Laxisme contre un semblant de paix sociale. C’est l’équation visiblement adoptée par les pouvoirs publics. Sinon comment expliquer que des délinquants s’attaquent à des commissariats, que des vendeurs à la sauvette squattent les trottoirs et que les espaces publics soient aux mains de pseudo-gardiens de parking. De concession en concession, l’Etat est devenu absent, voire complice.
Lorsqu’au lendemain des émeutes de janvier 2011, le gouvernement n’avait eu pour seule réponse qu’une série de mesures dites d’«apaisement», le ton était déjà donné. Depuis, les concessions se multiplient, encourageant des comportements inciviques. Jeudi dernier, et après l’arrestation d’un de leurs acolytes ayant agressé un jeune homme à El Harrach, une bande de délinquants a attaqué le commissariat de Beaulieu, forçant les policiers à remettre en liberté l’individu appréhendé quelques heures plus tôt. Loin d’être anecdotique, la pratique se généralise. De manière régulière, les colonnes des journaux font état dans la rubrique des faits divers d’attaques de commissariats par des bandes préférant à la justice la vengeance. L’impunité est encouragée par la banalisation de la violence. Les batailles rangées sont légion dans plusieurs quartiers où des adolescents portent des armes blanches et en usent régulièrement. Souvent, les forces de l’ordre n’interviennent même plus, laissant les bandes rivales régler leurs comptes accentuant ainsi le sentiment d’un Etat absent. Et ils ne sont pas les seuls à profiter de cette situation. En janvier dernier, instruction avait été donnée pour que ces derniers ne soient plus inquiétés. Ils pouvaient dès lors squatter les trottoirs, proposer des produits avariés sous le regard indifférent et parfois même complice des services de l’ordre et celui impuissant des commerçants légalement installés. Ces derniers, rageant de devoir côtoyer des marchands ambulants, ne peuvent que constater l’anarchie et pester contre une administration qui les accule pour les impôts mais qui ferme les yeux dès qu’il s’agit des vendeurs ambulants. Ces derniers, jeunes et moins jeunes, profitent pleinement de ce laxisme et se permettent même le luxe de refuser les alternatives proposées. Certaines communes avaient mis en place des marchés de proximité où il était question de récupérer les marchands ambulants mais c’était compter sans la capacité de ces derniers à profiter du laxisme ambiant. Ils ont tout simplement décliné l’offre : pas question pour eux de basculer dans le formel et encore moins de payer des impôts ou d’abandonner le confortable statut de vendeur à la sauvette. Les espaces publics sont ainsi abandonnés aux mains des squatteurs de tous bords. Profitant de l’absence de parkings en nombre suffisant dans les grandes villes, de pseudo-gardiens prennent d’assaut les places pouvant servir de stationnement et font du racket à longueur de journée. Ils n’hésitent pas à recourir aux grands moyens pour soutirer de l’argent à toute personne ayant osé stationner sur ce qui est devenu leurs territoires. Toutes les plaintes des personnes ayant été agressées par ces gardiens autoproclamés sont restées sans suite. Au final, le cocktail impunité-complicité couplé à une absence chronique de l’Etat est détonant et n’est certainement pas garant de la paix sociale pour laquelle certains cercles sont prêts à tout.
N. I.