Après le FIS, Benflis veut réhabiliter les harkis

Après le FIS, Benflis veut réhabiliter les harkis

benflis.jpgAli Benflis, pourtant connu jusque-là pour son inclination naturelle à la pondération, au compromis politique, est-il entrain de devenir fou ? La campagne électorale est–elle entrain de lui faire perdre la tête au point de jouer avec le feu ?

Notre question peut paraître abrupte, à priori, mais néanmoins elle se pose avec acuité eu égard à ses appels du pied inconsidérés et pour le moins irresponsables à ce qui reste des cadres du FIS dissous.

Mardi, à Médéa, une des wilayas dont la population avait subi dans sa chair, dans son âme et dans ses biens les effets du terrorisme islamiste dans les années quatre vingt–dix, le candidat sans égard aux blessures encore vivaces, a martelé une nouvelle fois sa proposition de doter l’Algérie d’une nouvelle Constitution consensuelle au terme d’un large dialogue « sans exclusive et sans marginalisation ».

Cette formule cryptée renvoie en fait à la volonté de l’ex chef du Gouvernement de ressusciter l’ex FIS et de le réintégrer dans le jeu politique , au cas bien sûr où il serait élu le 17 avril. Mais qu’à Dieu ne plaise, autrement la porte de l’enfer s’ouvrira une nouvelle fois en Algérie où les citoyens, marqués par vingt ans d’extrême violence ponctuée par 200.000 morts, des milliards de préjudice et un traumatisme collectif inexpiable, ne rêvent que de deux choses : paix et stabilité. Ce qui ne semble pas être le projet de Si Ali visiblement décidé à chevaucher l’électoral islamiste pour parvenir à ses fins.

Toute la mouvance islamiste a été contactée

Et si la plupart des partis islamistes ont officiellement opté pour le boycott de la présidentielle, Benflis n’en caresse pas moins l’espoir de les voir pourtant se rendre massivement aux urnes le 17 avril pour lui apporter leur onction. En tous cas lui et son équipe s’y attellent très activement en multipliant les contacts tous azimuts avec les islamistes, toutes tendances confondues.

Selon des sources proches de l’équipe de campagne du candidat Ali Benflis, après Ahmed Merani, ex membre fondateur du FIS, qui a, d’une certaine manière débroussaillé le terrain au rapprochement, Benflis a encore rencontré deux figures du parti dissous Ali Djeddi et Abdelkader Boukhamkham ainsi que le bras droit de Ali Belhadj, Kamel Guemazi.

Abdelmadjid Menasra, transfuge du MSP qui a fondé son propre parti, le front national Algérien, a été également approché et, dit-on , favorable à la démarche d’autant plus qu’il est de la même région que Benflis, Batna. Abdallah Djaballah du FJD, Adelrazak Mokri du MSP, Fateh Rebai, le secrétaire général de Nahda ont eux aussi été contactés.

Cela étant dit, ces négociations entre Benflis et ses émissaires d’une part, et les milieux islamistes d’autre part, ont eu lieu à Alger, Paris, Genève, Doha (Qatar), Bahrein…

La mouvance islamiste, qui continue de négocier avec Benflis, serait sur le point, on parle de vendredi prochain, de faire une déclaration commune de soutien à Benflis.

Les milieux harkis approchés

Les mêmes sources ont confié à Algérie1 que des contacts ont été pris aussi avec les milieux harkis en vue d’un soutien à la candidature de Benflis. Ce soutien est évidemment purement symbolique puisque Ali Benflis a intégré les harkis dans sa « nouvelle Constitution consensuelle au terme d’un large dialogue sans exclusive et sans marginalisation ».

Cinq catégories ont été identifiées par les émissaires de Benflis :

La première concerne les harkis sur lesquels existent des témoignages qui attestent qu’ils ont du sang sur les mains. Ceux là ne seront pas concernés par l’amnistie.

La deuxième catégorie concerne les harkis qui ont collaboré avec l’Occupant sans avoir du sang dans les mains: Ceux là seront pardonnés.

La troisième catégorie ce sont les femmes qui ont collaboré avec l’Occupant : Celles là seront pardonnées.

La quatrième catégorie concerne ceux qui ont collaboré simultanément avec l’Occupant et la Révolution : Ceux là seront pardonnés.

La cinquième catégorie concerne les enfants de Harkis. Nos sources avancent que ces derniers n’étant pas responsables des actes de leurs parents, ils seront naturellement autorisés à rentrer et sortir du territoire national en toute liberté.

Benflis en sous-traitant au rabais du projet politique islamiste

Benflis affirme qu’il a quitté le gouvernement Ghozali en juillet 1991 pour marquer son désaccord avec les mesures d’internement administratif des islamistes dans des centres de sûreté alors que pour la vérité historique il a été démis de ses fonctions pour avoir critiqué précisément cette disposition et surtout à cause du refus du chef du gouvernement d’alors, Sid Ahmed Ghozali, de lui octroyer en pleine propriété la villa de fonction du ministre de la justice située à El Biar. L’homme est connu aussi pour avoir critiqué l’interruption du processus électoral en janvier 1992. C’est dire que les accointances de Benflis avec les islamistes ne datent pas d’aujourd’hui.

Ali Belhadj, dans la vidéo ci-dessous, rappelle cet épisode tout en étant très amical avec Benflis, trouvant sa candidature légitime, ce qui est rarissime chez Belhadj, lui qui a l’habitude de vilipender, dénigrer et mépriser tout responsable occupant de hautes fonctions au sein de l’État.

Que pensent Ali Benhadj et Abassi Madani de cette subite agitation que Benflis vient d’insuffler à la mouvance islamiste dont il veut visiblement être le fédérateur ? On se souvient que Ali Belhadj a assisté, à la salle Harcha, au meeting des boycotteurs. Quant à Abassi Madani, il s’est fendu d’un communiqué, où il a lancé un appel au boycott de la présidentielle. Néanmoins, l’ex numéro 1 et l’ex numéro 2 soutiennent la perspective d’une période de transition politique.

Mais tout ceci n’est que du fumigène, destiné à monter les enchères, puisque leur soutien à Benflis est assorti de deux conditions, d’abord la suppression de l’article 26 de la Charte pour la réconciliation civile qui tient le FIS pour le seul responsable de la tragédie nationale, ensuite Abassi et Benhadj, exigent un partage du pouvoir avec des postes de souveraineté, on parle du département de la justice et de l’intérieur en sus de la présidence de l’APN. La dissolution de l’Assemblée étant une condition sine qua non pour le FIS. Rien que çà ! Autant leur remettre les clés de la république.