Des enseignants toujours payés en Algérie alors qu’ils exercent en Arabie Saoudite! Scandale à l’ENS-Kouba

Des enseignants toujours payés en Algérie alors qu’ils exercent en Arabie Saoudite! Scandale à l’ENS-Kouba

“Cette fuite de docteurs dotés d’expérience est organisée par l’administration même de l’ENS au profit des pays du Golfe, attractifs par leurs salaires élevés en dollars américains”, dénonce le professeur.

C’est un scandale qui ne manquera pas, sans doute, de faire jaser dans les chaumières.

À l’École normale supérieure (ENS) de Kouba, depuis quelques années, des enseignants, des professeurs de rang magistral des disciplines mathématiques et physique sont “envoyés” en Arabie saoudite grâce au “concours” de l’administration en continuant parallèlement à percevoir leur salaire en Algérie et sont “automatiquement” réintégrés dès leur retour quand ils ne sont pas carrément “promus”. Ce scandale, c’est un

éminent professeur, dont la réputation dépasse les frontières, connu dans le milieu universitaire pour avoir publié plusieurs ouvrages mathématiques traduits dans plusieurs pays et respecté même par les plus hautes autorités du pays, qui vient de le faire éclater.

Dans un rapport-requête adressé au Premier ministre Abdelmalek Sellal, remis également au ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, dont nous détenons une copie, ce professeur soutient que “l’ENS a institué progressivement depuis 14 ans une désertion multiple et alternée de la majorité de son corps professoral de rang magistral des disciplines mathématiques et physique”. “Cette fuite de docteurs dotés d’expérience est organisée par l’administration même de l’ENS au profit des pays du Golfe attractifs par leurs salaires élevés en dollars américains”, écrit-il. “Pour ce faire, la direction délivre des mises en disponibilité renouvelées autorisant jusqu’à 10 ans d’absence, en utilisant parfois des mises en disponibilité-maison internes, couvertes par un directeur en poste depuis 2000, qu’on peut qualifier de complaisance-complice”, accuse le professeur.

Originaire d’Oued Souf, le directeur jouirait, comme il l’aurait clamé, du soutien d’un membre très influent au sein du FLN et originaire de la même région que lui. Amar Saâdani ? Possible. En guise de bonne foi de ses affirmations, cet éminent professeur lance un défi à l’ENS “d’inviter, par exemple, M. Djabali, le directeur de la postgraduation, parti depuis des années en Arabie saoudite, à se présenter pour prouver son existence physique dans l’établissement”. “Ce qui paraît impossible connaissant la rigueur humiliante de ce pays qui confisque les passeports des enseignants embauchés dès leur entrée pendant toute la durée des séjours professionnels accordés”, dit-il.

Non seulement après vérification auprès de l’inspection de la Fonction publique qu’“ils ne sont pas signalés”, mais ils sont réintégrés dès leur retour et “les années comptabilisées dans l’avancement professionnel de la carrière”. “La réintégration de l’ENS est automatique dès le retour. Plus encore, cette désertion, officiellement admise par l’établissement public, a, comme bonus tacite, la comptabilisation des années d’absence au Golfe dans l’avancement professionnel des carrières d’enseignants, illégalement absents du territoire national pour exercice dans un pays tiers où se déroule une part importante de la durée légale de carrière”, dénonce ce professeur qui évoque le cas d’un enseignant répondant au nom de Balayat, parti comme maître de conférence et promu, après sept ans passés au Golfe, au rang de professeur.

“Les procédures administratives ‘masquées’ sont légalisées par le directeur qui procède, si une désapprobation se manifeste, au ‘vote interne à main levée’ du conseil de l’école, en général aligné par intérêt sur les propositions de la direction.”

Recrutés principalement en Arabie saoudite, via un site internet, ces enseignants, dont une liste partielle est citée dans le document, créent un “vide” qui impacte le fonctionnement. “(…) Il y a eu des déperditions, inévitables, par des non-retours d’étudiants boursiers. Mais des déperditions de professeurs pour la moitié de la carrière sous l’initiative discrétionnaire de leur établissement sont une dérive inquiétante par l’embauche via internet devenue à l’ENS un fléau contagieux. Son flux crée nécessairement un vide dont l’impact sur le fonctionnement est déjà visible dans l’encadrement des recherches de thèses et mémoires du ressort de professeurs”, observe notre source, qui soutient que “cette désertion serait qualifiée ailleurs d’abandons de postes, suivie de radiations et de recrutements de remplacement”. Il invite, en conclusion, les “autorités compétentes à intervenir pour stopper cette hémorragie des compétences punie par la loi”.

Reste que son “invitation” adressée au Premier ministère depuis décembre dernier n’a pas connu de rebondissements, pour l’heure, en raison visiblement “d’un blocage” sur “instigation d’un responsable au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique” qui a fait… l’ENS, selon une source proche de ce professeur émérite. D’après un enseignant, les services de sécurité ont été avisés et une enquête est en cours. Nous n’avons pas pu joindre le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique.