Batna «Aqbayli syun yetlagha, achawi syay as yu3a»

Batna «Aqbayli syun yetlagha, achawi syay as yu3a»

Un grand rassemblement est prévu ce matin à 10 heures au centre de Batna pour la commémoration du Printemps amazigh du 20 Avril 1980. Cette manifestation, qui verra la participation d’anciens et de nouveaux militants de la cause amazighe, est organisée à l’initiative du Mouvement culturel amazigh (MCA) et de la Ligue aurésienne de la culture.

Deux collectifs créés au début des années 1990 et qui sont très présents dans le champ de la revendication berbère dans notre pays et, en particulier, à Batna et les wilayas limitrophes, où l’on parle couramment le chaoui.

Les organisateurs de ces commémorations nous signalent également la tenue aujourd’hui de plusieurs manifestations dans la commune d’Aïn N’mer, dans la daïra de Merouna, qui se poursuivront jusque tard dans la soirée avec un gala aux alentours de 21 heures, une séquence musicale qui devrait clore un marathon de discussions et d’échanges sur l’amazighité en 2017 et les perspectives qui sont siennes, une année après la constitutionnalisation de tamazight en tant que langue nationale et officielle de l’Algérie.

En dépit du riche programme prévu aujourd’hui, les animateurs du MCA et de la Ligue aurésienne de la culture ne cachent pas leur «frustration» à l’idée que «toutes les salles qu’ils prévoyaient d’utiliser pour fêter le 20 Avril avaient été réservées pour la campagne des législatives du 4 mai prochain ».

Il n’en demeure pas moins, et pour reprendre l’expression d’un militant, les Aurès étaient hier au rendez-vous du 20 Avril et ils le restent aujourd’hui.

Flash-back : Aqbayli syun yetlagha, achawi syay as yu3a (le kabyle lance un appel et le chaoui lui avait répondu), c’est par ce passage de la chanson Ekker Ekker de Dihya, rappelle-t-on, qu’au mois d’avril 1995 les militants du Mouvement culturel amazigh, à travers le Grand-Aurès, se sont mobilisés pour organiser la première grande marche et célébrer le printemps berbère, comme pour donner un nouveau souffle à la revendication identitaire et démocratique. Si pour la première fois les médias, et surtout la presse écrite, avaient rapporté et couvert ce grand événement, il y a vingt-deux ans déjà, la marche du 20 Avril 1995 n’était pas la première à se dérouler à Batna pour l’affirmation de l’identité amazighe du pays aurésien.

Elle demeure très forte dans l’arrière-pays véhiculée par la langue maternelle, le chaoui, qu’on parle presque exclusivement dans les zones rurales. La marche de 1995, indiquent les observateurs, était l’aboutissement et la relance en même temps du travail militant effectué par des universitaires, enseignants et étudiants, regroupés au sein du Mouvement culturel amazigh qui se sont distingués par un travail de fourmi en donnant des cours de chaoui, sur l’histoire et la culture berbères, en initiant leur public au tifinagh et en assurant des cours d’histoire dans les wilayas de Batna, Biskra, Oum El Bouaghi, Kenchela et Tébessa, où résident la plupart d’entre eux.

Izenzaren Numidia, Les amis de l’art et de la culture, l’association Balloul font également partie des associations qui ont labouré à nouveau le champ de l’amazighité au contact des habitants de M’chouneche, Merouana, Arris, Thagouth, Ras el Ayoun, Chemora et plein d’autres petites localités et pour élargir ce champ qui voit arriver aujourd’hui une nouvelle génération de militants et des préoccupations nouvelles.

Jugurtha, étudiant au département de langue et culture amazigh, est formel : «Nous avons des choses à dire et nous le faisons à travers le net par l’intermédiaire des blogs. C’est une bonne chose, parce que des gens viennent comme ça et parlent en notre nom sans nous consulter.». « Çà et là, à travers les Aurès, des faiseurs et leaders d’opinion ont émergé grâce à leur travail sur les réseaux sociaux pour rendre visibles la région et sa culture et pour regarder vers le futur et ne plus se gargariser du passé, qui ne nourrit plus», nous dit Fouad, universitaire batnéen, qui cite Inumiden, un portail consacré uniquement à l’histoire, l’identité et la culture amazigh, mais aussi et surtout au développement du pays chaoui. Ce site aurait dépassé le million de visiteurs.