Brésil : au moins 60 morts lors d’une mutinerie dans une prison de Manaus

Brésil : au moins 60 morts lors d’une mutinerie dans une prison de Manaus

Douze gardiens de l’établissement et soixante-quatorze détenus ont été pris en otage, d’autres décapités.

Une mutinerie dans une prison de Manaus, dans le nord du Brésil, a fait au moins soixante morts dans la nuit de dimanche 1er à lundi 2 janvier, selon le secrétaire à l’administration pénitentiaire de l’Etat d’Amazonie, Pedro Florencio.

Ce bain de sang, provoqué par la guerre entre factions criminelles, est le « plus grand massacre commis dans une prison en Amazonie », a dit Sergio Fontes, secrétaire à la sécurité publique de l’Etat d’Amazonie, lors d’une conférence de presse, précisant qu’« un grand nombre de détenus ont été décapités ».

La mutinerie, pendant laquelle douze surveillants et soixante-quatorze détenus ont été pris en otage, a duré dix-sept heures entre dimanche après-midi et lundi matin dans le complexe pénitentiaire Anisio Jobim (Compaj), situé en périphérie de Manaus. Certains prisonniers ont été assassinés. Les agents pénitentiaires n’ont repris le contrôle de l’établissement que lundi matin.

De nombreux membres de familles de prisonniers se sont massés devant la prison dès lundi matin, mais les autorités n’ont toujours pas révélé l’identité des victimes. Des photos circulant sur les réseaux sociaux et prises soit par des détenus soit par des policiers après le massacre montrent des scènes insoutenables de carnage. On y voit des dizaines de corps empilés, la plupart sans tête, ce qui, selon les autorités, rend plus difficile l’identification des morts.

Surpopulation carcérale

Ces violences sont liées à la rivalité entre détenus appartenant à deux bandes, le Primeiro Comando da Capital (PPC), organisation criminelle de Sao Paulo, et un groupe de Manaus, Família do Norte (FDN). « La FDN a massacré les membres présumés du PCC et d’autres rivaux », a ainsi assuré M. Fontes à la radio locale Tiradentes.

A Manaus, les règlements de comptes entre narcotrafiquants incarcérés ont pris une ampleur sans précédent depuis le massacre de Carandiru, qui fit cent onze morts en 1992, à Sao Paulo. « Nous vivons une guerre silencieuse du trafic de drogue, et l’Etat se doit d’intervenir. Les factions se battent entre elles pour gagner plus d’argent, c’est une lutte de territoire », a alerté M. Fontes.

« Pendant les négociations, les prisonniers n’ont pratiquement rien exigé, juste qu’il n’y ait pas d’excès quand la police entrerait, a-t-il ajouté. Nous croyons qu’ils avaient fait ce qu’ils voulaient : tuer ces membres de l’organisation rivale et obtenir la garantie qu’ils ne seraient pas agressés par la police. »

Les émeutes sont fréquentes dans les prisons du Brésil, où la surpopulation carcérale est régulièrement dénoncée par des organisations de défense des droits humains. Avec 622 000 détenus recensés par le ministère de la justice à la fin de 2014, le Brésil représente la quatrième population carcérale au monde, derrière les Etats-Unis, la Chine et la Russie.

Au niveau national, le taux d’occupation est de 167 %, soit 1,67 détenu par place disponible, un chiffre qui s’élève à 2,59 en Amazonie, qui comptait 8 868 détenus en 2014. En octobre, une mutinerie avait déjà fait trente-trois morts dans deux prisons de la région amazonienne, dans les Etats de Rondonia, frontalier de la Bolivie, et de Roraima, limitrophe du Venezuela.