Face aux efforts de l’Algérie pour un règlement pacifique des conflits, Les seigneurs de la guerre aux abois

Face aux efforts de l’Algérie pour un règlement pacifique des conflits, Les seigneurs de la guerre aux abois

P150309-18.jpgLes démons de la guerre se réveillent

Au nom d’une nouvelle croisade contre un ennemi insaisissable, les Occidentaux donneront un nouveau souffle à la lutte contre le terrorisme.

Hier, tel un coup de tonnerre dans un ciel calme, une information vient foudroyer les espoirs d’une démarche sereine du règlement des crises que subit la partie Nord du continent africain. L’information est la suivante: le chef du groupe islamiste nigérian Boko Haram, Abubakar Shekau, a annoncé avoir fait «allégeance» au mouvement djihadiste Etat islamique (EI), dans un enregistrement audio diffusé avant-hier, samedi. Pourquoi cette annonce intervient-elle en ce moment précis? Que cache réellement cette alliance? Ces questionnements sont en effet dictés par une succession d’événements qui ont précédé et même jalonné cette annonce. Qu’on en juge.

Il y a quelques jours, les capitales occidentales ont salué le succès de la médiation algérienne suite au paraphe d’un accord de paix et de réconciliation entre le gouvernement malien et les mouvements politico-militaires du nord du Mali. «Le combat» diplomatique mené par l’Algérie, seule contre tous, pour le règlement de ce conflit par la voie politique au détriment d’une intervention militaire a fini par payer et donner ses premiers résultats. Mais voilà q’un attentat terroriste vient torpiller cette paix fragile.

Hier, trois personnes, un soldat de l’ONU et deux civils, ont été tuées dans le nord-est du Mali par des tirs de roquettes visant un camp de la Mission de l’ONU au Mali (Minusma) à Kidal. La semaine dernière, l’Algérie annonçait fièrement qu’un round d’un dialogue inter-libyen aura lieu à Alger. Une quinzaine de dirigeants politiques de premier plan, des chefs de partis et de grands militants connus sur la scène libyenne prendront part à la réunion d’Alger.

Curieusement, cette annonce coïncide avec l’allégeance de Boko Haram à Daesh. Et aussitôt après, les démons de la guerre se réveillent. Au lendemain de l’annonce de cette allégeance, les armées du Niger et du Tchad ont lancé hier, une offensive militaire «terrestre et aérienne» d’envergure contre Boko Haram dans le nord-est du Nigeria, zone frontalière avec le Niger. On s’attendait à cette succession d’événements, on les observait au ralenti, on comprend bien qu’en filigrane se déroule une lutte féroce entre deux tendances: une première qui aspire à un règlement pacifique des crises et une deuxième belliciste qui pousse au chaos. La guerre étant trop onéreuse pour les Occidentaux en ces temps de crise, ces derniers ont-ils d’autres choix que celui d’appuyer les initiatives de paix que mène l’Algérie? Cependant, avec l’allégeance de Boko Haram à Daesh toutes les cartes sécuritaires sont rebattues. Si jusque-là, les pays Occidentaux redoutaient Daesh en Irak et en Libye, leur crainte sera double maintenant que cette organisation criminelle s’offre un couloir continental allant de l’Atlantique à la Méditerranée traversant toute la bande sahélienne jusqu’en Afrique du Nord. Jamais une organisation terroriste n’a eu une pareille étendue et surtout un pareil changement de foyer de fixation.

Avec des combattants aux alentours de 80.000, il faut dire qu’il s’agit d’une véritable métastase. Qu’on ne s’y trompe pas donc. C’est à une relance de la «guerre contre le terrorisme» dont il s’agit. Désormais, au nom d’une nouvelle croisade contre un ennemi insaisissable, les pays occidentaux donneront un nouveau souffle à la lutte contre le terrorisme. Une lutte porteuse de germes d’une grande dangerosité et dont on connaît surtout les conséquences désastreuses. Si dans les officines occidentales les choses sont prêtes et claires, il faut des ingrédients probants pour justifier cette étape et l’alliance Boko Haram-Daesh vient donner tous les arguments aux actions militaires. Aux aguets, perchées sur la rive Nord de la Méditerranée, les forces de l’Otan ne vont pas s’encombrer d’action politique mais au moindre signe approbateur des Etats du Sud… ils passeront aux opérations militaires. Car il faut mettre la forme et dire à leurs opinions que l’action est bâtie sur un consensus régional.