Les premières images du crash de l’avion ukrainien à Tamanrasset laissent voir les trois quarts de l’appareil totalement calcinés. Ce sont des images que la télévision nationale a passées samedi, juste quelques heures après l’accident qui a coûté la vie à sept personnes, toutes membres de l’équipage.
A première vue, les débris de l’appareil, qui jonchaient le sol où il s’était écrasé, étaient noircis par ce qui s’apparenterait à un incendie. Par contre, les corps que les membres de la Protection civile portaient sur des civières semblaient intacts. Ils auraient pu eux aussi être consumés par le feu. L’on nous explique cependant que les membres de l’équipage étaient au niveau du cockpit ou pas très loin.
Le milieu et l’arrière de l’appareil ont été totalement émiettés. Il est clair que c’est trop tôt pour connaître les véritables causes de cet autre crash qui s’ajoute à une liste devenue pesante, en raison d’autres survenus sur une période très courte. Mais les observateurs tentent de faire le plus de recoupements possibles entre les premières images de l’avion détruit et toutes les éventualités qui auraient causé son accident. Les spécialistes reconnaissent en premier que l’aérodrome de Tamanrasset est difficile d’accès, que ce soit au décollage ou à l’atterrissage.
«Dès la fin de la piste qui n’est forcément pas suffisamment longue, il y a cette chaîne de montagnes qui fait tout de suite face au pilote et qui, en évidence, l’empêche d’avoir la visibilité nécessaire pour pouvoir prendre son entrain », expliquent-ils. Mais l’on sait que ce n’est pas la première fois qu’un avion atterrit ou décolle à partir de cette piste sans pour autant se crasher.
Grands nombre d’Algériens connaissent bien cet aérodrome pour y être passés par avion sans vivre un tel cauchemar. Autre élément, l’accident survenu samedi dernier ne concerne ni un avion appartenant à la compagnie nationale Air Algérie ni un autre qu’elle aurait affrété pour les besoins de ses vols supplémentaires comme elle a l’habitude de le faire. Ses détracteurs lui ont attribué ces jours-ci, du moins depuis les derniers accidents, de la mauvaise gestion, à la mauvaise qualité de ses appareils, jusqu’à la mauvaise foi ou le laisser-aller. C’est dire que tous les raccourcis sont permis pour défaire une institution qui doit pourtant et nécessairement survivre aux hommes.
L’UKRAINE, UN PAYS AU COEUR D’UN AFFRONTEMENT «BIPOLAIRE»
Aujourd’hui, c’est un avion étranger qui s’est écrasé sur les territoires algériens où se passent beaucoup de choses, notamment en matière de sécurité civile et militaire. L’appareil appartenait à une compagnie ukrainienne et était piloté par des Ukrainiens. Selon les déclarations officielles, il transportait des équipements pour le pétrole.
Des voix susurrent d’ores et déjà que les sept membres étaient des agents du renseignement… L’Ukraine, qui est au coeur d’une crise pratiquement mondiale puisqu’elle confronte deux pôles ennemis, les Etats-Unis et ses alliés, les pays membres de l’Union européenne, d’un côté avec en face la Russie de Poutine. Le conflit n’est pas simple. Il rappelle grotesquement les affrontements sournois de ces mêmes puissances en des temps durs et de mauvais présages, c’està- dire en temps de guerre froide. L’Ukraine est aujourd’hui le centre d’un affrontement mondial où se croisent de grands intérêts, y compris ceux qui ne sont pas européens, entre autres asiatiques et moyen-orientaux. Même l’Afrique est mêlée d’une manière indirecte puisque tous ses Etats sont inféodés, soit à l’un, soit à l’autre pôle et parfois ils tanguent même entre les deux pour ne pas subir leurs foudres.
L’on rappelle que dans ces mêmes colonnes, il a été rapporté que lors de sa visite à Alger le 3 avril dernier, le secrétaire d’Etat américain avait, selon des sources crédibles, fait une drôle de demande au président de la république. John Kerry aurait «proposé» à Bouteflika de «soutenir l’Ukraine dans sa crise avec la Russie».
En clair, Washington veut qu’Alger boude Moscou alors que c’est son partenaire historique de premier plan et ceci «dans ses peines et dans ses joies». C’est son premier fournisseur d’armements même si l’Algérie se targue aujourd’hui de tenir à diversifier ses clients «pour ne vivre à la merci d’aucuns d’eux». La réponse du chef de l’Etat aurait été, selon nos sources, «nettoyez d’abord ce que vous avez fait en Libye».
EN ATTENDANT LA LECTURE DES SECRETS DE LA BOÎTE NOIRE
Du coup, l’on parle de missiles, que ce soit ceux achetés et réceptionnés par l’Algérie ou tous ceux qui ont été ramenés par les puissances étrangères sur le sol africain, du Mali, du Niger, de la Libye, la Tunisie ou alors bien d’autres contrées du voisinage et plus loin encore.
Ce qui aurait détruit l’appareil ukrainien pourrait être l’un de ces engins de la mort… ? Trop tôt pour le savoir. En plus, les Français en faction dans le Mali et les Américains dont les agents du renseignement pullulent dans ces régions, travaillent avec des équipements de nouvelle génération qui détecteraient les sautillements d’une fourmi. Un avion ukrainien qui s’écrase dans un sud algérien convoité à plus d’un titre par des puissances avides d’hégémonisme laisserait l’imagination voguer jusqu’au délire… Mercredi dernier, le commandant des forces américaines en Afrique (Africom) était à Alger juste pour quelques heures.
Le général David Rodriguez était venu pour «rappeler» aux autorités algériennes que les frontières du pays qu’elles commandent sont «poreuses». C’est-à-dire perméables à même de constituer ces passages aux fléaux qu’ils veulent «combattre». Tamanrasset et ses immenses espaces sont certainement inclus dans «ces longues frontières poreuses » parce que non loin de pays en totale déflagration. Le général a répété aux responsables algériens que Washington compte sur eux pour lui être et rester «ce partenaire important avec lequel il doit coordonner le travail et lutter contre le terrorisme et l’extrémisme ».
C’est là où il renvoie la question au chef de l’Etat. Il lui demande de s’ingérer dans les affaires internes de ces Etats et de «nettoyer» leurs territoires de toutes les menaces sécuritaires. La première action que les autorités algériennes devraient mener d’urgence est de fermer l’aéroport de Tamanrasset et faire en sorte de le déplacer dans une zone où il n’y a pas de montagnes qui cacheraient les horizons aux pilotes… C’est un des argumentaires que l’Algérie doit casser en tout premier lieu pour ne pas vivre des crashs d’avions aussi douloureux. Ceci, même si la lecture des secrets de la boîte noire donnerait d’autres explications à l’accident de l’avion ukrainien.
Ghania Oukazi