Les trois types de messages d’Alep qui montrent que des civils sont exécutés En une soirée, l’armée syrienne a tué au moins 82 civils, en public ou en s’introduisant chez eux.

Les trois types de messages d’Alep qui montrent que des civils sont exécutés En une soirée, l’armée syrienne a tué au moins 82 civils, en public ou en s’introduisant chez eux.

SYRIE – La bataille d’Alep touche à sa fin, mais pas la barbarie. Alors que le régime syrien est sur le point de remporter une manche décisive en reprenant la totalité de la ville avec l’aide des bombardements russes, la communauté internationale s’inquiète du sort réservé aux Aleppins. Dès les premières heures de ce mardi 13 décembre, le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon s’est alarmé de possibles « exactions ».

Des signaux effrayants proviennent effectivement de cette cité qui vit l’enfer depuis des mois. Ces informations se basent principalement sur trois types de messages: ceux des instances reconnues, ceux envoyés aux journalistes spécialisés par leur sources et ceux diffusés directement sur les réseaux sociaux.

Les sources de l’ONU

Dès la fin de matinée, l’ONU a confirmé que les militaires loyalistes avaient exécuté au moins 82 civils, sur les places ou en s’introduisant dans leur maison.

Pour établir ses chiffres, l’ONU se base sur « de multiples témoignages concordants » de « sources fiables », sans toutefois entrer dans les détails. « Nous avons reçu des informations indiquant que des forces pro-gouvernementales avaient tué au moins 82 civils, dont 11 femmes et 13 enfants, dans les quartiers de Boustane al-Qasr, Ferdous, Kallassé et Salhine », a ainsi annoncé le porte-parole du Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme, Rupert Colville.

« C’est l’enfer », résume par ailleurs l’organisation des secouristes des Casques Blancs, qui opère dans les quartiers de la rébellion. La télévision d’Etat syrienne diffuse des images filmées dans les quartiers repris aux rebelles: un même paysage de désolation, de ruines et de gravats à perte de vue sous une pluie fine.

Dans les rares quartiers encore contrôlés par les rebelles, de nombreux civils s’entassent dans un même secteur faute d’abris, selon des témoins. Des femmes et des enfants dorment dans la rue adossés à leurs valises. Les gens ont faim et sont à la recherche de pain.

Les contacts des journalistes

Tandis que la télévision officielle continue de diffuser des images de liesse après la « libération » d’Alep, les civils de l’est de la ville vivent l’enfer.

Dès lundi 12 au soir, de nombreux journalistes faisaient état d’exécutions sommaires, de viols et autres atrocités. Des informations confirmées peu à peu par des témoins sur place: la nuit de lundi à mardi a été celle de l’horreur.

De nombreux témoins font part de massacres à l’arme blanche. « Les forces du régime sont en train d’exécuter par balles des civils », explique un autre habitant d’Alep anti-Bachar al-Assad auprès de RFI: « Ils tirent sur tout ce qui bouge et ne font aucune distinction entre un adulte et un enfant. »

 

Les adieux des Aleppins

Sur les réseaux sociaux, les appels à l’aide se multiplient. La militante Lina Shamy dénonce « un génocide ». Selon elle, les civils sont coincés dans une zone de deux kilomètres carré, sans endroit sûr.

De nombreux rebelles et civils font également leur adieu sur les réseaux sociaux, par le biais de « derniers messages » insoutenables. Certains se demandent: « Pourquoi ne nous tuent-ils pas une bonne fois pour toutes? Pourquoi nous tuent-ils chaque minute? »

« Je n’ai nulle part ou aller, c’est le dernier jour », explique un habitant dans son « dernier message ». « Il n’y a plus d’hôpital, il n’y à plus de médecins (…) Ne croyez plus à la communauté internationale. Ne croyez plus aux Nations Unis », déplore-t-il avant de conclure: « Au moins, nous avons été libres. Nous voulions juste être libre. »7

Parmi ces derniers messages, il y a également celui de Bana Al-Abed. La fillette de sept ans qui racontait – avec l’aide de sa mère – son quotidien à Alep a publié ce dernier tweet:

Mon nom est Bana, j’ai 7 ans. Je parle au monde en direct d’Alep-Est. C’est mon dernier moment pour vivre ou mourir. » « Tous ces groupes qui les encerclaient depuis des mois sont en train de se libérer dans leur violence la plus abjecte, sur cette population qui est prise en otage », explique Raphaël Pitti, un médecin de retour de Syrie, sur France Inter.