Mouloudia d’Alger – CS Constantine,La doyenneté, au cœur de la bataille

Mouloudia d’Alger – CS Constantine,La doyenneté, au cœur de la bataille

Le 7 août prochain, le Mouloudia d’Alger fêtera son 92e anniversaire. Une doyenneté que revendique le CS Constantine qui avance la date de 1898 pour la création du club.

En effet, cette date fait référence à la doyenneté autoproclamée par les dirigeants du CS Constantine depuis plusieurs années, alors que l’histoire retient qu’officiellement c’est le Mouloudia d’Alger, né le 7 août 1921, qui est le doyen des clubs algériens. Le Club Sportif Constantinois, lui, a pris officiellement cette appellation en 1926 avec comme président Salah Abderahim. L’année 1898 fait plutôt référence à l’Iqbal Emancipation, une des premières associations sportives de la ville de Constantine dont se revendiquent les Clubistes comme étant le CSC, mais sous une autre appellation d’autant que les couleurs de ce club étaient le Vert et le Noir. Aujourd’hui, l’écusson arboré sur le maillot de l’équipe porte bel et bien la date de 1898 et il le sera pour toujours, déclarent les dirigeants et les supporters du CSC à l’unisson. Dans son ouvrage Les associations sportives d’Algérie de 1867 à 1952, paru en 2003 à l’occasion de l’année de l’Algérie en France, Abderrahmane Zani, qui n’est autre que le fils de Mahmoud Zani qui fut athlète de la première association sportive algérienne dénommée Avant-garde-Vie au Grand Air d’Alger créée en 1895, énumère à travers une recherche bibliographique bien fouinée une à une les associations nées durant cette période. Ainsi, en pages 32 et 139, Zani présente sans clichés et respectivement les deux clubs, le MCA et le CSC avec le rappel des noms des présidents, dirigeants, secrétaires, trésoriers et entraîneurs de la première époque. Zani rapporte les dates officielles de la naissance des deux clubs : 1921 pour le Mouloudia et 1926 pour les Clubistes. Sans équivoque. Dans des ouvrages plus récents, comme les guides d’Ahmed Bessol Lahouari par exemple, ou bien au niveau des instances du football (FAF et LNF) ce sont les mêmes dates qui sont retenues, c’est dire qu’officiellement le CSC est né cinq ans après le MCA et non pas avant. Cela est confirmé par le Journal Officiel de la République française de l’époque paru le 1er octobre 1921 à la page 11 419 dans la «déclaration d’associations» où l’on peut lire : «31 août 1921. Mouloudia Club Algérois. But : tous les sports. Siège : Buvette Américaine, place Mahon, Alger». Les Constantinois du CSC, eux, ne l’entendent pas de cette oreille et persistent à revendiquer la doyenneté des clubs algériens. Lors de l’accession des Clubistes en Nationale Une, en 2004, le réalisateur Ali Aïssaoui produit un documentaire dans lequel il raconte l’histoire du club de l’antique Cirta tout en insistant sur cette histoire du doyen que les Sanafir (nom donné aux très nombreux supporters du CSC) revendiquent à travers les grandes banderoles qu’ils affichent régulièrement dans les travées du stade Hamlaoui ou dans l’ancienne enceinte de Benabdelmalek. «Le vrai doyen, c’est le CSC», peut-on lire. C’est même une obsession chez les fans de ce club de vouloir à tout prix imposer et lier sa naissance à celui de l’Iqbal Emancipation. Dans son documentaire, Aïssaoui donne la parole aux anciens, parmi lesquels Abdelkrim Beldjoudi, l’une des figures vivantes du club, qui donnera sa version de l’histoire appuyée par des documents très rares prouvant la relation étroite entre l’association Iqbal Emancipation née en 1898 et le CSC né, lui, en 1926.

L’histoire

L’Iqbal Emancipation est l’ancêtre du CSC

Un autre témoignage est apporté par Hadj Mouloud Bouderbala qui tente de prouver la doyenneté du CSC à travers un livret paru en 1988 sous l’intitulé : «Chabab Sinaât Qasentina, CSC : 1989 – 1988», édité par Dar El-Baâth de Constantine. Pour Bouderbala, il n’y a aucun doute : l’Iqbal Emancipation est l’ancêtre du CSC qui prit successivement les noms de l’Etoile Club Musulman (1917) puis le CSC (1926), mais dont les couleurs sont restées et resteront invariablement les mêmes : Le Vert et le Noir. Avec une bande d’amis, Bouderbala avait fondé le Sans Souci Sportif Constantinois en 1941 et installe le siège de ce club dans sa propre maison avant de le faire intégrer, avec armes et bagages, au CSC une année après, soit en 1942. Depuis, il a toujours servi la cause des Verts (d’El-khodora), après l’Indépendance jusqu’à la réforme avant qu’il ne disparaisse le 6 septembre 1989 en laissant un ouvrage dans lequel il raconte quelques chapitres de la longue et riche histoire du CSC. Après la première résistance de la ville de Constantine en 1836, menée par Ahmed Bey, la cité céda aux mains du colon le 13 octobre 1837 devant une armée forte en hommes et en équipements. Quelques années après, des hommes se sont donné le mot pour poursuivre la résistance sous d’autres formes, en créant une association musulmane aux couleurs symboliques : le Vert pour l’espoir et le Noir pour le deuil que les Constantinois porteront pour longtemps. Tout en lui donnant le nom d’Iqbal Emancipation, cette association, la première en Algérie selon l’auteur, vivra jusqu’à la veille de la Première Guerre mondiale où plusieurs de ses membres, des jeunes surtout, furent expédiés sur le front en 1914. «L’étouffement de l’Iqbal par l’administration française dura jusqu’à l’approche de l’armistice vers 1917», raconte le défunt Bouderbala.

A. S-B

La deuxième étape

ECMC prend le relais, mais disparaît en 1917

L’étouffement de l’Iqbal par l’administration française a amené à la naissance de l’Etoile Club Musulman de Constantine (ECMC), tout en gardant les mêmes couleurs. L’Etoile marquera son passage par une victoire retentissante, en 1917, face à l’AS Montpensier à Alger (2 à 0), mais surtout avec cette Coupe d’Afrique du Nord décrochée contre le Stade Gaulois à Tunis (4 à 2) avant de disparaître sous la contrainte coloniale en 1918. Huit années passèrent, et autour d’un café au «Bon Air» sur le boulevard Zighoud-Youcef (anciennement appelé Tabia), à Constantine, va naître officiellement un 26 juin 1926 le Club Sportif Constantinois, avec les docteurs Zerkine, Mouffok Abderahmane, Bencharif Hacine, Lefgoun Mohamed-Saïd, Bouhired Hadj Driss, Belhimeur Seghir, Bentellis Si Mohamed, Benbadis Zoubir, Ladjabi Rachid, Beldjoudi Hamaïda, Benazzouz Khoudir, Boumalit Mohamed, Benouataf Salim, Bendjelloul Alaoua, Benhamdouche Abdelkrim et tant d’autres. Les noms des Français faisant partie du club, à l’instar des autres clubs musulmans algériens, c’était une obligation de l’administration française née du code — raciste — de l’indigénat signé Regnier. Pour contourner cette obligation, les dirigeants du CSC se rabattaient sur des jeunes citoyens français venus accomplir leur service militaire ou des juifs bénéficiant du décret Crémieux.

La réalité

Pour l’instant, c’est le MCA qui garde le statut

Ce sont-là quelques lignes sur la naissance de ce CSC qui, aujourd’hui, reste parmi les clubs les plus populaires d’Algérie drainant derrière lui des centaines de milliers de supporters, même si sur le plan du palmarès il n’a réussi qu’un seul titre, celui de champion d’Algérie saison 1996/1997. Comme le Mouloudia d’Alger, le CSC a ses martyrs tombés au champ d’honneur, ses autres disciplines sportives, ses facettes et activités culturelles durant la nuit coloniale et des faits d’armes que l’histoire retiendra pour l’éternité. Quant à la doyenneté, et en attendant qu’un travail historique plus recherché et plus étoffé soit fait à l’avenir, le MCA garde son titre administratif officiel. En toute sportivité.

A. S-B

Mouloudia Club Algérois, selon Zani Abderrahmane

• Création : 1921. Siège social : 2, place de Chartres, Alger.

• Disciplines : football, basket-ball, volley-ball, athlétisme, boxe et natation.

Président : Tiar Mohand. Vice-présidents : Djaoud Ahmed, Roze Louis, Benhabyles Abdallah, Sator Kaddour. Secrétaire général : Djazouli Mouloud. Secrétaire adjoint : Elkessa Abdelkader. Trésorier général : Dahmoun Djaâfar. Trésorier adjoint : Boulebah Allaoua. Assesseurs : Dahmoun Omar, Chaïb Arezki, Tarakli M’hamed, Fouila Ahmed, Skandrani Mohamed, Derriche Braham et Abdoun Mahmoud.

• Entraîneurs :

Football : Fouila Ahmed.

Natation : Belkessa Abdelkader

Athlétisme : Hanoun Larbi

Basket : Hamoudi Allel

Volley : Benhaddad Mohamed

• Commissions :

Football : Derriche Braham (président), Skandrani Mohamed (vice-président), Djazouli Mouloud (secrétaire), Dahmoun Omar, Belhadj Hamidou et Fouila Ahmed (assesseurs).

Volley : Bourkaïb Rabia (président) ; Benhaddad Mohamed (vice-président).

Boxe : Abdenour Mohamed (président), Belhadj Hamidou (vice-président), Derradji Abderrahmane (secrétaire) et Djaoud Ahmed (assesseur).

Athlétisme : Bensiam Benyoucef (président), Boudergouma Mohamed (vice-président), Chetouf Mohamed (secrétaire). Hanoun Larbi, Feradi Yahia, Meghezi Taïb et Hadjabi Fatah (membres).

Natation : Belkessa Abdelkader (président), Djazouli Mouloud (vice-président), Dahmoun Omar (secrétaire) et Boulerbad Alaoua (trésorier).

Basket : Abdoun Mahmoud (président), Naït Kaci Abdelkader (secrétaire) et Ketrandji Mustapha (trésorier).

Club Sportif Constantinois, selon Zani Abderrahmane

• Création : 1926. Siège social : 2, rue Poulle, Constantine.

• Disciplines : football, basket-ball, volley-ball, natation, boxe et cyclisme.

Président : Abderrahim Salah. vice-présidents : Saint-Jean Daniel, Riveccio François, Khattabi Abdelkader, Belhadj Mostefa Zouaoui, Bencheïkh Lefgoun Badredine, Bittoun Robert. Secrétaire général : Beldjoudi Slimane. Secrétaire adjoint : Bensmira Smaïn. Trésorier général : Bouderbala Mouloud. Trésorier adjoint : Bendjazia Abderrahmane. Contrôleur aux finances : Bresson. Assesseurs : Ferrari René, Zemmouri Mahmoud, Bouabdella Omar, Massali Bourhane, Bentellis Larbi, El-Ouali Bachir et El-Ghazali.

• Entraîneurs :

Football : Attali Lucica et Ferrari René.

Natation : Benchaïeb Bachara.

Boxe : Aoubdia Sassy.

Volley et basket : Benelmadjat Mostefa.

Cyclisme : Bensersa Salah.