Obésité: plus de 50% des algériens de plus de 35 ans touchés

Obésité: plus de 50% des algériens de plus de 35 ans touchés

La lutte contre l’obésité et le surpoids constitue un problème de santé publique, ainsi qu’un enjeu social et économique pour l’Algérie. 

C’est ce qui ressort de la rencontre national sur la lutte contre l’obésité et le surpoids, organisée hier par le ministère la Santé. Dans son allocution, le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, Abdelmalek Boudiaf, a déclaré que «les maladies chroniques constituent l’un des principaux défis auxquels notre système de santé est confronté». M. Boudiaf a indiqué que «cette rencontre a été expressément demandée par le Premier ministre qui a justement estimé que l’obésité évitable devait être combattue de manière résolue et soutenue par l’ensemble des acteurs concernés». Et d’ajouter : «Pour faire face à cette situation, nous avons opté, comme préconisé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), pour la lutte intégrée contre les facteurs de risque qui a fait l’objet d’un plan national stratégique multisectoriel de lutte intégrée contre les facteurs de risque communs aux maladies non transmissibles pour la période 2015-2019. Ce plan constitue, depuis sa présentation en Conseil de gouvernement, le référentiel national, et sa substance a été reprise dans le projet de nouvelle loi sanitaire au titre des obligations de l’État dans le domaine de la lutte contre les facteurs de risque.» Selon le ministre, «le plan national stratégique a bénéficié de la mise en place d’un comité national multisectoriel composé de représentants de 14 départements ministériels, de 6 associations nationales et d’experts nationaux dans le domaine. Nous nous retrouvons aujourd’hui pour parler de la lutte contre l’obésité et le surpoids».

Il a précisé que «les acteurs concernés ne sont pas uniquement les acteurs institutionnels, car si l’État peut règlementer en matière de produits alimentaires, il ne peut pas règlementer le comportement alimentaire qui est, lui, tributaire des informations reçues, de l’éducation dispensée et de la disponibilité de produits sains, de bonne qualité et accessibles». Selon lui, l’atelier prévu en marge de cette rencontre devra sortir avec des recommandations pertinentes en matière de mise en place de normes alimentaires drastiques, pour réduire la teneur des aliments (y compris les boissons gazeuses) en sucre, en sel et en graisse, la promotion de modes de consommation favorisant une alimentation saine où le message donné par la communication, l’information et l’éducation s’appuie sur la disponibilité de produits sains et accessibles, et la promotion de l’activité physique et sportive chez toutes les franges de la population et dans tous les milieux.

Sensibilisation à une alimentation équilibrée

«Quand je dis recommandations pertinentes, je pense à tous les mécanismes qu’il faudra mettre en place pour favoriser l’émergence de comportements sains. Contrairement aux idées répandues, tout n’est pas dans la communication. Il ne suffit pas de faire passer quelques spots à la télévision ou quelques séances d’éducation à l’école sur une alimentation saine, pour croire que le problème est pris en charge,» a déclaré M. Boudiaf, avant d’ajouter : «Il faut un véritable plan national multisectoriel intégré, pour que l’éducation dès le plus jeune âge à une nutrition saine et la sensibilisation à une alimentation équilibrée soient adossées à la disponibilité de produits sains, conformes à des normes opposables et accessibles au plus grand nombre.» Pour le ministre, un tel plan permettrait de réduire l’exposition aux produits gras, sucrés et salés, et œuvrerait à réhabiliter les bases du régime alimentaire traditionnel de type méditerranéen fortement recommandé par les experts du monde entier. Cette réhabilitation passe aussi par la promotion de nouvelles habitudes alimentaires. Il faudra agir sur les parents, mais aussi sur les enfants et sur les collectivités (cantines d’établissements scolaires et universitaires, cantines d’entreprises… ), pour que l’alimentation saine et équilibrée devienne une habitude tangible. Selon lui, la lutte contre l’obésité ne repose pas uniquement sur la promotion d’une alimentation saine. Elle est aussi le fait de la promotion de l’éducation physique et sportive. Comme beaucoup de pays l’ont fait avant nous, nous devons arriver à faire du sport une affaire qui concerne toute la population où qu’elle se trouve. Dans le quartier de résidence, à l’école, à l’université, dans l’administration ou à l’usine, le sport doit retrouver sa place.

M. Boudiaf a estimé que «c’est déjà globalement le cas à l’école, mais ça ne suffit pas. Imaginons ce que cela donnerait si chaque commune offrait à ses résidents la possibilité de faire du sport, si chaque université faisait de même et si chaque usine avait sa salle ou son terrain de sport !»

Le rôle important du sport scolaire

Selon l’enquête «Tahina», réalisée par le ministère de la Santé en 2007, on compte un taux de  55,9% des personnes âgées de 35-70 ans atteintes de surpoids, alors que l’obésité globale est retrouvée chez 21,2% des personnes interrogées âgées entre 35 et 70 ans. La même enquête a relevé que la consommation alimentaire quotidienne ne respecte pas les recommandations internationales pour tous les groupes d’aliments, avec une faible consommation des fruits, des légumes et des laitages, et une forte consommation des produits gras et sucrés. Concernant les enfants, l’enquête «MIC’s 4», réalisée par le ministère de la Santé en 2013, avec le soutien de l’Office national des statistiques et de l’UNICEF, montre que la surcharge pondérale concerne 12% des enfants de moins de cinq ans et qu’elle est plus fréquente encore chez les enfants âgés de 12-23 mois (18%).  «En clair, si nous agissons sur l’environnement parallèlement à la sensibilisation de toute la population, en impliquant notamment le mouvement associatif, nous arriverons certainement à des résultats probants. Nous n’avons pas le choix. Nous devons le faire si nous voulons contrôler le diabète, l’hypertension et de nombreux cancers,» a conclu le ministre. De son coté, La ministre de l’Éducation nationale, Nouria Benghebrit, a insisté sur le rôle «important» du sport scolaire. Elle a estimé que «l’’éducation et le sport doivent marcher ensemble. Nos enfants ont besoin d’éducation physique, au même titre que des cours pédagogiques pour avoir une formation complète et équilibrée», a-t-elle précisé. Et d’ajouter «Le temps d’éducation sportive est insignifiant… Ce volume horaire inexistant au niveau primaire est passé de  45 minutes à une heure.» Elle n’a pas omis de souligner que cette discipline a besoin de personnel formé afin que nos enfants puissent y bénéficier. Pour ce qui est de moyens, la ministre s’est montrée très satisfaite : «Nous avons non seulement des terrains de sport, mais également des salles équipées.» Selon la ministre, il y a lieu d’encourager l’enfant pour le sport qui est une «responsabilité commune». Elle a appelé les parents à initier leurs enfants au sport et à pratiquer même cette activité au niveau familial.

«La formation doit être entamée à la base, c’est-à-dire au primaire. Nous allons rouvrir prochainement ce dossier avec le ministère de la Jeunesse et des Sports», s’est-elle engagée.

Renforcer la prévention.

Des décisions seront prises au niveau central pour instruire les directeurs des établissements scolaires d’adhérer à notre vision de l’éducation physique qui diffère du sport scolaire qui ne concerne pas plus de 3% des écoliers.  Le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, Mohamed El-Ghazi, a déclaré que «l’obésité est un lourd facteur de morbidité qui occasionne une lourde charge sur le système de sécurité sociale, et particulièrement à l’assurance maladie». M. El-Ghazi a expliqué que «le diabète, l’hypertension artérielle, les affections cardiovasculaires et les AVC mobilisent environ 90% de dépenses globales en médicaments, soit plus de 17 milliards de dinar». Il a indiqué qu’«il faut insister sur la prévention et la sensibilisation, pour une meilleure hygiène alimentaire et la culture d’activité sportive».

M. El-Ghazi a proposé la mise à contribution de la sphère industrielle pour une limitation de la production et la transformation des biens alimentaires et matières grasses. «Aussi établir une politique de communication et d’information, avec la contribution des médias et des professionnels du domaine. Renforcer la prévention qui reste le seul moyen de lutte contre l’obésité en impliquant la société civile. Il est nécessaire de mettre en place un comité de veille et de suivi autour de ce phénomène», a estimé le ministre.

Wassila Benhamed

*Titre modifié par Algérie360