Si la facture d’importation des médicaments a été amortie de 18% de 2012 à 2013, elle demeure, néanmoins, toujours importante (plus de 2 milliards de dollars). Peut-on la réduire encore davantage ? La réponse est oui, selon l’Union nationale des opérateurs de la pharmacie (Unop) qui propose, désormais, quelques recommandations pour atteindre cet objectif ô combien salutaire, à la fois pour le Trésor public, les producteurs locaux, les consommateurs, ou encore la Caisse nationale des assurances sociales.
Invité hier au Forum de DK News, le président de l’Unop, le Dr Abdelouahed Kerrar, estime, en effet, qu’il y a moyen de diminuer de moitié cette facture dans moins de deux années, pour peu que certaines mesures soient immédiatement prises.
Des mesures, dit-il, dont l’objectif est de booster la production locale pour atteindre un taux de couverture du marché national de 67% des 36% qu’elle représente actuellement, soit un tiers du marché national avec 1 milliard de dollars du volume global estimé à 3 milliards de dollars. Autrement dit, les médicaments importés représentent deux tiers du marché. Pour autant, le président de l’Unop ne “mystifie” pas la facture d’importation tant que, soutient-il, l’Algérie reste en-dessous de la moyenne mondiale (125 dollars par habitant) en termes de consommation des médicaments avec seulement 79 dollars par habitant par an. Pour réduire de 50% la facture d’importation, le Dr Kerrar suggère a priori de revoir l’actuel système d’enregistrement des médicaments localement fabriqués, tout comme celui des remboursements, la levée de la contrainte de la marge imposée par les autorités aux seuls producteurs locaux et la révision du système “obsolète” — il date des années 1970 — de négociation des prix des médicaments entre l’opérateur et la tutelle, ou encore la dotation de ces derniers d’une autorisation préalable par le ministère de l’Énergie et des Mines pour l’importation de produits dits “dangereux”.
À commencer par le système d’enregistrement des médicaments, le président de l’Unop réclame que celui-ci soit performant, transparent, rapide et adapté aux besoins des producteurs nationaux. Le Dr Kerrar estime que la fluidification du système d’enregistrement devra permettre l’enregistrement d’au moins 500 produits locaux par an et de seulement 150 médicaments d’importation. L’étude d’un dossier pour l’enregistrement, ajoute-t-il, ne doit pas excéder une période de 7 jours.
Mais tout cela, préconise-t-il, doit passer d’abord par le recrutement d’au moins 30 pharmaciens au service d’enregistrement du ministère de la Santé, qui, regrette-t-il, ne compte actuellement que 3 pharmaciens ! S’agissant du système des remboursements, le Dr Kerrar revendique à ce qu’il y ait une “spontanéité” entre les opérations d’enregistrement d’un médicament et son remboursement par la Caisse nationale, rappelant que dans l’actuel système, un produit local n’est remboursable qu’après une période allant de 3 à 18 mois après son enregistrement au ministère de la Santé.
Pour ce qui est de la contrainte de la marge bénéficiaire que seules les autorités algériennes continuent d’imposer aux opérateurs, le président de l’Unop juge tout simplement qu’il est temps de la supprimer, au même titre qu’il réclame l’actualisation de l’ancien système de négociation des prix des médicaments qui se base essentiellement sur les appels d’offres.
Or, juge-t-il, cette méthode de négociation “effrénée” des prix n’est plus le modèle indiqué pour encourager les producteurs qui, eux, demandent plutôt “un accord préalable” sur les prix. La suppression de la marge et l’assouplissement des prix, explique le président de l’Unop, sont deux mesures qui s’imposent aujourd’hui au vu, d’une part, des dernières augmentations salariales de plus de 50%, et d’autre part, de l’évolution du cours de la devise avec 18% d’augmentation. Si cela n’exprime pas la volonté de l’Unop d’augmenter dans l’immédiat les prix des médicaments sachant qu’ils sont fixés pour une période de 5 ans, il n’en demeure pas moins qu’en filigrane, cette option n’est pas à écarter dans l’avenir. À ce sujet, les propos du docteur Kerrar sont clairs : “Si nous comprenons parfaitement la contrainte des autorités qui œuvrent pour permettra l’accès aux médicaments pour tous les citoyens, il faut dire que les opérateurs ont aussi besoin de pérenniser leur industrie (…).”
F. A