Daski : Une saga familiale

Daski : Une saga familiale

Allaoua Daksi, jeune appelé en attente dans une caserne de la banlieue parisienne, découvre Paris, cherche le contact avec l’organisation – du FLN – et se retrouve, à sa grande surprise, face à son aîné Mohamed Tahar qui lui assigne pour mission la mobilisation des soldats algériens et la récupération d’armes si nécessaires au combat.

Il se trouve contraint à la désertion pour éviter l’envoi sur le terrain en Algérie et entame un long parcours de clandestin qui s’achèvera, début septembre 1960, devant le tribunal militaire du Cherche-Midi. Aux côtés de coinculpés prestigieux du réseau Jeanson il retrouvera aussi Youssef Haddad, dit Hamada, responsable de la Fédération de France du FLN et comme lui, fils de l’historique Souiqa constantinoise. «C’est en toute connaissance de cause et conscient de mon devoir que j’ai participé à la lutte libératrice. En conséquence, je revendique toutes mes responsabilités», déclare-t-il alors au président du tribunal. Si Allaoua Daksi décline, avec retenue, son itinéraire personnel, c’est en vérité une véritable saga qu’il reconstruit, celle d’une vieille famille, aux racines citadines profondément ancrées dans le coeur de Souiqa et dans le patrimoine confrérique – celui de la Rahmania- et musical de la médina. Cheikh Mahmoud, le père, aura été, entre autres, le passeur inspiré de Mohamed Larbi Zerouala qui s’imposera comme l’un des pionniers du chaâbi à Constantine. A l’ombre de l’engagement de ses aînés, Allaoua est ainsi un précoce diffuseur de la presse du MTLD et le chemin du juste combat balisé, notamment par Abdessalem – dont une grande cité de la ville porte aujourd’hui le nom- monté au maquis et tombé au champ d’honneur sur les monts de Beni Oulbane. Ne nous y trompons pas toutefois, ce n’est pas un récit héroïque que livre Alloua Daksi même si la lutte de libération a occupé une grande place dans l’histoire de la famille qui sait trouver des accents simples et émouvants pour évoquer la grande maison, la mère ou encore l’épouse défunte. Et on y trouve des éclairages inédits, comme le récit de l’échange entre son frère Abdelkrim et Raymond Leyris au lendemain de l’attaque de la médina, en mai 1956, au deuxième jour de l’Aïd Esseghir, par des milices juives armées par le Mossad et soutenues par les unités territoriales. Revenant sur les premières journées de l’indépendance à Constantine, Allaoua Daksi rapporte, notamment la brutale séquence de l’attaque de la ville par les hommes du commandant Larbi El Mili officier dissident de la Wilaya 2 historique ayant fait allégeance à l’état-major général du colonel Boumediene. «Le peuple céda la rue aux bruits de bottes. Le temps de la danse du peuple était fini. Place à la danse du roi du moment», note-t-il.

Allaoua Daksi restera finalement peu de temps dans sa ville natale et c’est dans la capitale qu’il se mettra au service des institutions de l’Etat pour un parcours relativement atypique de grand commis qui le conduira dès lors de la présidence aux improbables aventures du handball algérien. «Il n’est pas banal – note dans sa préface Aziz Derouaz, ancien sélectionneur national de l’équipe de handball, ancien ministre de la Jeunesse et des Sports – dans le parcours d’une vie passionnée et passionnante, de ressentir à quel point l’impact des valeurs morales peut rejaillir sur des domaines d’action différents comme la lutte pour l’indépendance d’une part et le sport d’autre part.»

De la présidence de la Fédération algérienne des sports collectifs à la direction du Pari sportif algérien, Allaoua Daksi aura ainsi nourri une inépuisable passion algérienne qu’il rapporte avec autant de précision que d’humilité. Le lecteur sera aussi sensible à l’expression émouvante -rare par ailleurs – et pleine de pudeur de l’attachement de l’auteur à sa défunte épouse. Relevons enfin le titre de l’ouvrage: Daksi sans autre précision comme si Allaoua s’acquittait d’une pénultième obligation familiale.

DAKSI – de Alloua Daksi Editions Scolie Alger-2017