Essais nucléaires français dans le sahara : Une lueur pour les victimes algériennes

Essais nucléaires français dans le sahara : Une lueur pour les victimes algériennes

Vingt-cinq militaires français irradiés lors de ces essais nucléaires ont obtenu vendredi dernier le droit d’être indemnisés.

A moins de deux mois de la commémoration du 58ème anniversaire de l’explosion du 13 février 1960, dans le cadre de l’opération «Gerboise bleue», où la France avait organisé à Reggane le plus dangereux essai nucléaire, le dossier revient en surface. La raison? 25 militaires français irradiés lors de ces essais nucléaires ont obtenu vendredi dernier auprès de la cour administrative d’appel de Nantes le droit d’être indemnisés. «Certaines victimes réclament plus de 550.000 euros», rapporte le quotidien français, Ouest France, soulignant que «dans 15 cas, les juges nantais ont confirmé les jugements rendus par le tribunal administratif de Rennes, contre lesquels le ministère de la Défense avait interjeté appel». Dans 10 autres cas, la cour a annulé les décisions de première instance des tribunaux de Nantes, Rennes ou Caen et enjoint l’État d’indemniser les victimes. «Pour toutes les demandes, on a une obligation de l’État d’indemniser des préjudices résultant des cancers dont les vétérans sont atteints», s’est réjouie l’avocate des soldats français, Cécile Labrunie, tout en déplorant un «contentieux long et pesant» pour les victimes et leurs familles. Si le contentieux est long pour les victimes françaises, il l’est d’avantage pour les victimes algériennes qui se meurent dans le déni et le silence total. Pourtant, des centaines de dossiers ont été déposés au niveau de la commission en charge de l’indemnisation des victimes, mais les autorités françaises semblent traîner le pas. Malgré la loi Morin de 2010 sur l’indemnisation des victimes irradiées, la quasi-totalité des dossiers a été rejetée au motif que le risque attribuable aux essais nucléaires dans la survenue de maladies était «négligeable», une notion qui a depuis été supprimée par le Parlement. Contrairement aux associations françaises très actives, en Algérie, la société civile n’arrive pas à s’organiser et à faire pression pour arracher cette indemnisation. Certaines bonnes volontés prennent des initiatives, mais restent éparses, sans lendemain. Le dossier exige une action solidaire et concertée surtout que la France a non seulement reconnu avoir mené des essais nucléaires et chimiques, mais va verser des compensations aux personnes touchées. La voie donc est ouverte aux associations algériennes qui se battent depuis des années sur ce dossier. Encore que la question est-elle seulement une affaire d’indemnisation des victimes irradiées? Pour certaines associations, il s’agit de mettre la France devant le fait accompli et pour qu’elle assume ses responsabilités. Plus encore, elle doit ouvrir les archives de l’explosion nucléaire qui sont en sa possession. En janvier dernier alors qu’il était en déplacement en France, le ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni, a rappelé qu’il était «grand temps» que l’Algérie et la France se penchent sur les dossiers en suspens, à savoir ceux des disparus, des archives et des essais nucléaires.

Entre 1960 et 1996, 210 essais nucléaires ont été menés au Sahara et en Polynésie, impliquant quelque 150.000 personnes. Les experts avancent que la première bombe testée en Algérie était trois fois plus puissante que celle d’Hiroshima.

Initialement estimée à 13 kilotonnes, la puissance de cette explosion effectuée à Hammoudia, à 50 km de Reggane, a atteint 60 ou 70 kilotonnes, soit trois fois celle de la bombe d’Hiroshima. Elle a entraîné la projection de radiations dans une zone de 200 km de large et de 100 km de long, alors que les habitations les plus proches se trouvaient à seulement 70 km. Trois autres essais intitulés «Gerboise blanche», «rouge» et «verte» se sont déroulés dans le Sud-Ouest de l’Algérie en avril 1960. Après l’indépendance en 1962, 13 essais souterrains ont eu lieu dans les montagnes d’In Ecker jusqu’en 1966.

Brahim TAKHEROUBT