Ça grince entre les deux hommes politiques
Il semble y avoir un compromis qui arrange les deux parties. Ouyahia contrôle Ould Abbès et celui-ci ne perd pas la face en gardant la mainmise sur les médicaments.
Drapeau blanc ou début des hostilités entre le Premier ministre Ahmed Ouyahia et le ministre de la Santé Djamel Ould Abbès? En effet, Ouyahia a recadré les choses en fixant les attributions de Ould Abbès dans un décret exécutif publié ce mardi au Journal officiel. Ainsi, ce décret exécutif a le mérite d’être clair.
Le ministre de la Santé doit rendre compte au Premier ministre, au Conseil des ministres et au gouvernement, mais pas directement au président de la République. «Dans le cadre de la politique générale du gouvernement et de son programme d’action, le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière propose les éléments de la politique nationale en matière de santé, de population et de réforme hospitalière et assure le suivi et le contrôle de sa mise en oeuvre conformément aux lois et règlements en vigueur», stipule l’article 1 du texte de loi. Le même article ajoute: «Il (Ould Abbés), rend compte des résultats de son activité au Premier ministre, au Gouvernement et au Conseil des ministres selon les formes, modalités et échéances établies». Et c’est justement cette partie du texte de loi qui pourrait faire éclater une nouvelle guerre entre les deux hommes car ce «recadrage» n’est qu’une réponse du Premier ministre à la «rébellion» de son ministre de la Santé. En marge de sa visite à la wilaya de Laghouat le 14 décembre dernier, M.Ould Abbès s’était rebellé contre son patron à la tête du gouvernement. «Chaque ministre a ses responsabilités et le rôle du Premier ministre est de coordonner entre les ministères», avait-t-il clairement lancé ce qui sonnait comme une flèche au Premier ministre, M.Ould Abbès n’ayant pas été tendre avec lui. «Chaque ministre a une feuille de route tracée par le président de la République», avait-il affirmé sur un ton certain. Autrement dit, M.Ould Abbès voulait sous-entendre qu’il n’avait de compte à rendre qu’au président de la République. Persistant, il était même allé jusqu’à dire qu’il était «le seul et unique responsable du secteur». Cette pique lancée par Ould Abbès en direction d’Ahmed Ouyahia intervenait après la polémique qui a suivi la lettre adressée le 20 octobre par Ahmed Ouyahia à son ministre de la Santé, le tenant responsable de l’épuisement des stocks de médicaments à la Pharmacie centrale des hôpitaux. Le Premier ministre n’avait alors pas daigné répondre à son ministre. Mais ce n’était que le calme qui précède la tempête. Ouyahia répond à Ould Abbès avec un décret qui stipule clairement que Ould Abbès est désormais sous son contrôle. Voilà donc ce qui pourrait enfler davantage la polémique entre les deux hommes. A moins que…Ould Abbès revienne à de meilleurs sentiments. Il est vrai que du fait que Ould Abbès ait gardé un oeil sur le médicament démontre que la note du 20 octobre dernier du Premier ministre n’a pas pesé lourd dans la définition de ses nouvelles prérogatives. Le décret signé par Ouyahia définit les attributions de la Direction générale de la pharmacie et des équipements de santé rattachés au ministère de la Santé. Cette structure a pour rôle notamment «de développer la politique d’enregistrement et d’homologation des produits pharmaceutiques, dispositifs médicaux et équipements de santé et d’en évaluer la mise en oeuvre». Elle doit également «définir les besoins en produits pharmaceutiques, dispositifs médicaux et équipements de santé et élaborer les mesures appropriées destinées à assurer leur régulation et leur disponibilité», est-il mentionné dans le décret. Au vu de ce décret, il semble y avoir un compromis qui arrange les deux parties. Ouyahia contrôle son ministre, et celui-ci ne perd pas la face en gardant la mainmise sur les médicaments.