Le ministère français des Affaires étrangères a annoncé, hier, avoir transmis des documents au juge chargé de l’enquête sur la mort de sept moines français à Médéa en 1996 après la levée du secret-défense en France, selon la presse française qui cite le porte-parole du Quai d’Orsay, Bernard Valéro.
Le juge d’instruction Marc Trévidic avait saisi les ministères des Affaires étrangères, de la Défense et de l’Intérieur pour qu’ils remettent les documents secrets au juge d’instruction compétent. Le président français Nicolas Sarkozy avait souhaité le 9 juillet dernier que le secret-défense soit levé dans l’affaire des sept moines français de Tibhirine.
La justice française avait requis l’été dernier la levée du secret-défense sur les documents détenus par les ministères de la Défense, des Affaires étrangères et de l’Intérieur. L’avocat des familles des victimes, Me Patrick Baudouin, avait déclaré que sa demande est motivée par le «souci de déterminer ce que le gouvernement français connaît de cette affaire». Une enquête judiciaire n’a été ouverte en France qu’en 2004, huit ans après les faits.
Un général français, François Buchwalter, attaché militaire à l’ambassade d’Alger en 1996, a déclaré en juin dernier à Marc Trévidic que, selon ses informations, les moines de Tibhirine n’avaient pas été tués par les islamistes qui les détenaient mais par l’armée algérienne lors de l’assaut donné aux terroristes.
Le Groupe islamique armé (GIA) avait pourtant bel et bien revendiqué les assassinats. Les accusations du général Buchwalter ont suscité une cascade de réactions d’indignation en Algérie. Le ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, Noureddine Yazid Zerhouni, était le premier officiel à réagir. Pour lui, tout cela s’apparente à «du théâtre japonais, le kabuki», dont la scène se déroule à Paris».
«Cela me rappelle le théâtre japonais, le kabuki, qui s’est beaucoup intéressé au théâtre des marionnettes. Vous voyez les marionnettes qui dansent, et il y a en arrière- salle un souffleur qui lit, parle et dicte les paroles de l’histoire », avaitil ironisé. Noureddine Yazid Zerhouni a tenu à préciser que «cette scène se déroule à Paris, mais pas en Algérie, et que moi je suis un ministre en Algérie».
Autrement dit, Yazid Zerhouni suggère que pour l’Algérie, le dossier des moines de Tibhirine est une affaire «francofrançaise ». Une formule reprise en choeur par plusieurs responsables politiques en Algérie.
Le général Buchwalter avait, dans un réquisitoire fondé sur de simples délires contre l’armée algérienne, accusé les militaires algériens de «bavure» contre les moines trappistes. Les allégations de l’ancien attaché militaire de l’ambassade de France à Alger sont battues en brèche par les témoignages des responsables et des diplomates français de l’époque.
Alors que le GIA, dirigé par Djamel Zitouni, avait revendiqué l’assassinat des moines, une violente campagne est déclenchée en France par les partisans du «qui-tue-qui ?» qui veulent faire croire que le GIA est une création de la Sécurité militaire. Le lobby anti-algérien s’est mobilisé de façon extraordinaire en France.
Amine L.