Belkhadem persistera-t-il à expliquer qu’il ne s’agit là que de signes de la bonne santé du FLN? Ou alors aura-t-il les moyens nécessaires pour retourner la situation en sa faveur?
Le FLN entame un tournant décisif et sa crise ne fait que s’amplifier davantage. Ce jeudi 13 octobre, les choses sérieuses ont commencé pour le Mouvement de redressement et de l’authenticité (MRA). La conférence nationale sur les réformes politiques, qui a été tenue à la salle des fêtes «Les Crêtes» de Draria (Alger), s’est déroulée sous haute surveillance sécuritaire. On évoquait une menace sérieuse des partisans du secrétaire général du parti, Abdelaziz Belkhadem. Effectivement, une vingtaine de «baltaguias» se sont déplacés sur les lieux mais ont été empêchés de s’approcher du lieu de la rencontre. Des centaines d’agents de l’ordre aux aguets ont été déployés autour de la salle et tout le long du chemin menant de la villa qui sert de siège au MRA du FLN, vers la salle «Les Crêtes».
Cette présence très remarquée des forces de l’ordre est un signe fort que la véritable épreuve de force est lancée. Signe à ne pas négliger, le fils de Belkhadem lui-même était présent sur les lieux. Il a tenté de foncer sur le barrage de la police mais il a été contraint de s’arrêter. La police a procédé à la vérification de l’identité de cette personne qui se proclamait être le fils de Belkhadem. Il a quand même été empêché de rejoindre la salle de la conférence. Un agent des Renseignements généraux nous a confirmé ces faits, estimant «normale» cette présence policière qui sert, selon lui, à sécuriser la rencontre et les invités du Mouvement. Mais la vigilance des organisateurs a été déjouée par un seul perturbateur. Venant de Laghouat, un jeune qui a réussi à s’insinuer dans la salle de la conférence en utilisant une fausse identité de journaliste, a tenté la manoeuvre avant d’être «éjecté» de la salle.
Autre signe à ne pas négliger, la présence des médias publics pour la couverture de l’activité du MRA. Pour la première fois, les caméras de l’Entv sont présentes à ce genre d’activités et l’agence officielle APS a elle aussi, couvert l’événement.
C’est dire que le véritable travail du MRA vient de commencer et que le rapport de forces est engagé. Une source bien au fait de ce qui se passe à la maison FLN, confirme que le MRA jouit, désormais, du soutien (dans l’ombre) de plusieurs cadres de l’Etat, dont des cadres du ministère de l’Intérieur et même des cadres de la direction actuelle du FLN. Ces soutiens, explique notre source, agissent avec comme objectif final de barrer la route à M.Belkhadem qui veut se présenter à l’élection présidentielle de 2014 en tant que candidat du FLN. Les ambitions présidentielles de Belkhadem, affichées avant l’heure, risquent de lui coûter cher.
Une fois la conférence nationale du MRA entamée, une avalanche de critiques acerbes s’est abattue sur la direction actuelle du parti conduite par Abdelaziz Belkhadem. L’accusation la plus grave est celle reprochant au FLN de «trahir le projet des réformes politiques en voulant les saper et de vouloir semer la fitna entre les Algériens».
Dans son intervention, le coordinateur du Mouvement, Salah Goudjil, a brossé un tableau noir du fonctionnement de l’actuelle direction de l’ex-parti unique. Pour lui, le FLN qui est en «crise dangereuse», a sombré «dans un tunnel dont personne ne connaît l’issue depuis le 9e congrès». La cause de cette crise incombe, selon M.Goudjil, à l’esprit du zaïmisme que cultive Belkhadem qui s’est entouré des personnes les plus dociles. Le réquisitoire de M.Goudjil est sans appel. Selon lui, aucune kasma ni mouhafadha n’est légitime à cause de la fraude qui a entaché le renouvellement de ces structures. Kamal Bouchama, ex-ambassadeur, ex-ministre, invité à la conférence, a qualifié les membres dirigeants du FLN de «mercenaires politiques». Quoi de plus grave que ça. Il appelle par conséquent à la rupture totale avec cette direction. Pour sa part, Abderrachid Boukerzaza, ex-porte-parole du gouvernement, a décliné dans son intervention les aspects et les causes de la crise profonde et multidimensionnelle du FLN.
Une crise d’identité qui se traduit dans des discours qui changent selon les circonstances, une crise de confiance entre la direction et la base, une crise organique, une crise de gestion et une crise de représentativité: voilà résumés par M.Boukerzaza les aspects de la crise du parti. Il s’en prend avec virulence à M.Belkhadem, sans le citer, lui reprochant de s’être taillé des structures sur-mesure. Il l’a invité à arrêter la mascarade.
Pour ce qui concerne les causes de la crise, l’intervenant les circonscrit en trois points. Il s’agit de l’absence de démocratie, la corruption et le non-respect du règlement intérieur et des statuts du parti.
A propos des réformes politiques, objet de la conférence, le MRA a exprimé des positions et des thèses qui tranchent avec celles de Belkhadem. Le coordinateur du Mouvement n’a d’ailleurs pas manqué d’accuser le FLN de vouloir exploiter à son profit les réformes politiques. Le Mouvement précise d’abord, qu’il aurait aimé voir la Constitution révisée avant les autres textes de loi. Il se dit pour un mandat présidentiel de 4 ans renouvelable une seule fois. Il se dit, en outre, contre le nomadisme politique et pour la démission des ministres six mois avant les législatives pour ceux désirant y participer.
Cela dit, Salah Goudjil a annoncé la participation du Mouvement, en tout état de cause, aux élections de 2012. Indépendants ou représentants du FLN, c’est juste une question de formalité pour les redresseurs.
Au rythme où vont les choses, les dinosaures du FLN finiront par s’entrechoquer alors que des pans entiers de la société réclament la mise en musée de ce sigle. Maintenant que le feu semble avoir pris, Belkhadem persistera-t-il à expliquer qu’il ne s’agit là que de signes de la bonne santé du FLN? Ou alors aura-t-il les moyens et les ressources nécessaires pour rebondir et retourner la situation en sa faveur? Les choses sérieuses ne font que commencer…