Claude Hêche, président du Conseil des États de la Confédération Suisse, à “Liberté” “La Suisse et l’Algérie sont des pays de médiation”

Claude Hêche, président du Conseil des États de la Confédération Suisse, à “Liberté”  “La Suisse et l’Algérie sont des pays de médiation”

d-la-suisse-et-lalgerie-sont-des-pays-de-mediation-8d144.jpgSur invitation du président du Sénat, Claude Hêche effectue une visite officielle en Algérie où il aura l’occasion de rencontrer plusieurs membres du gouvernement. C’est la première fois qu’une personnalité de ce rang séjourne en Algérie. À cette occasion, il a bien voulu accorder un entretien à Liberté.

Liberté : Dans quelle mesure votre visite en Algérie peut-elle booster les relations entre nos deux pays, qui demeurent toujours en deçà des espérances des deux parties ?

Claude Hêche : Les relations entre la Suisse et l’Algérie sont excellentes. Quelques jours après que l’Algérie eut célébré la Journée de la victoire, le 19 Mars, qui commémore les accords d’Évian de 1962, j’aimerais rappeler que la Suisse a contribué, discrètement, pour que les négociations qui ont abouti à ces accords puissent avoir lieu. Maintenant, il est certain que nos relations peuvent être “boostées” pour reprendre votre mot. J’espère que ma visite comme président du Conseil des États, l’équivalent du Sénat en Suisse, sera un signal de notre volonté de le faire. Je suis honoré d’être reçu par mon homologue, le président du Conseil de la nation ainsi que par le gouvernement à haut niveau.

Il existe en Suisse une communauté algérienne relativement importante, comment est perçue cette présence par vos compatriotes ?

Pour situer ma réponse, il faut d’abord que je dise que la Suisse compte plus de 20% d’étrangers qui vivent de manière permanente dans notre pays. Sur une population de 8 millions, près de 1,9 million vient d’ailleurs. Mais la réalité est qu’ils vivent souvent depuis longtemps ou sont même nés en Suisse. Pour répondre à votre question, je ne crois pas que les Algériens ou binationaux ou Suisses d’origine algérienne aient une image spécifique clairement identifiée.

La délivrance du visa suisse aux Algériens obéit à des règles un peu sévères, ne faut-il pas envisager plus de facilités dans son attribution par votre représentation diplomatique à Alger ?

La Suisse appartient à l’espace Schengen et suit les règles communes à tous les pays de l’espace Schengen. Notre ambassade s’efforce de traiter les demandes de la meilleure manière possible en appliquant ces règles communes, avec le sourire si possible !

La question de la levée du secret bancaire en Suisse fait toujours polémique, particulièrement avec cette affaire de la banque HSBC, qui fait couler beaucoup d’encre et de salive. Berne est-il disposé à le lever ?

Les évolutions du système financier international ont été considérables et très rapides ces dernières années. La Suisse y participe activement. Elle accorde une grande importance à ce que sa place financière soit intègre. L’intégrité est aussi un facteur de compétitivité et la Suisse veut rester une grande place économique. Dans le domaine fiscal, la Suisse participe aux travaux de l’OCDE qui a adopté une norme mondiale d’échange automatique de renseignement à des fins fiscales. 93 pays se sont ralliés, 58 dès 2017 et 35, dont la Suisse, dès 2018. Trois textes de loi sur les marchés financiers sont, cette année, en discussion au Parlement. Nous devons encore réserver quelques mois, en cas de référendum en 2016, pour ainsi pouvoir les mettre en œuvre au début 2017.

Il est important de dire que la transparence du système financier international ne peut vraiment fonctionner que si toutes les places financières y participent et si les normes sont les mêmes pour tous.

Dans le même ordre d’idées, quel rôle peut jouer la Suisse, qui gère 2 000 milliards de dollars US d’actifs en majorité étrangers, contre le blanchiment d’argent ?

Ce sont des banques qui gèrent les avoirs, pas la Suisse, et j’ajoute aussi que 40% des banques sont étrangères. J’aimerais bien remettre vos chiffres en perspective pour que vos lecteurs aient une idée réaliste : les banques et les assurances contribuent à 10% du PIB en Suisse et 6% de la population active y travaille. C’est beaucoup bien sûr, mais cela veut aussi dire que 90% du PIB sont créés par d’autres activités et que 94% des personnes actives travaillent ailleurs. On ne peut donc pas résumer la Suisse à ses banques, ni à ses montagnes, ni à son chocolat d’ailleurs.

Pour ce qui est de la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, la Suisse est très attentive et active pour être à la pointe de la lutte contre les flux financiers illicites, l’argent sale comme on dit communément. Nous avons bien sûr une loi contre le blanchiment d’argent et une institution de surveillance des marchés financiers. La Suisse met en œuvre les recommandations du Gafi qui fait autorité pour ce qui est de la lutte contre le blanchiment ; l’Assemblée fédérale a adopté le 12 décembre dernier le projet de loi contenant les nouvelles prescriptions internationales pour la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Bref, encore une fois, la place financière suisse ne veut pas d’argent sale.

M. T