Le célèbre imam égyptien, Safwat Hijazi, a dû briser tous les tabous avant-hier dans son émission de la chaîne religieuse d’Al-Nass en évoquant le très heurté match Egypte-Algérie.
Sans détour aucun, cheïkh Hijazi a reproché à ses compatriotes leur hostilité envers les supporters algériens durant et à la fin de ladite rencontre. «Je n’ai pas compris ce chauvinisme des Egyptiens envers les Algériens pour un simple match de football. Jadis, on avait tous supporté l’Algérie durant le Mondial 1982.
Personnellement, je n’oublierai jamais la joie que les Algériens nous avaient procurée à cette époque-là.
Aujourd’hui, je constate qu’on parle de sang qui coule entre musulmans et, de surcroît, entre deux nations qui devraient être soudées grâce à leurs liens historiques.
Si les Algériens ne doivent pas ignorer l’aide des Egyptiens durant leur révolution nationale, les Egyptiens ne doivent pas oublier non plus que le sang des Algériens a coulé à Sinaï durant la Guerre du 6 octobre. Croyez-moi, j’ai visité une vingtaine de villes en Algérie, ses gens étaient hospitaliers à un point que je n’ai jamais imaginé. Les imams de l’équipe ont fait leur discours, à chaque fois, devant pas moins de 10 000 croyants et pieux Algériens. Ce que l’on nous interdit à dire, nous les imams, dans notre pays, on nous l’avait permis en Algérie.
Alors, permettez-moi de présenter mes excuses à tous les Algériens.
A ceux qui ont été agressés, insultés ou malmenés sur nos terres. Même si les Algériens ont eu des dépassements, nous les Egyptiens on ne devait jamais faire autant. On n’a aucun argument qui nous pousse à attaquer les Algériens qui sont nos frères. Nous avons un même sang, qui s’est mélangé à plusieurs reprises lors des guerres contre nos vrais ennemis.
Je dirai aux deux peuples si leur réaction aurait été pareille si l’un des deux avait affronté Israël en Coupe du monde ?»
«J’ai peur que le sang coule encore au Soudan»
Safwat Hijazi est allé loin dans son analyse, en redoutant le pire du côté de Khartoum. «Au train où vont les choses, le sang risque de couler encore dans les rue de Khartoum. Je vois mal comment des milliers de supporters déchaînés et inconscients vont se séparer amicalement après un match qui est devenu la préoccupation des deux peuples. Soyons raisonnables. Ce n’est qu’un match de football. Je suis vraiment étonné de voir les gens implorer Dieu pour la réussite d’une équipe. C’est vraiment grave et scandaleux de la part de deux pays auxquels l’imam Al Ghazali a pressenti que l’Islam ressuscitera sur leur terre. Dites-moi si le prophète Mohammed sera heureux d’apprendre ce qui s’est passé au Caire, à Blida ou encore ce qui risque d’arriver à Khartoum», dira sur un ton sombre le cheïkh Safwat.
«Si j’avais le pouvoir, je demanderais à l’Egypte de se retirer du Mondial»
Hijazi, qui était très attentif aux doléances des Algériens qui n’ont pas cessé de déplorer l’attitude des Egyptiens, a répondu d’une manière sèche : «Si j’avais un grain de pouvoir, j’ordonnerais à l’équipe nationale égyptienne de se retirer et laisser les Algériens aller au Mondial. Je prendrais la même décision si j’étais Algérien. Egyptiens et Algériens doivent former un seul peuple. J’espère que la raison l’emportera.»
«Voilà ce que m’a dit une star de l’équipe égyptienne juste après le match»
Juste après le match, un joueur de la sélection égyptienne aurait pris attache avec Hijazi pour lui demander si les joueurs n’étaient pas aussi responsables de cette guerre rangée entre les deux peuples. «Une star de la formation égyptienne m’a appelé après le match pour me demander si leur responsabilité était engagée sur ce qui se passe entre les supporters des deux équipas. Un joueur que je préfère taire le nom. Je ne lui ai pas répondu, mais je sens qu’il y a au moins quelqu’un qui commence à prendre conscience de la situation», dira Hijazi. Selon nos suppositions, il s’agirait de Aboutrika.
Migari (Coran TV): «Il faut appeler à de la sagesse»
«Ce que connait la rue algérienne à la suite de ce qui est arrivé à la fin de la rencontre était prévisible à cause de la pression et de propagande irresponsable. La rencontre est devenue le seul souci. Les responsables des chaînes de télévision privées en Egypte sont responsables de cette propagande. Elles doivent assumer leurs responsabilités devant Dieu et face à l’histoire.»
Brik : «Qui ne sait pas contrôler ses émotions est le plus grand perdant»
«Le musulman sage est celui qui recherche une victoire morale. Celui qui tente de gagner au mépris du bon sens, en agressant les autres dans leur corps et dans leurs biens, sans contrôler sa colère et ses émotions est sans nul doute le plus grand perdant. Les réactions impulsives, sans aucun contrôle, peuvent mener à la catastrophe. Nous sommes une nation aux valeurs nobles, et nous devrions réagir de la manière la plus sportive. Je demande aux jeunes de ce peuple de savoir se contenir.»
Kaba : (Fatawi Ala El Haoua) : «Une partie de foot ne doit pas nous désunir»
«Le musulman est le frère du musulman. Le Coran est le lien entre nous et les Egyptiens. Nous sommes une seule nation. L’Islam et la langue nous unissent. Il ne faut pas qu’un match de football nous divise. Parce que le football n’est qu’une partie de jeu. Craignez Dieu, car qui assumerait les responsabilités en cas de mort d’homme.»
Amine L.