agence du développement social (ADS), ont mis en place une série de mesures visant la prise en charge des habitations qui nécessitent un confortement de l’assise des murs d’enceinte, le renforcement des bases des murs par la maçonnerie de pierre, la reprise et la consolidation des points névralgiques et des effondrements de la maçonnerie en élévation des habitations, a souligné le chef de l’exécutif de Ghardaïa.

Ces premières mesures sont loin de cerner toutes les pertes matérielles subies par les victimes de cette flambée de violence.

En effet, sans compter les véhicules incendiés, les écoles et autres services obligés de rester fermés durant plusieurs semaines, c’est la détresse des familles contraintes de fuir leur domicile et des commerçants qui, au-delà des pertes matérielles et financières subies, se demandent si, un jour, ils pourraient reprendre leurs activités.

Pour un notable mozabite, il faudrait, au moins, trois ans pour que l’activité commerciale se ressaisisse à Ghardaïa. Prenant l’exemple du quartier populeux de Théniet El-Makhzen, où plusieurs magasins appartenant à des Mozabites ont été incendiés, il se demande : est-ce que l’État va mettre des gendarmes devant chaque magasin ? Est-ce que vous pensez que les commerçants chassés du quartier pourraient y retourner facilement ? “Non, en tout cas pas dans un futur immédiat”, a-t-il répondu.

Le déploiement du dispositif sécuritaire est, certes, salutaire, dans la mesure où les affrontements ont cessé. Mais pour combien de temps ce dispositif sera-t-il dissuasif ? Car, un jour ou l’autre, il faudrait le lever, l’alléger.

Y aura-t-il reprise des affrontements comme ce fut le cas au début du mois ? Probablement, étant donné que le fond du problème reste entièrement posé et que le fossé entre les deux communautés ne cesse de se creuser.

Du côté des Chaâmbis, l’État pare au plus pressé et ne semble pas en mesure d’apporter les vraies réponses aux vraies questions. Ils réclament justice et demandent à ce que les commanditaires des attaques sont identifiés et jugés.

Alors que chaque communauté se renferme de plus en plus sur elle et renvoie la balle à l’autre partie, le dialogue entre les représentants des deux communautés semble impossible pour l’instant, à moins que des intermédiaires crédibles réussissent à leur faire entendre raison. Encore faut-il que ces représentants jouissent d’une certaine influence sur le cours des évènements. Car, ce qui se passe à Ghardaïa, en particulier, et dans le Sud en général, est une remise en cause, pure et dure, des représentations locales traditionnelles.