Certains analystes l’avaient prévue en 2008 : la reprise, après la crise des subprimes, devait être molle et suivie d’une nouvelle récession. Ils avaient décrit ça sous le phénomène «W», une crise en «double creux», avec une récession suivie d’un début de reprise puis d’une nouvelle récession. En dépit des réformes annoncées le 9 décembre dernier, des incertitudes subsistent quant à la manière dont va être appliqué l’accord, maintenant par-là même une volatilité élevée dans un avenir proche et pesant sur les perspectives de croissance pour les six prochains mois au moins. «La perspective d’une légère récession dans la zone euro au cours du premier semestre 2012 s’annonce de plus en plus probable», d’après les prévisions du Ernst & Young’s Eurozone Winter Forecast (EEF).
Toutefois, dans l’hypothèse d’une mise en œuvre de l’accord de décembre, les prévisions annoncent une faible croissance de l’ordre de 0,1% seulement au sein de la zone euro d’ici à la fin 2012, atteignant 1,5% – 2% pour 2013-2015. «La réforme votée lors du sommet du 9 décembre dernier constitue un pas dans la bonne direction bien que les réactions se soient avérées modérément positives. Jusqu’à présent, les investisseurs demeurent très préoccupés par l’engagement et la capacité des gouvernements de la zone euro à mettre en œuvre rapidement des réformes. Même si ce ralentissement n’est pas comparable à celui connu en 2008, il existe toujours des préoccupations majeures quant aux problèmes de liquidités bancaires et au chômage pour 2012», commente Marie Diron, conseiller économique Senior au sein de l’équipe EEF.«Les incertitudes qui pèsent sur la zone euro ne peuvent que tempérer l’enthousiasme des sociétés européennes en matière d’investissement à long terme et de décisions d’embauche. Fondamentalement, la croissance demeure le défi majeur pour l’Europe et les économies dites «avancées», tout comme la capacité des économies matures à trouver de nouveaux leviers, afin d’enregistrer une croissance supérieure à leurs tendances historiques pour rembourser leurs dettes, mais aussi apprendre à vivre, à l’avenir, selon leurs moyens», commente Alain Kinsch, Country Managing Partner d’Ernst & Young Luxembourg.
«Les évolutions récentes en Grèce, en Italie et en Espagne, ainsi que l’accord européen diminuent le risque d’éclatement de la zone euro. Cependant, ce risque demeure plus particulièrement, en raison des parts importantes de dettes souveraines qui doivent être refinancées en 2012, et qui pourraient créer des tensions», déclare Marie Diron. Les coûts induits par l’éclatement de la zone euro seraient sans conteste très élevés et auraient des conséquences à long terme sur les économies européenne et mondiale dans leur ensemble. Dès lors, l’EEF estime que les gouvernements des principaux pays s’efforceront de maintenir la monnaie unique. Il semble probable que le coût de la BCE agissant comme prêteur, même s’il s’agit d’un dernier ressort, serait moindre que les coûts à moyen terme d’un éclatement. La crise des dettes souveraines aura aussi un impact sur les économies du reste du monde. Ainsi, la directrice générale du FMI, Christine Lagarde, estime qu’il «n’y a pas d’économie dans le monde, que ce soit dans les pays à bas revenus, les marchés émergents, les pays à revenus moyens ou les économies hyper-avancées, qui sera immunisée de la crise». Pour l’Ocde, la croissance de la planète freinerait à 3,4% l’an prochain après 3,8% cette année, tandis que le FMI a annoncé qu’il abaissera «probablement» en janvier sa prévision de 4% pour 2012.Pour Ernst and Young, «les perspectives pour le Royaume-Uni et les Etats-Unis demeurent difficiles», mais les pays émergents ne sont pas davantage «immunisés», puisque «les exportations sont toujours un facteur majeur de leurs performances économiques».
A. E./agences