L’Alliance présidentielle doit composer avec un partenaire bien particulier actuellement. Amara Benyounès ne fait pas dans le suivisme, garde un discours constant sur la présidentielle ; ses déclarations sont empreintes d’une prudence qui s’est progressivement transformée en une sorte de voile de mystère enveloppant l’homme.
Abla Chérif – Alger (Le Soir) – En sait-il trop ou pas assez ? C’est en ces termes que se pose en effet aujourd’hui l’équation qui s’est mise en place autour du président du MPA (Mouvement populaire algérien). A l’inverse des autres membres du groupe formé pour soutenir le programme présidentiel, Amara Benyounès a tenu, et tient à ce jour, à garder une distance très remarquée au sujet de la présidentielle à venir.
Amara n’attaque personne, se refuse à entrer dans des polémiques inutiles, ne verse pas dans des déclarations creuses ou censées uniquement faire parler de sa personne, des prises de position trop rapides tout en évitant de se mettre à dos ses autres partenaires au sein de l’Alliance. Inévitablement, il se démarque. C’est ainsi qu’il a su, maintes fois, et sur une longue durée, surfer au-dessus des crises qui ont éclaté au sein de cette même alliance y compris lorsqu’il se trouvait concerné.
Aux violentes attaques de Ould-Abbès le traitant d’«aghioul» (âne en tamazight), il se défend en usant d’un langage plus diplomatique lui évitant ainsi d’autres foudres. Le fait n’empêche pas l’ancien secrétaire général du FLN de tenter de le dévaloriser en affirmant qu’il ne «savait rien de ce qui se passait» (en haut lieu entendre). «Nul ne détient la vérité», lâche cette fois Benyounès, affirmant aussi «que nul ne pouvait contraindre quiconque à se présenter». Alors que les alliés s’emballent pour la mise en place de tout le processus devant mener au cinquième mandat, le président du MPA refuse de se positionner.
Il évoque l’absence d’éléments. «Nous nous positionnerons lorsque nous aurons plus d’informations», déclare-t-il à la presse. Dans les faits, ce dernier semble pourtant plus informé qu’on ne pourrait le croire. Sans hésitation, les députés du MPA intègrent le mouvement anti-Bouhadja (ancien président de l’APN), alors que rien n’indiquait encore l’issue du conflit. Amara Benyounès ne fait pas cavalier seul, mais refuse de tourner le dos à l’opposition qu’il accuse pourtant de vouer «de la haine à Bouteflika». Il rencontre le leader du MSP (Mouvement pour la société de la paix) qui prône la nécessité de mise en place d’un consensus national, arguant du fait que sa décision relève «de la liberté dont jouit son parti».
Cette image, Amara Benyounès veut la conserver et le démontre à chaque fois que l’occasion s’en présente, comme cet été à Mascara en allant déposer une gerbe de fleurs sur les tombes des quatre scouts victimes d’un attentat terroriste un certain 1er Novembre 1994. Aux journalistes qui l’interrogent au sujet de la présidentielle durant cette visite, il lance une réponse qui accentue le flou : «Dans les moments difficiles, dit-il, le Président sait sur qui compter sur le terrain (…) Nous avons soutenu Bouteflika avant et après notre entrée au gouvernement, en 1993, lorsqu’il est tombé malade, nous avons été le seul parti à le soutenir pendant que certains qui appellent aujourd’hui au cinquième mandat tenaient le bâton par le milieu (…) nous parlerons du cinquième mandat au moment opportun, quand nous aurons plus d’informations.»
Il garde la même prudence lorsque s’amorçait, il y a quelques jours, un large débat autour de la possibilité d’un report de l’élection présidentielle. Le sujet n’est abordé d’aucune manière, et les propositions laissées à la charge de leurs auteurs même lorsque ces derniers se trouvent être membres de l’Alliance. «C’est son affaire», répondait-il ainsi aux journalistes sollicitant son avis sur la sortie de Amar Ghoul, président de TAJ, suggérant une prolongation du mandat de Bouteflika. Rien n’a changé depuis. La convocation du corps électoral, l’apparition massive de candidats semblent bien loin d’être le genre d’éléments recherchés. Ce week-end, il affirmait une nouvelle fois que le conseil national de son parti déterminera «au moment opportun la position à l’égard de cette élection».
A. C.