Vers la reconduction des quotas ? : L’OPEP impuissante face aux mutations économiques et énergétiques mondiales

Vers la reconduction des quotas ? : L’OPEP impuissante face aux mutations économiques et énergétiques mondiales

La réunion de l’OPEP regroupant 12 pays membres : l’Algérie, l’Angola, l’Arabie Saoudite, l’Équateur, l’Iran, l’Irak, le Koweït, la Libye, le Nigéria, le Qatar, les Émirats arabes unis et le Venezuela se réunira le 05 juin 2015 et sera caractérisé certainement par le maintien du quota actuel fixé à 30 millions de barils/jour. La stratégie de l’Opep de ne pas réduire sa production afin de maintenir sa part de marché fonctionne, a affirmé lundi le ministre saoudien du Pétrole à l’AFP le 01 juin 2015. C’est les discussions qui ont eu lieu à l’initiative algérienne, certes louable, entre des pays de l’Opep et hors-Opep, dans le but de tenter d’alléger le fardeau des coupes qui reposerait sur le cartel seul, ont peu de chance d’aboutir pour des raisons géostratégiques, selon JBC Energy , la volonté des pays hors-Opep étant mitigée et souvent contradictoire.

Eviter pour l’Algérie le scénario dramatique des impacts de la crise de 1986

L’Algérie a adhéré à l’OPEP en 1969, qui fut crée en 1960Pour rappel, depuis la dernière décision, l’Algérie produit 1,2 million de barils par jour depuis le 1er janvier 2009, contre 1,4 mbj auparavant, soit moins de 200.000 bj suite à la décision de l’Opep de réduire son plafond de production pour soutenir les cours du brut. La chute des hydrocarbures a eu lieu en 1986, mais les impacts ne se font sentir qu’en 1989/1990.

L’Algérie après plus de 50 années d’indépendance politique reste toujours une économie rentière 95% d’exportation relevant des hydrocarbures et ajoutant les dérivées 97/98%, le prix de cession du gaz étant actuellement déconnecté de celui du pétrole, donc à un niveau de prix bas alors que l’investissement est hautement capitalistique. Pour l’Algérie le seuil de rentabilité doit être au minimum 10 dollars le MBU pour les canalisations et plus de 15 dollars pour le GNL.

On peut découvrir des centaines de gisements mais non rentables, les réserves étant fonction du taux de récupération, du vecteur prix international, des différentes sources d’énergie concurrentes et des couts. Cette baisse des cours accroîtra les tensions budgétaires de bon nombre de pays pétroliers et risque d’éponger une grande fraction de leurs réserves de change horizon 2020.

Ces pays ne peuvent continuer à dépenser sans compter. Pour l’Algérie les recettes de Sonatrach( les exportations hors hydrocarbures étant marginales entre ½ milliards de dollars/an durant cette période) ) selon la Banque mondiale correspondant à celles de la Banque d’Algérie pour la période 2000-2014, ont été de 760 milliards de dollars et les importations en devises ont été de 582 milliards. La différence entre les recettes et les importations donne 178 milliards de dollars de réserves de change, non compris les 173 tonnes d’or, y compris les DTS et le prêt de 5 milliards de dollars accordés au FMI. Si on enlève le remboursement anticipé de la dette, on retombe sur le chiffre des réserves actuelles de 178 milliards de dollars au 31/12/2014, qui rappelons le ont baissé de 15,2 milliards de dollars entre juillet et décembre 2014. L’Algérie produit peu et importe presque tout, le taux d’intégration des unités privées et publiques ne dépassant pas 15%, et uniquement les importations de matières premières pour 2014 a dépassé 17 milliards de dollars. Plus précisément les recettes de Sonatrach ont été de 73 milliards de dollars entre 2010/2011, 63 milliards de dollars en 2013 et 59 milliards de dollars en 2014 avec un cours moyen de 85/90 dollars ente le premier et le second semestre 2014. Avec un cours moyen de 70 dollars les recettes de Sonatrach seront inférieures à 50 milliards de dollars et à 60 dollars environ 40 milliards de dollars de chiffre d’affaires , restant comme profit net après déduction des charges et des profits des firmes étrangères , d’environ 25% 30 milliards de dollars..

Le cas serait encore plus dramatique en dessous de 60 dollars. Entre les subventions et les transferts sociaux, le gouvernement algérien consacre, 60 milliards de dollars par an, soit plus de 26% de son produit intérieur brut du fait de la forte consommation intérieure où pour le gaz traditionnel, du fait du faible prix, qui pourrait dépasser les exportations actuelles qui peinent à dépasser les 55 milliards de mètres cubes gazeux. Le défi est de réfléchir aux voies et moyens nécessaires de dynamiser le tissu productif, entreprises publiques et privées locales et internationales créatrices de valeur ajoutée interne , devant se fonder sur l’entreprise créatrice de richesses et l’économie de la connaissance. Comme je l’ai annoncé depuis près de trois années ( voir www.google.fr) et devant le premier ministre algérien récemment lors de la conférence organisée par le Ministère de l’Industrie à Alger( 05 novembre 2014) , les ajustements économiques et sociaux à venir seront douloureux. L’Algérie qui doit d’ores déjà à penser la création d‘un comité de crise composé d’experts indépendants et non de fonctionnaires aux ordres afin d‘éviter l’expérience douloureuse de la crise de 1986 qui a eu un impact désastreux en 1994/ (rééchelonnement).

L’Algérie doit donc profiter de sa relative aisance financière (dette extérieure très faible, moins de 4 milliards de dollars) sinon ces réserves s’épuiseront horizon 2020.Idem pour le fonds de régulation des recettes, qui au rythme de la dépense publique de 2014 risque de s’épuiser courant 2016. Il s’agit de transformer cette richesse virtuelle en richesses réelles, et donc de réaliser la transition difficile vers une économie hors hydrocarbures dans le cadre des valeurs internationales, afin d’atténuer et les chocs sociaux. la loi de finances complémentaire prévue fin juin/ début juillet 2015 opérera que des ajustements conjoncturels. Or l’Algérie a besoin d’une vision stratégique qui nécessite un langage de la vérité loin du populisme dévastateur et donc une grande moralité de ceux qui dirigent la Cité si l’on veut rétablir la confiance brisée entre l’Etat et les citoyens .

3ére partie et Fin

Par le Dr Abderrahmane Mebtoul