Emploi: Les chiffres fantaisistes de l’Exécutif

Emploi: Les chiffres fantaisistes de l’Exécutif

Très attendue, la déclaration de politique générale du gouvernement, mettant sous les feux de la rampe le bilan d’une année de l’Exécutif, fait face à une avalanche de critiques aussi bien pour ses statistiques fantaisistes que pour le contenu électoraliste qui la caractérise. À l’heure du bilan, dont les indicateurs ne sont guère encourageants, le gouvernement choisit de tourner la page de 2018 et de remonter le temps pour faire l’apologie des vingt ans de Bouteflika.

Les multiples cris d’alarme lancés tantôt par les économistes, tantôt par le FMI et la Banque mondiale sur une économie qui menace ruine n’auront rien changé ; l’Exécutif est décidé à présenter une copie truffée de “réussites”, mais dont l’impact sur l’économie est quasi nul. Alors que l’inquiétude monte sur la hausse du chômage (11,7% à septembre 2018, contre 11,1% à avril de la même année), le gouvernement dit avoir créé 1,7 million d’emplois entre 2017 et 2018. La hausse du chômage, qui affecte essentiellement les catégories jeunes (16-25 ans), avec, au tableau, un taux qui flirte dangereusement avec les 30%, n’est point un problème lorsqu’on voit la facilité avec laquelle le gouvernement crée des emplois.

Les statistiques officielles en matière de création d’emplois sont, néanmoins, très discutables lorsque l’on sait que le taux de chômage n’a que très peu baissé entre 2017 et 2018. Le taux de chômage en Algérie avait atteint 12,3% en avril 2017 contre 10,5% en septembre 2016. Cette hausse de 1,8% correspond à une population de 160 000 personnes en quête d’emploi, puisqu’en avril 2017, le nombre de la population active a atteint 12,277 millions de personnes contre 12,117 millions en septembre 2016. Le taux de chômage a, en revanche, baissé à 11,1% en avril 2018 contre 11,7% en septembre 2017, soit une baisse de 0,6 point entre les deux périodes, correspondant à 128 000 postes d’emplois créés.

Le taux de chômage a néanmoins rebondi à 11,7% à septembre 2018, effaçant ainsi les 128 000 emplois créés entre avril et septembre de la même année. Cette arithmétique fait ressortir un nombre de 160 000 emplois détruits entre avril 2017 et septembre 2018, un chiffre qui contraste immensément avec le 1,7 million d’emplois que revendique le gouvernement dans sa déclaration de politique générale, faisant fi des chiffres que publiaient ses organismes statistiques. L’autre statistique de l’ONS, qui détruit l’argumentaire du gouvernement en faveur du plein-emploi, est liée à la croissance de l’économie qui était d’à peine 1,3% au 1er trimestre de 2018, de 0,7% au second trimestre et de 0,8% au troisième trimestre de la même année.

Elle était d’à peine 2,2% en 2017, selon les statistiques officielles, et de 1,7%, selon les estimations de la Banque mondiale. Quoi qu’il en soit, de tels niveaux de croissance sont insuffisants pour insuffler cette forte dynamique en faveur de l’emploi qui se serait soldée par la création de 1,7 million d’emplois sur la période 2017-2018. Le retour à l’austérité, qui a caractérisé le budget d’équipement de 2018, alors que le budget salaires n’a pas bougé d’un iota, et les embauches dans la Fonction publique presque gelées…, sont autant de mauvais indicateurs qui, non seulement ne favorisent pas l’embauche, mais sont aussi en mesure de détruire des milliers d’emplois dans leur sillage.

Du reste, le défi du chômage, qui ravage particulièrement les jeunes catégories, se poserait avec acuité dans les années à venir, car les arbitrages budgétaires seront aussi complexes que sensibles et l’Exécutif n’aura de choix que de remettre sur les rails le train des réformes.

Ali Titouche