Megharia est un grand monsieur qui s’est donné à fond pour que les couleurs de l’Algérie flottent dans le ciel. Il a été unique en son genre et continue à soutenir le foot algérien.
Il pense que Saâdane est le meilleur coach algérien qui a su comment faire de l’EN un groupe uni, capable de relever n’importe quel défi. Fodil a accepté de s’entretenir avec Compétition.
Saâdane a fait son choix concernant les représentants de l’Algérie à la CAN, il a convoqué Ziaya…
Ah très bien ! Il nous fallait du renfort en attaque. Ziaya a montré qu’il méritait sa place en EN, je suis heureux pour lui, j’espère qu’il apportera un plus à l’équipe. C’est le seul renfort ?
Il a convoqué Zemmamouche, et Ousserir se trouve dans la liste des réservistes…
C’est certainement le choix de l’entraîneur des gardiens, car c’est lui qui suit de près les gardiens. S’il a vu que Zemmamouche est plus en forme, sûrement, il l’a fait comprendre à Saâdane. C’est la raison pour laquelle Ousserir se trouve réserviste.
Il y a Djebbour et Ghilès qui ne font pas partie du lot…
Le coach a vu une baisse de niveau dans ces deux joueurs, c’est pour cela qu’il ne leur a pas fait appel. Néanmoins, que ce soit Djebbour ou Ghilès, ils savent très bien que même s’ils ratent la CAN, ils peuvent revenir après. Il reste beaucoup de temps pour la Coupe du monde. Entre-temps, il y aura des blessures et des baisses de forme. Donc, il ne faut pas se dire qu’on ne reviendra pas, car Saâdane fera tout pour le bien de l’EN.
En évoquant le cheikh, vous l’avez eu comme entraîneur en 1986. Comment était-il ?
J’ai été sous la houlette de Rabah Saâdane en 1986. Il y avait les pros et les locaux. Ce n’était pas facile pour faire un groupe soudé. Saâdane est un coach complet, c’est un bosseur. C’est l’un des rares grands coaches qu’a engendrés l’Algérie. C’est un homme qui aime son boulot, j’’ai tellement appris avec lui. Je lui rends hommage et je ne lui souhaite que du bonheur pour la suite.
On disait qu’en 1986, on lui imposait des joueurs…
Ce n’est pas vrai. Il a été toujours un sage, il avait ce sang-froid comme on le voit lors des rendez-vous actuels. Quand vous êtes dans tous vos états, sans pouvoir tenir à votre place, lui, il reste zen. Il gérait les états d’âme des pros qui ne voulaient guère rester sur le banc.
Quand il ne convoque pas ou ne fait pas jouer un joueur, est-ce qu’il lui parle?
Vous savez à notre époque, un coach ne donnait jamais de justification à un joueur qui ne va pas jouer, mais lui, non. Il vient, il prend du temps pour justifier son choix. C’est un fils de bonne famille qui ne veut en aucun cas blesser une personne.
Ça vous est arrivé ?
Je me souviens très bien. Il restait 2 mois avant de partir à Mexico. Il est venu et il m’a dit que je n’allais pas jouer le premier match contre l’Espagne. Il m’a fait savoir que le foot espagnol comptait sur le jeu aérien. Ce n’était pas un match pour moi. Mais il m’a fait savoir que le second rendez-vous et le troisième, j’allais les jouer. Ce temps consacré pour justifier son choix, alors qu’il n’était pas obligé de le faire, m’a vraiment touché. Je garde que de bons souvenirs de ce grand homme.
Y a-t-il des événements similaires que vous avez vécus avec Saâdane ?
Il y en a beaucoup, mais ce qui me vient maintenant en tête, c’est la Coupe d’Afrique en Egypte, en 1986. On avait réussi contre la Zambie et le Maroc. Il restait un point à décrocher contre le Cameroun pour passer au prochain tour. Le coach a préféré me préserver au prochain tour. Dans le onze du Cameroun, il y avait Roger Mila. Il était heureux de savoir que je n’allais pas jouer. Il disait qu’il me craignait. Malheureusement, on s’est inclinés lors de cette partie.
Donc, un choix qui a fait que l’Algérie perde ses chances…
Non, ce n’était pas cela. Il y avait des pros qui ne voulaient pas rester sur le banc.
Pour eux, il n’était pas normal de voir un joueur qui évolue au bled être titulaire et eux sur le banc. Ce n’était pas facile de gérer tout cela et c’est ce qui a trop dérangé Saâdane dans son travail. Disons qu’on lui avait mis des bâtons dans les roues.
C’est dur donc de gérer un groupe, n’est-ce pas ?
Asolument. Il faut savoir que dans un groupe de 23 joueurs, tout le monde veut jouer. Saâdane tentait de gérer les tensions même dans la difficulté. C’est un homme sage qui n’est pas facile à irriter facilement. Malheureusement, il y avait beaucoup de problèmes qui ont fait qu’on n’était pas parvenus pas à faire un bon parcours au Mexique.
A votre époque, concertait-il son staff ?
Et comment. Il y avait Mokdadi et Dahleb. Tous les trois prenaient leur temps pour discuter des choix qu’ils allaient prendre. En tous les cas, c’était la belle époque, ils s’entendaient à merveille.
Y a-t-il un secret dans cette réussite ?
La sérénité, le calme absolu, il a le flair pour choisir les bons éléments. Il prend tout son temps pour prendre une décision. Ça fait de lui un coach hors pair. Je pense que tout cela a été renforcé par l’expérience et c’est ce qui fait que Saâdane soit un grand coach.
Pensez-vous qu’on ait besoin de renforcer d’autres compartiments ?
Je pense surtout qu’il faut faire confiance à Saâdane et lui laisser le champ libre pour travailler. Il a prouvé à maintes reprises que c’est l’homme de la situation. Quand tout le monde doutait, lui restait là serein, car il savait qu’il avait fait le bon choix. Alors, laissez-le travailler.
En qualité d’ancien défenseur, que pensez-vous de la défense actuelle des Verts ?
Je n’ai rien à dire. On a une défense d’enfer. Je pense que c’est la meilleure de l’Afrique. Ils ont été bons en défense et se sont même offert le luxe de marquer des buts comme le but d’anthologie d’Antar. Dans ce compartiment, rien à dire, on est forts. On a un manque devant. Espérons qu’avec Ziaya, l’EN aura trouvé son finisseur.
Revenons à vous maintenant. Votre meilleur match était en 1986 contre le Brésil…
Vous savez, j’étais un fan du Brésil. Alors quand vous vous retrouvez sur un terrain affrontant votre idole, c’est clair, vous allez donner le maximum. C’était un rêve qui était en train de se réaliser. Alors, je me suis régalé. C’était grandiose.
On dit que vous êtes le meilleur stoppeur de tous les temps…
Pas à ce point. J’ai été, certes, deux fois meilleur joueur d’Afrique, mais pas le meilleur de tous les temps. Concernant cette génération, on a une défense solide, Bougherra, Haliche et Antar, et j’en passe, sur qui on peut compter et qui font du très bon travail.
Puis, vous êtes allé signer en… Tunisie.
Après avoir joué 4 coupes d’Afrique, je suis parti au Club Africain. J’avais plein de contacts en ce temps-là. J’étais courtisé par un club de deuxième division espagnole dont je ne me souviens pas du nom. Il y avait le PSG et le club de Zidane en Belgique. C’est de l’histoire ancienne. Aujourd’hui, je suis heureux de voir le foot algérien renaître de ses cendres.
Il faut pour cela frapper un bon coup durant la CAN…
On a une équipe sur qui on peut compter. Si aujourd’hui on peut rêver d’un avenir serein, c’est qu’on croit très fort en cette équipe qui a montré qu’elle peut rivaliser avec n’importe quelle pointure. On espère, en tous les cas, affronter l’Egypte en finale de la Coupe d’Afrique des nations pour lui donner une autre correction.
Mais ça ne sera pas facile, surtout lorsqu’on sait que les Egyptiens feront tout pour avoir leur revanche…
Il faut savoir que les Egyptiens ne nous ont jamais battus à l’extérieur. Dans ma carrière, j’ai affronté l’Egypte trois fois à l’extérieur. Ils n’ont jamais réussi à nous battre. Je suis persuadé qu’une fois encore, ils verront le foot algérien.
Vous êtes optimistes pour ce qui est de la CAN, et pour la Coupe du monde, croyez-vous qu’on a les chances de passer au second tour ?
Je ne peux pas vous donner d’avis là-dessus. Il faut d’abord voir ce que va donner ce groupe durant la CAN. Si on fait un bon parcours durant la CAN, je peux vous assurer quand ira très loin dans n’importe quelle compétition.
Un conseil à donner à cette génération ?
Quand je regarde bien, je trouve que les buts ont presque tous été réalisés par des défenseurs. Jusque-là, ça marche très bien, mais il faut savoir que la montée d’Antar ainsi que de Bougherra fatigue beaucoup Halliche qui reste à sa place.
En ma qualité de défenseur, je leur demande de faire attention, car en Coupe du monde, que ce soit les Anglais, les Slovènes ou les Américains, ces derniers vont certainement relever ce point qui sera exploité par l’adversaire.
Car quand un défenseur monte, il laisse sa place vide et ça ouvre le jeu pour l’adversaire. Je sais que nos défenseurs s’impatientent quand ils voient que les attaquants n’arrivent pas à marquer, ils montent pour donner un coup de main. Ça a réussi jusque-là, mais ça pourrait être un jour une lame qui nous sciera les jambes.
Alors, à tous nos défenseurs, je leur dis de bien garder leurs postes et laisser les attaquants faire leur boulot.
A. Z.