Tripartite – « Le consensus algérien anti-réformes » fissuré par les nouveaux entrants

Tripartite – « Le consensus algérien anti-réformes » fissuré par les nouveaux entrants

La 15ème tripartite « gouvernement-syndicat-patronat » s’est achevée jeudi soir. Cinq groupes de travail ont été mis en place pour plancher notamment sur, entre autres, un pacte de croissance, le rôle du Fonds National de l’investissement, le crédit à la consommation pour les produits locaux. Propos grinçants mais ambiance conviviale.

C’est une tripartite apaisée qui s’est tenue ce jeudi 12 octobre au palais du gouvernement à Alger. Le premier ministre Abdelmalek Sellal s’y est dit prêt à mettre l’entreprise au cœur du nouveau modèle de croissance algérien. Mais ne se voit pas couper trop vite le cordon ombilical avec la rente pétrolière «car le pays en a encore besoin pour se développer ». Il aura, ce faisant, presque contenté tout le monde puisqu’il a répondu aux attentes des employeurs tout en rassurant l’UGTA.

Slim Othmani président de Care qui a fait une intervention directe lors de la réunion a jugé «extrêmement positif » le discours du premier ministre. Abdelmalek Sellal a dit avoir bien compris le message fort que ses interlocuteurs lui ont adressé : cela ne peut plus continuer ainsi longtemps. « Il existe en Algérie un consensus objectif anti-réformes », l’expression consacrée du sociologue Lahouari Addi reprise lors de la séance par Abdelkrim Boudraa porte-parole de Nabni situe la franchise des débats. Mais « le modèle est intenable à court terme ».

Ce à quoi Abdelmalek Sellal a répondu « nous voulons une rupture par rapport au passé », le rôle de l’Etat étant « de réguler et de créer les conditions de la richesse ». Plus que les interventions des acteurs habituels des tripartites, ce sont celles des nouveaux entrants, Les think tank Nabni et Care, les personnes ressources indépendantes que sont les professeurs Abdelhak Lamiri, et Chems-Eddine Chitour ou encore l’économiste Mustapha Mékidèche « qui ont donné une autre tonalité à cette rencontre » estiment la plupart des présents. Même si de son côté Réda Hamiani président du FCE, a, dans la même veine, insisté sur la nécessité également de rompre avec le modèle de croissance portée par les seules dépenses publiques.

Cinq groupe de travail dont un pour Sellal

Cinq groupes de travail ont été mis en place à l’issue de la tripartite avec pour mission de remettre leurs rapports dans trois mois. Le premier groupe est chargé d’élaborer un pacte économique et social de croissance, le deuxième a pour mission de proposer les modalités de contribution du Fonds national de l’investissement (FNI) au financement de l’investissement national public et privé. Un autre groupe va plancher sur les mesures à prendre pour encourager la production nationale et la réintroduction du crédit à la consommation pour les produits locaux.

Un autre groupe s’occupera de l’encadrement des actes de gestion. Un cinquième groupe a pour mission d’élaborer les modalités facilitant l’intervention des entreprises nationales du BTPH dans la réalisation du programme national d’équipement. Chaque groupe de travail est présidé par un ministre ou un ministre délégué, à l’exception du groupe chargé de l’encadrement des actes de gestion qui sera pour sa part supervisé directement par le Premier Ministre, Abdelmalek Sellal. Ce dernier lors de ses multiples interventions a appelé solennellement les patrons Algériens à adhérer à une nouvelle démarche de « patriotisme économique ».

Le Premier Ministre a mis en avant « l’immense défi » à relever dans un contexte international difficile et instable. Il appelle, selon lui, à un consensus renforcé entre tous les partenaires autour de la bataille de la croissance, de la dynamisation du développement économique national et la relance industrielle ainsi que de la création de l’emploi par la construction d’une économique forte, diversifiée et indépendante des hydrocarbures.

« Les importations à l’origine de la débâcle »

Parlant au nom de la coordination des patrons qui englobe huit organisations patronales, le président de la CGEA Habib Yousfi a demandé au Premier ministre plus de propositions concrètes. Il a affirmé également que le recours massif aux importations est à l’origine de la débâcle de l’outil de production nationale. Les interventions des représentants des différentes organisations patronales qui ont pris la parole lors de cette réunion vont dans le même sens : il faut remettre sur rails l’économie à travers notamment l’instauration d’une base industrielle.

Reda Hamiani, le président du forum des chefs d’entreprises (FCE) s’est félicité des nouvelles orientations du gouvernement en faveur de l’entreprise mais il souligne que des contraintes majeures continuent de freiner l’investissement, l’industrie et le développement des entreprises. Interrogé en marge des travaux de la tripartite sur son retrait de la coordination des patrons, le président du FCE Reda Hamiani dira qu’il ne voulait pas ajouter de l’huile sur le feu. Lors de la lecture de la coordination des patrons par Habib Yousfi, le nom du FCE a été cité comme étant signataire. Réda Hamiani est catégorique : « Nous n’avons pas signé cette déclaration ».