Libye: Réunion ministérielle Tuniso-Algéro-Égyptienne le 1er mars à Tunis: Au-delà des interférences

Libye: Réunion ministérielle Tuniso-Algéro-Égyptienne le 1er mars à Tunis: Au-delà des interférences

Toute la médiation algérienne, autour de laquelle se sont agencées les contributions fortes des membres du Groupe des pays voisins et plus largement de l’Union africaine, consiste à progresser.

Le dossier de la crise libyenne suscite quasi quotidiennement les inquiétudes et l’attention des pays de la région, bien sûr, mais tout autant de la communauté internationale qui s’est engagée dans le processus du dialogue avec la conclusion de l’Accord du 27 décembre 2015. Or, ce n’est un secret pour personne que, pour aboutir à ce document, l’Algérie a mené un travail d’envergure, réunissant plus de deux cents représentants des factions agissantes en terre libyenne et plaidant sans cesse pour la solution du dialogue inclusif à laquelle n’adhéraient pas a priori certaines puissances occidentales qui parlaient encore d’intervention, pour autant qu’on s’en souvienne.

Depuis, les efforts de notre diplomatie n’ont pas faibli, au contraire. En témoigne le défilé à Alger des principaux responsables libyens, notamment ceux qui sont à la tête des trois institutions validées par l’Accord onusien, à savoir le Parlement de Tobrouk dont le mandat parvenu à expiration a été prorogé pour la circonstance, le Conseil présidentiel d’où est issu le gouvernement d’union et le Conseil d’Etat. Al Serraj, Aguila, Haftar et d’autres ont séjourné dans la capitale algérienne, comme la délégation de la région de Zentan, dimanche dernier.

Il est malheureux de constater que des tentatives fréquentes de brouillage de la démarche algérienne se succèdent, la dernière étant cette étrange annonce d’une initiative du chef d’Ennahda, Rached Ghannouchi, qui aurait été mandaté pour jouer les bons offices sur un terrain compliqué au moment où une pluie de critiques et d’accusations le ciblent dans son propre pays.

Serait-ce par hasard si ces digressions sont liées à son entrevue avec les dirigeants d’Ankara, dont on sait les liens étroits avec les Frères musulmans? Depuis, il a été question d’un sommet tripartite qui verrait la Tunisie, l’Algérie et l’Egypte réfléchir à une initiative nouvelle. On se demande bien laquelle, et avec quelle originalité.

Toute la médiation algérienne, autour de laquelle se sont agencées les contributions fortes des membres du Groupe des pays voisins et plus largement de l’Union africaine, consiste à progresser lentement mais sûrement, vers la paix et la sécurité auxquelles a droit le peuple libyen. Partant du principe que l’Accord du 27 décembre est un accord de transition, et compte tenu des nombreuses interférences dont certaines sont réellement nocives, la diplomatie algérienne a martelé constamment la nécessité de négociations directes entre Libyens, qui ont des compétences remarquables. Et de fait, toutes les parties partagent et défendent cette vue, de Haftar à Misrata en passant par Zentan et Tobrouk. Comme aussi, Alger s’est dit favorable à la constitution d’une armée unifiée dont la désignation des responsables est l’affaire des seuls Libyens et dont les missions seront la lutte contre le terrorisme, les crimes organisés ou le trafic de migrants.

Il faut comprendre une chose, apparemment malaisée pour beaucoup de monde. Nul autre pays que l’Algérie, y compris dans la sphère régionale, ne possède de contacts privilégiés avec l’ensemble des parties au conflit libyen. Une Algérie dont la force première est de n’avoir aucun intérêt à préserver en Libye, et qui entretient un Dialogue stratégique avec les cinq pays membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU. Membre influent de l’Union africaine, elle travaille à une rencontre de toutes les parties libyennes autour d’objectifs simples.

Comme aussi on doit comprendre que sa stratégie dans cette crise libyenne n’est qu’une facette de la stratégie globale qu’elle conduit en matière de lutte contre le terrorisme, le blanchiment d’argent, les crimes organisés.

L’Algérie n’a donc nul a priori contre l’idée d’un sommet tuniso-algéro-égyptien suggérée par Tunis. Il y aura ainsi une réunion préparatoire, le 1er mars prochain, afin de «cerner les contours» d’une telle initiative. L’essentiel est de garder à l’esprit que, malgré d’intenses efforts, le dossier libyen reste très lourd à diligenter.

D’où le plaidoyer pour une évolution pragmatique de l’Accord de transition, en particulier ses articles sur l’armée (8) et la composante du Conseil présidentiel, paralysé par le nombre et l’exigence de l’unanimité des neuf membres. Tout cela pour réaffirmer la position constante d’Alger, fondée sur l’équidistance vis-à-vis de toutes les parties libyennes, le soutien au processus politique des Nations unies pour un règlement définitif du conflit à travers un dialogue national élargi à l’ensemble des acteurs libyens, le respect de la souveraineté de la Libye et la non-ingérence dans ses affaires intérieures.