Alors que le ton est monté d’un cran entre le Maroc et la Mauritanie: Mohammed VI tente de désamorcer la bombe

Alors que le ton est monté d’un cran entre le Maroc et la Mauritanie: Mohammed VI tente de désamorcer la bombe

Le souverain marocain a chargé son chef de gouvernement de rassurer les responsables mauritaniens après que le SG de l’Istiqlal, Hamid Chabat, ait revendiqué la «marocanité» de la Mauritanie.

Nul doute que cette montée au créneau, du roi, est sous-tendue par sa demande d’adhésion à l’Union africaine. Cette agression contre un de ses Etats membres risque d’anéantir définitivement son rêve de retour au sein de la famille africaine. Une bombe qu’il fallait désamorcer en urgence. Le souverain marocain a chargé son chef de gouvernement de rassurer les responsables mauritaniens après que le SG de l’Istiqlal, Hamid Chabat, ait revendiqué la «marocanité» de la Mauritanie.

Abdelilah Benkirane s’est donc envolé, hier, pour Nouakchott afin d’essayer d’éteindre l’incendie. «Ce déplacement consistera essentiellement à rassurer les autorités de Nouakchott et réaffirmer le respect par le Maroc des principes de bon voisinage et de ses frontières internationalement reconnues», ont écrit les médias marocains. La Mauritanie avait sérieusement haussé le ton après que Hamid Chabat, patron de l’Istiqlal, 3ème force politique marocaine ait déclaré le 24 décembre que «la Mauritanie est une terre marocaine et que les frontières du Maroc s’étendent de Sebta au Nord jusqu’au fleuve Sénégal au Sud».

La réplique fut cinglante. De tels propos tenus par un homme politique de premier plan, responsable d’un parti qui a participé aux gouvernements successifs de 1997 à 2013 ne peuvent qu’accréditer des intentions belliqueuses qui réactualisent les fantasmes expansionnistes du pouvoir marocain. La menace est prise au sérieux. La République islamique de Mauritanie s’est indignée. «L’atteinte à la souveraineté et à l’indépendance de la Mauritanie n’est pas la meilleure des façons de traiter les questions et les dossiers épineux, et ne mènera pas à la résolution du conflit au Sahara occidental», lui a répondu le parti mauritanien au pouvoir, l’Union pour la République (UPR) qui a qualifié les déclarations du SG de l’Istiqlal «d’atteinte à la souveraineté et à l’indépendance de la Mauritanie».

Le message a été reçu 5 sur 5. C’est une véritable volée de bois vert qui s’est abattue sur le chef de l’Istiqlal. Le ministère des Affaires étrangères et de la Coopération (Maec) a «vigoureusement» rejeté ces déclarations, qu’il a qualifiées de «dangereuses et irresponsables». Le Maec «rejette vigoureusement ces déclarations qui portent atteinte aux relations avec un pays voisin frère et démontrent une méconnaissance profonde des orientations de la diplomatie marocaine, tracées par Sa Majesté le roi, que Dieu l’assiste, et qui prônent le bon voisinage, la solidarité et la coopération avec la Mauritanie soeur», indique le communiqué du département de Salaheddine Mezouar.

Rabat se met en quatre pour convaincre Nouakchott de sa bonne foi et jure presque qu’elle n’a rien à voir dans cette affaire. «Le Maroc déclare officiellement son respect total des frontières connues et reconnues, par le droit international, de la République islamique de Mauritanie et son intégrité territoriale», écrit le ministère marocain des Affaires étrangères qui implore le président, le gouvernement et le peuple mauritaniens à ne donner «aucune importance à ce type de déclarations qui ne nuisent qu’à la crédibilité de la personne qui les a faites», qui «manquent manifestement de retenue et de maturité», versent «dans la même logique des ennemis de l’intégrité territoriale du Royaume et qui combattent son retour légitime à sa famille institutionnelle africaine».

Une «pique» qui atteste que la mauvaise foi est bien un trait de caractère du pouvoir marocain. Nouakchott doit se souvenir que lorsque Hamid Chabat avait déclaré que «la récupération de Tindouf, Béchar, Kenadsa, est une exigence du peuple marocain», Mohammed VI n’a pas pipé un mot. L’Algérie l’avait mis en garde. «Ce responsable qui a déjà tenu des propos similaires dans un passé récent, serait bien avisé de ne pas persévérer dans la provocation…», avait averti l’ex-porte-parole du ministère algérien des Affaires étrangères, Amar Belani. Si le souverain marocain a décidé de le lâcher cette fois-ci, ce n’est que pour des intérêts bien étroits.