«Vaut mieux avoir une comédienne sans hidjab, qui peut jouer avec ou sans voile, qu’une comédienne en hidjab, qui refuserait de jouer des rôles sans voile.»
Lamine Merbah, réalisateur dans El Khabar
L’Entv, actuellement en panne de programme neuf, a diffusé ces derniers temps un vieux feuilleton algérien produit dans les années 90. Si le sujet traité ne mérite pas qu’on s’attarde dessus, le cas de certaines comédiennes algériennes a attiré notre attention: Fatima Belhadj et Amel Himeur.
Ces deux comédiennes, qui ont marqué leur temps, ne se produisent plus à l’écran aujourd’hui. La première s’est convertie à «la réalisation» et a signé plusieurs téléfilms avec Bouakkaz et son mari Souileh et surtout un long métrage cinéma intéressant sur la période du terrorisme en Algérie et la seconde joue rarement au cinéma et encore moins à la télévision et pour cause: ces deux comédiennes portent aujourd’hui le hidjab. En diffusant cette production intéressante réalisée par Lamine Merbah, qui date de 1994 et adaptée d’un texte du Syrien Mamdouh Adwane, l’Entv «dévoile» indirectement ces deux comédiennes «voilées».
Mais en levant le hidjab sur le talent de ces deux comédiennes, la télévision n’a pas levé tout le voile sur la question. Amel Himeur et Fatima Belhadj ont été les premières jeunes comédiennes à porter le hidjab dans le milieu du cinéma et de la télévision, connu pour être un milieu mal vu, où se mêlent vin et sorties.
Auparavant, Fatiha Soltan et Chafia Boudraâ, deux anciennes comédiennes, ont porté le hidjab, mais vu leur âge et le hidjab porté «proche du voile traditionnel», personne n’a trouvé à redire. Le voile ou le hidjab n’est toujours pas autorisé à l’écran. Il est seulement toléré. Si le hidjab est toléré pour le personnel technique de la télévision, techniciennes, réalisatrices et responsables, il ne l’est pas devant la caméra. La seule femme voilée autorisée à l’écran active à la chaîne coranique dans les émissions liées à la religion. Naïma Madjer, la célèbre présentatrice, n’avait-elle pas quitté l’écran pour le service de la programmation juste parce qu’elle avait osé porter le hidjab au début des années 90. Asma Djermoune, qui porte aujourd’hui le hidjab, a dénoncé le fait qu’on ne fait plus appel à elle, sous prétexte qu’elle porte le voile. Mais quel voile?
Un hidjab moderne à la «Mouza» (l’élégante femme de l’émir du Qatar) qui adopte un hidjab moderne très classe. Asma Djermoune, qui soigne son hidjab comme une coiffure, ne souhaite pas perdre sa notoriété, chèrement acquise de comédienne de feuilleton à cause d’un bout de foulard.
Ce n’est pas le cas de Amel Himeur qui porte le hidjab plus traditionnel et qui est prête à céder sa place de comédienne et sacrifier une carrière de plusieurs décennies et des années d’étude à l’Inadc de Bordj El Kiffan, pour justement ce bout de foulard. Cette problématique est déjà apparue au début des années 70 dans le cinéma égyptien quand Shams El Baroudi a mis un terme à sa carrière de comédienne en mettant le traditionnel niqab. Aujourd’hui, le phénomène s’accélère. De Sabreen à Mona Abdel Ghani, en passant par Ghada Adel ou même l’ex-danseuse Zizi Mustapha ou encore la célèbre chanteuse Chadia, elles ont toutes choisi de se voiler devant la caméra. Si le hidjab est une certitude dans les sociétés musulmanes comme l’Algérie ou l’Egypte, à la télévision et au cinéma, il reste encore un tabou qui n’est pas totalement dépassé… ou encore dévoilé.
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Amira SOLTANE