Côtes de la wilaya de Béjaïa: Les plages abandonnées aux voyous

Côtes de la wilaya de Béjaïa: Les plages abandonnées aux voyous

C’est à un véritable racket que s’adonnent des jeunes sur l’ensemble de la côte de la wilaya en monnayant l’accès aux plages.

Et gare à celui qui comme ce jeune père de famille que nous avons croisé à l’entrée de la plage de Maghra, à l’entrée de Tichy, essaiera de tenir tête aux gardiens. Notre infortuné estivant d’un jour a été vite entouré par les camarades du «préposé» à l’entrée de la plage. Il a dû céder et payer sous les regards menaçants des autres éléments de la bande de «parkingueurs» qui agissent impunément. Cent dinars contre un bout de papier coupé à la main et sur lequel ne sont saisis que le nom de la plage ainsi que le montant, qui donne un droit d’entrée sur la plage. «Si tu n’es pas content, tu n’as qu’à aller voir ailleurs», hurlait le jeune gardien, en signe d’avertissement aux autres automobilistes qui faisaient la queue pour accéder à la plage, et qui se hasarderaient à refuser de payer. Cette situation ne se limite pas seulement à Maghra, mais elle est commune à toutes les plages que nous avons visitées. Que ce soit à Aokas, Souk El Tenine, Melbou, pour la côte est, ou Boulimat, Saket et Oued Dass à l’ouest de Béjaïa, le constat est le même. Un état de fait qui contredit totalement les assurances et les promesses des pouvoirs publics qui claironnent matin et soir à qui veut bien les entendre que l’accès aux plages est gratuit. Un principe pourtant farouchement défendu par le wali de Béjaïa, Mohamed Hattab, en préambule de son intervention à la réunion d’installation officielle de la commission du suivi du déroulement de la saison estivale. Lors de cette séance de travail, l’ensemble des parties concernées par les différents aspects de la préparation de la saison estivale ont été instruites également d’interdire les jeux sur les plages, de ne pas autoriser la location des équipements à même la plage et d’améliorer les conditions d’accueil des estivants. Sur ce plan, rien non plus n’a été concrétisé sur le terrain. On continue à louer tout sur la plage : chaises, tran-sats, parasols, pédalos… Même la sécurité est absente, alors que la saison estivale a été ouverte officiellement le 1er juin. Les postes de gendarmerie sont désespérément vides ; les brigades chargées de la sécurité des plages n’y ont pas encore fait leur apparition. Seuls les postes de la protection civile sont en activité. Les commerces informels ont déjà fait leur apparition sur les plages, comme en témoignent les baraques de fortune élevées à même le sable au vu et au su de tout le monde. On y écoule toutes sortes de marchandises. Du short de plage au sandwich à la qualité douteuse, en passant par les recharges de téléphone, tout s’écoule. Et les squatteurs des lieux, véritable organisation douteuse aux ramifications aussi nombreuses que les activités des plages et qui ont fait main basse sur la côte, ne semblent pas s’en inquiéter outre mesure.

«La complicité des autorités est bien réelle dans l’organisation de ces activités estivales», estime un élu de l’APW, tandis qu’un élu de l’APC de Béjaïa avoue l’incapacité de la commune à intervenir dans la gestion des plages. Des dizaines de millions de dinars sont brassés chaque été par ces jeunes affairistes sans débourser le moindre sou au fisc. Une rente malheureusement boudée par les collectivités. Mais que représente le squat des plages par ces jeunes, l’espace d’un été, lorsqu’on sait que des portions entières de rivages sont soustraites définitivement au domaine maritime par des individus sans scrupule qui en ont fait des propriétés privées, s’interrogent légitimement des militants associatifs qui activent pour la sauvegarde de l’environnement. «Ces jeunes ne font que prendre exemple sur les gros requins qui écument les plages de Boulimat, Saket et Oued Dass qu’ils ont, en partie, clôturées, pour en interdire l’accès au grand public», répond Samir, un jeune cadre associatif.