Révélations du New York Times sur les djihadistes en Syrie, Le miroir du drame algérien

Révélations du New York Times sur les djihadistes en Syrie, Le miroir du drame algérien

Pour le commun des Algériens, ce nombre de 30.000 terroristes n’est pas une simple comptabilité sécuritaire. Le chiffre en lui-même charrie un lot de souvenirs très douloureux.

Terrible coïncidence. C’est à la veille du 10ème anniversaire du référendum sur la Charte pour la paix et la Réconciliation nationale que le journal américain New York Times, rend publics des chiffres ahurissants sur la situation sécuritaires en Syrie. 30.000 djihadistes venus de 100 pays différents ont rejoint la Syrie depuis 2011, rapporte le prestigieux quotidien citant des sources des Services de renseignements américains. Selon ce nouveau bilan américain, la plupart de ces 30.000 djihadistes ont rejoint les rangs du groupe État islamique (EI), appelé également Daesh, qui contrôle un vaste territoire s’étendant de l’ouest de l’Irak à l’est de la Syrie.

Pour le commun des Algériens, ce nombre de 30.000 terroristes n’est pas une simple comptabilité sécuritaire. Le chiffre en lui-même charrie un lot de souvenirs douloureux, de situations pénibles vécues par les familles algériennes dans leur chair.

Au milieu des années 1990, il y avait dans les maquis algériens, au moins 30.000 terroristes armés et prêts à brûler le pays et le reste avec. En face, une armée mal préparée à cette guérilla, des services de sécurité sous-équipés et un pays économiquement fragilisé par un baril de pétrole à moins de15 dollars.

Sous l’oeil désintéressé et au mieux amusé des Occidentaux, l’Algérie républicaine sombrait lentement, mais sûrement dans un intégrisme d’une rare violence. Des attentats à la bombe, des assassinats ciblés, des femmes enceintes éventrées, des bébés brûlés vifs, des intellectuels égorgés… du sang rien que du sang durant toute une décennie. Le flash-back de ces années de terreur fait apparaître aujourd’hui les éléments de Daesh comme de simples apprentis terroristes face à l’horreur algérienne. C’est cette macabre situation que rappelle le chiffre rapporté par le New York Times. La situation en Syrie est, de ce point de vue, un véritable miroir du drame algérien.

La différence est que l’Algérie était seule, un genou à terre, à faire face à cette situation. C’était grâce au sursaut salutaire de la société qui a joué le rôle d’une véritable digue à la déferlante intégriste. Pour le cas de Daesh, c’est toute un coalition mondiale qui s’y met.

Le journal américain rapporte, en citant le Pentagone, que «les frappes de la coalition internationale contre l’Etat Islamique avaient permis d’éliminer 10.000 des membres de ce groupe, celui-ci continue d’élargir ses rangs, avec une moyenne de 1000 combattants par mois».

Par des frappes militaires, les forces de la coalition n’étaient pas avares en termes financiers puisque selon le même journal les 500 millions de dollars dépensés par le Pentagone «pour entraîner d’autres forces rebelles» syriennes, dans le but de prendre le dessus sur l’Etat Islamique, «n’ont produit qu’une poignée de combattants».

Le degré de mobilisation internationale, les équipements militaires mis à la disposition de combattants antiterroristes et l’argent dépensé à cet effet, renseignent à quel point l’Algérie avait souffert dans cette guerre contre la terreur.

En réalité, l’Algérie a mené un double combat: l’un sur le terrain contre le terrorisme et l’autre envers la communauté internationale.

Placée sous embargo, il a fallu une lutte diplomatique acharnée pour convaincre «les gardiens de la démocratie» que le terrorisme en Algérie n’est pas une conséquence de l’arrêt du processus électoral en janvier 1992, mais qu’il y avait d’autres visées et que son mûrissement remonte à plus loin. N’étant ni l’Egypte, ni l’Afghanistan, l’Algérie ne subissait pas un intégrisme de conviction, mais un extrémisme de naufrage. Ce que les Occidentaux n’arrivaient pas à comprendre.

Il a fallu attendre les attentats du RER, en 1995 à Paris, pour que la France saisisse la réalité du danger islamiste. Des pays comme les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ne se persuaderont de l’horreur intégriste qu’au lendemain des attentats du 11 septembre 2001.