Crédit immobilier à taux bonifié : L’offre de logements en deçà de la demande

Crédit immobilier à taux bonifié : L’offre de logements en deçà de la demande

deca.jpgLe crédit immobilier à taux de 1% et de 3% n’est pas encore lancé par toutes les banques publiques. Les clients commencent à déposer leur dossier au niveau des agences bancaires mais la mise en œuvre du dispositif n’est pas encore effective, a-t-on appris auprès de plusieurs banquiers rencontrés au niveau de leurs stands à la Foire internationale d’Alger qui prendra fin aujourd’hui au Palais des expositions des Pins maritimes.

es banquiers rencontrés exerçant notamment à la Banque extérieure d’Algérie (BEA), au Crédit populaire d’Algérie (CPA), à la Banque de développement local (BDL) et la Banque de l’agriculture et du développement rural (Badr) ont mis l’accent sur les limites du crédit à taux d’intérêt bonifié institué dans le cadre de la loi de finances 2010.

Tout en relevant l’importante affluence du public pour s’enquérir des modalités en vue de bénéficier du crédit, que ce soit à l’occasion de la FIA ou au niveau du réseau d’agences bancaires, plusieurs banquiers ont mis l’accent sur les contraintes que recèle le dispositif. «L’offre des banques est intéressante», mais ce sont les autres paramètres du marché qui constituent un frein à la réussite du dispositif.

Ils expliquent que les prix élevés des logements constituent encore l’obstacle essentiel au succès du nouveau système à travers lequel l’Etat envisage de satisfaire plus de demandeurs de logement, notamment les ménages n’ayant pas accès au logement social.

«Nous avons constaté, d’après les témoignages des personnes qui viennent nous consulter, que l’offre de logement est très limitée au niveau des grandes villes», attestent-ils, avouant qu’eux-mêmes seraient «incapables de postuler pour avoir un crédit au taux de 1% en raison du coût élevé des logements».

Les types de construction éligibles dans le cadre du dispositif sont les logements sociaux promotionnels (LSP) réalisés par l’Etat ou les logements réalisés par les promoteurs immobiliers. C’est la formule LSP qui serait la plus intéressante à promouvoir car les prix des logements réalisés par l’Etat ne dépassent pas les 3 millions DA, contrairement au logement promotionnel dont les prix sont pratiquement inaccessibles pour les salariés.

Adossé d’une aide de 700 000 DA octroyée par la Caisse nationale du logement (CNL), «le LSP pourra constituer la solution idoine à la crise du logement», pensent les spécialistes.

Un acte de propriété est indispensable

Par ailleurs, ils ont mis l’accent sur l’importance d’acquérir un logement qui ne souffre d’aucun problème d’ordre administratif. «Avant de se présenter à l’agence bancaire, le client devra trouver un logement au prix qui ne dépasse pas 1,2 million DA. Il devra présenter dans son dossier des documents comme l’acte de propriété et le permis de construire délivré au promoteur immobilier qui lui a vendu le logement», explique-t-on de même source.

Un banquier du CPA a même conseillé aux futurs acquéreurs de prendre le temps de vérifier l’existence d’un acte de propriété avant de s’engager dans l’acquisition d’une habitation. De toute façon, au niveau des banques, les dossiers qui ne sont pas munis de ces documents seront rejetés, car «c’est la seule garantie que nous pourrions avoir», affirment-ils.

Le plan d’aménagement du territoire devra définir les zones rurales des grandes villes

Devant l’engouement des demandeurs d’informations au sujet du dispositif, les banquiers ont pu relever certaines suggestions.

Certains ont proposé d’élargir certaines régions au rural afin de permettre aux gens de postuler au logement rural. Ce dernier permettra aux demandeurs de crédits de réaliser eux-mêmes leurs habitations avec la possibilité de réduire les coûts de construction.

Au niveau de la Badr, qui se spécialisera dans les crédits pour les logements ruraux, le dispositif n’est pas encore mis en œuvre, les représentants de cette banque avançant un délai d’un mois pour sa mise en œuvre. Même si le dispositif est finalisé, la banque a préféré l’étudier encore avant son lancement effectif.

Le coût du logement rural n’a pas encore été défini, expliquent-ils. Parmi les contraintes du monde agricole, l’absence de documents justifiant les revenus des postulants. La majorité des agriculteurs activent dans le secteur informel d’où la difficulté de répondre à leurs demandes pour le crédit bonifié à 1% et 3%. Comme mesure de facilitation, la Badr n’exigera pas d’acte de propriété aux postulants.

Selon eux, «il suffit de présenter un acte de possession en remplacement de l’acte de propriété pour ouvrir droit au crédit».Pour l’heure, les banquiers s’attellent à présenter le produit. Des efforts ont été consentis à l’occasion de la FIA pour mieux expliquer à la population l’intérêt du dispositif. La BEA, par exemple, a érigé un stand qu’elle a voulu attractif et moderne pour intéresser plus de clients.

Karima Sebai

Le taux préférentiel fixé à 6% par le Trésor public

Le taux préférentiel fixé par le Trésor dans le cadre de la mise en application de la nouvelle formule d’octroi par les banques de crédits exclusivement destinés au financement de l’immobilier est enfin connu.

Il est de l’ordre de 6%, nous confirme un des responsables de la direction générale de la Cnep, très présente en tant que banque publique dans le domaine du financement de l’immobilier.

Le taux de 6% matérialise, nous explique-t-on, «l’implication désormais opérationnelle du Trésor public dans la prise en charge de la différence existant entre, d’une part, les taux d’intérêt traditionnels pratiqués par les banques et, d’autre part, l’obligation faite à ces mêmes établissements financiers de n’exiger aux futurs bénéficiaires de crédits destinés à l’immobilier qu’un taux d’intérêt de 1 à 3% en vertu de la disposition juridique approuvée et contenue dans la loi de finances complémentaire de 2009».

De plus, ce qui ressort de plus important à travers une telle implication de l’institution du Trésor public qui procède d’entrée à la fixation du taux préférentiel, c’est que la problématique de la concurrence déloyale, que beaucoup de banquiers relevant du secteur public n’ont pas manqué de soulever, semble trouver sa pleine résolution.

En effet, le taux d’intérêt pratiqué par les établissements bancaires relevant du secteur privé est supérieur à ceux des banques publiques. Ce problème étant désormais solutionné par le biais d’une note du Trésor fixant le taux préférentiel à 6%, il n’en demeure pas moins que la mise en application de la bonification des crédits destinés à l’acquisition des logements se heurte à d’autres blocages freinant sa généralisation auprès des citoyens.

Contraintes et facteurs de blocage

Les blocages se caractérisent notamment par l’indisponibilité du parc immobilier et surtout la cherté de ce produit, notamment dans les milieux urbains, en particulier dans la ville d’Alger où les prix de l’immobilier sont exorbitants. Dans ce cadre, il faut rappeler les propos de M. Djebbar, président

de la Fédération des agences immobilières (Fnai), qui affirmait dans une déclaration récente au Temps d’Algérie que «le parc immobilier existant ne peut satisfaire que 10 à 15% des demandes d’acquisition de logement par le biais d’un crédit bancaire». Un autre facteur réduit l’engouement que devrait susciter auprès de la population la nouvelle formule d’octroi de crédits à intérêt bonifié : les critères d’éligibilité.

Ces derniers éliment de facto un bon nombre de salariés, dont les revenus mensuels ne peuvent leur permettre de bénéficier de ce nouveau procédé. A ce sujet, le responsable de la communication de la Cnep-banque explique que la cherté du produit immobilier influe négativement sur les capacités de remboursement du citoyen postulant à un crédit immobilier à intérêt bonifié, ce qui se répercute inévitablement sur son éligibilité.

Si cette procédure d’octroi de crédit à intérêt bonifié peine à ce jour à connaître son envol, cela est dû aussi aux réticences constatées du côté des banques privées qui s’abstiennent encore d’adhérer à ce mécanisme. Au niveau de ces établissements financiers tels que Société Générale ou Natexis, la formule d’octroi de crédit à intérêt bonifié est toujours à l’étude, confirme-t-on de source sûre, et sa validation tarde à se faire jour.

Karim Aoudia