Commerce extérieur : verrouillage extrême.

Commerce extérieur : verrouillage extrême.

L’Exécutif montre des signes de navigation à vue, notamment en matière de commerce extérieur où il ne semble pas avoir fini de tâtonner.

Le ministère du Commerce a annoncé, mercredi, l’élargissement du principe de la licence d’importation à l’ensemble des produits, excepté ceux essentiels. Une réintroduction du contrôle sur le commerce extérieur et un retour inattendu sur la libéralisation du milieu des années 90.

En 1995, alors que les caisses de l’État étaient vides, ou presque, le gouvernement de l’époque, en difficulté sur les plans politique et économique, avait tranché dans le vif, libéralisant de manière excessive le commerce extérieur. Le FMI, avec qui le pays avait négocié, au début des années 1990, le rééchelonnement de sa dette extérieur, s’en était réjoui. Au départ, l’objectif était d’instaurer le commerce industrialisant.

Qu’est-ce que cela implique pour l’économie ? L’Exécutif livrait alors des agréments à des entreprises, aussi bien privées que publiques, pour importer tout ce dont avait besoin le marché local. Sur le papier, l’approche se voulait pragmatique, en ce sens que ces sociétés ne devaient pas continuer indéfiniment à importer. Mais qu’elles étaient tenues d’entreprendre et de mettre en œuvre des activités industrielles. Dans les faits, et en dehors du secteur des médicaments où des unités de production ont pu voir le jour, peu de choses ont été réalisées sur le terrain de l’industrie.

Que de ratés ! Ce dont s’est rendu compte le gouvernement, c’est que la brèche ouverte dans le commerce a créé plus de problèmes qu’il n’en a résolus. Aujourd’hui, l’Exécutif, sur la brèche,  s’efforce de la colmater, en tenant deux fers au feu : il veut ainsi dégraisser la facture d’importation, en soumettant à l’autorisation de l’administration l’importation de tout produit, à l’exception de produits revêtant un caractère essentiel  pour les citoyens, et en invitant les entreprises à s’impliquer davantage dans le tissu industriel. Naturellement, cette stratégie et les arguments qui la sous-tendent sont tout à fait en ligne avec la diversification de l’économie nationale.

Il n’en reste pas moins qu’elle serait difficilement applicable, sans trop de dégât, a fortiori en ces temps de baisse de revenus du pays. Du reste, l’Exécutif semble se perdre en conjectures, n’arrivant pas encore à élaborer la palette de produits concernés par les licences d’importation pour l’exercice en cours.

À l’heure qu’il est, seuls les quotas d’importation de la banane ont été établis. Ce qui est sûr, c’est que le gouvernement, ayant décidé de n’importer pour l’année 2017, que pour 35 milliards de dollars, va donner un tour de vis supplémentaire aux importations.

Il est motivé en cela par les économies qu’il a faites sur certains postes d’importation, en 2016. L’année dernière, le pays a importé, par exemple, moins de véhicules. Et, du coup, la facture a sensiblement baissé, se chiffrant à 1,292 milliard de dollars, contre 2,038 milliards de dollars en 2015, soit une baisse de 36,61%.

Cependant, le côté négatif était que cela a créé des tensions sur le marché de l’automobile et que les citoyens désireux d’acquérir un véhicule doivent attendre six mois, voire plus pour être livrés. Et, il y a risque de voir cette tension s’étendre à d’autres circuits de la distribution, notamment dans les marchés de vente au détail et de la vente en gros de produits de consommation courante, produits agricoles en tête dont les prix se sont envolés, ces dernières années.

Sur le terrain du contrôle, les fonctionnaires de l’État, payés pour protéger les ménages, ne font pas grand-chose pour combattre la spéculation. Et, pendant ce temps, le ministre de l’Habitat, de l’Urbanisme et de la Ville et ministre du Commerce par intérim, Abdelmadjid Tebboune, multiplie les déclarations, restant vague sur beaucoup de questions.

Il préconise, par exemple, d’imposer des sanctions coercitives aux spéculateurs, mettant en avant l’importance de hâter la modernisation du secteur du commerce, la numérisation du registre du commerce, en premier chef, mais de nombreux experts n’y voient que  beaux discours et vœux pieux.